Dans un contexte international en profonde mutation, l’Union européenne est confrontée à des défis sans précédent depuis 1945. Alors qu’elle vit une période de blocage politique, l’UE court le risque de l’insignifiance (1) si elle ne parvient pas à exister en tant que puissance politique. Le projet porté par la France peut lui permettre de construire son autonomie stratégique, dans le respect de ses alliances, pour défendre ses valeurs et ses intérêts lorsqu’elle l’estime nécessaire. Ce projet, fondé sur la construction d’une solidarité et d’une conscience stratégique communes et sur des principes innovants, sera pleinement partagé par nos partenaires si notre pays parvient à en démontrer la crédibilité, en apportant notamment de solides garanties de sécurité.
L’autonomie stratégique européenne face au risque de l’insignifiance
« Dans un contexte de remise en cause du multilatéralisme, de fragilisation des alliances et de bascule vers un nouveau centre de gravité mondial situé entre États-Unis et Asie, le continent européen devra affronter à lui seul et – de plus en plus – par lui-même, tous les types de menaces : puissance, terrorisme, hybride, cyber, migrations. L’objectif est clair : parvenir à construire ensemble une autonomie stratégique européenne » (2).
L’Europe est confrontée à des défis sans précédent depuis 1945. L’ordre international connaît des ruptures profondes avec l’effacement progressif des repères traditionnels. De nombreux pays émergent sur la scène internationale. Le projet de One Belt, One Road illustre les tendances hégémoniques chinoises qui pourraient contraindre les rapports internationaux dans les prochaines décennies. La question de la pérennité des outils de régulation internationale et des alliances traditionnelles est clairement posée, avec une remise en cause des accords passés entre États, comme en témoigne la sortie des États-Unis de l’accord sur le climat. La réaffirmation des rapports de force et de puissance souligne le rôle essentiel des capacités militaires. Simultanément, l’Union européenne vit une période de fortes tensions politiques. Le projet économique et politique né des ruines de la guerre pourrait finalement échouer.
L’UE vit donc un moment clé avec la simultanéité du Brexit et les incertitudes américaines. Si elle ne parvient pas à exister comme puissance, c’est-à-dire comme entité politique unie, capable de défendre ses intérêts et ses valeurs, de peser sur la scène internationale, les pays européens pourraient ne plus compter dans le paysage géopolitique mondial. Elle court le risque de l’insignifiance dont elle pourrait ne pas se relever. Plusieurs options sont envisageables. La plus simple serait de laisser les choses évoluer au gré des politiques nationales, en prenant le risque de ne plus pouvoir choisir. La deuxième serait de renoncer en se plaçant résolument et définitivement sous le parapluie américain, au risque de fortes déconvenues si les États-Unis se désintéressent de l’Otan. La troisième viserait à développer une nouvelle forme de défense européenne, autour d’une « coalition de bonne volonté », composée de pays membres ou non membres de l’Union, décidés à agir pour disposer effectivement de capacités d’action opérationnelles. Il faut aujourd’hui être inventif et pragmatique pour s’extirper d’un modèle de défense européenne qui n’a jamais vraiment fonctionné. Le projet d’autonomie stratégique européenne, fondé sur un principe de solidarité entre États, porté par la France, pourrait permettre l’affirmation d’une Europe plus forte capable de faire face, dans le respect de ses alliances, à l’évolution du monde. Mais la vision française doit être partagée par les autres États, ce qui n’est pas encore le cas.
L’autonomie stratégique européenne est aussi nécessaire pour préserver l’indépendance de la France, en particulier pour la défense de ses intérêts vitaux. Des interdépendances consenties et l’autonomie stratégique européenne donneront à la France et aux pays européens des marges de manœuvre pour disposer des capacités nécessaires pour préserver sa souveraineté, son indépendance nationale et être libre de ses choix. Pourtant la voix de la France ne porte pas vraiment. Les pays européens endosseront le projet français s’il est crédible et fiable, et s’il s’accompagne de garanties de sécurité qui répondent à leurs attentes.
La fin d’un monde
L’effacement européen
L’émergence de nouvelles puissances politiques et économiques, au premier rang desquelles la Chine, et le recul relatif des États-Unis ont consacré la fin du monopole occidental de la puissance. Le retour musclé de la Russie dans l’arène géopolitique s’est traduit par une sorte de sidération au sein des pays européens dont certains, en particulier à l’Est, s’engagent dans des politiques strictement nationales, sur certains points contraires aux objectifs de l’Union européenne. L’Union se cherche et se divise face à son voisin russe alors que notre dépendance énergétique est conséquente et que certains de nos intérêts sont communs, notamment en matière de lutte contre le terrorisme. L’enjeu est de taille car les Russes se sentent moins européens et donnent l’impression de n’avoir pas grand-chose à attendre d’une Europe qu’ils jugent en déclin.
En Europe, la sensibilité de la question migratoire illustre les attentes des populations en matière de sécurité et de défense. La sortie du Royaume-Uni peut inquiéter car un acteur majeur dans le domaine de la défense quitte l’Union européenne. Cependant, ce départ peut aussi être saisi comme une opportunité, dans la mesure où il signe de facto la fin d’une opposition systématique au renforcement de la défense européenne, au nom de la préservation de la stricte primauté de l’Otan et pousse également les Britanniques vers des coopérations renforcées avec d’autres européens pour jouer pleinement leur rôle stratégique. Dans le même temps, les États-Unis ne veulent plus jouer le rôle de gendarme du monde et entendent se concentrer sur la défense de leurs intérêts directs. Ils affaiblissent le multilatéralisme, à l’image de leur sortie du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire (FNI) mais aussi de l’Accord de Paris sur le climat. Et aucun pays ne veut reprendre cette lourde responsabilité : la Chine ne semble pas l’envisager et les Européens ne peuvent pas assumer une telle charge tant leurs divisions, en particulier pour définir des intérêts stratégiques communs, confinent à l’impuissance.
L’environnement stratégique de l’Europe s’est durci. Le monde semble entré dans une sorte de « guerre permanente » (3), en particulier dans la sphère informationnelle où de nouvelles formes de conflit ont émergé avec la manipulation des opinions publiques, les ingérences numériques et la guerre cybernétique. De la propagande djihadiste à l’ingérence électorale et de la manipulation ciblée à la cyberattaque, Internet est devenu un nouveau champ de bataille qui bouleverse l’ordre géopolitique, multiplie les capacités et les formes d’agression. Il abolit la distinction entre la guerre et la paix, entre la sécurité et la liberté.
L’ensauvagement (4) des relations internationales
Dès 2005, peu convaincue de la « fin de l’histoire » (5), Thérèse Delpech met en exergue la menace d’un ensauvagement des relations internationales, dû notamment au désir de rééquilibrage du pouvoir, manifesté par l’Iran, la Chine, l’Inde et la Russie. La philosophe insiste surtout sur la nécessité de regarder le monde tel qu’il est et non tel qu’on rêve qu’il soit : « les pays de droits acquis, qui ne se battent que pour défendre des positions conservatrices, finiront par être balayés » (6). De fait, depuis plusieurs années, la géopolitique est de retour. Les rapports de force n’ont pas disparu des horizons des États. Les jeux de puissance continuent de régir le monde. Bien plus, les capacités de négociation entre États se dégradent et « nous avons atteint un stade de méfiance réciproque inconnu même aux pires heures de la guerre froide (…). Aujourd’hui, on ne négocie plus rien » (7). Les affaires Skripal (8) et Kashoggi (9) témoignent d’une désinhibition qui tend à se généraliser avec une prise de risque consentie et assumée de la part de pays, qui ne craignent pas d’être mis au ban de la communauté internationale.
La notion de surprise stratégique définie dans le Livre blanc de 2008 (10) devient désormais réalité tant l’incertitude prévaut sur les relations internationales et sur les stratégies de puissance. Un brouillard s’installe. Il est caractérisé par l’effacement des règles, des institutions internationales délégitimées et décrédibilisées par leur incapacité à agir. Il se traduit par une dérégulation généralisée et une dangereuse remise en cause des accords conclus dans le passé. L’ordre mondial bâti à la fin de la Seconde Guerre mondiale, qui a survécu à la fin de l’URSS, s’efface lentement. La compétition stratégique entre les États-Unis et la Chine soulève le spectre du « piège de Thucydide » (11), c’est-à-dire d’un conflit majeur si la Chine menace l’hégémonie américaine, car aucun grand remaniement de puissance n’est intervenu sans conflit armé.
L’Europe semble donc entourée d’un cercle de fer tant les menaces sont présentes dans son environnement immédiat. Elle est confrontée à plusieurs défis : celui de la défense de ses valeurs, face aux nationalistes et aux populistes, celui de sa capacité à agir et celui d’exister comme un acteur de premier plan et crédible sur la scène internationale. Or, la politique de sécurité et de défense commune souffre d’un handicap majeur : peu d’États sont prêts à remettre en cause le rôle central de l’Otan pour défendre le continent européen. L’Alliance atlantique, synonyme d’assurance américaine, est considérée comme la solution la plus solide et la plus économique pour de nombreux États. De profondes divergences sur l’analyse des menaces divisent les Européens. Les pays du Sud sont sensibles aux questions liées à l’Afrique quand les pays de l’Est sont obnubilés par la Russie. Pour ne pas sortir de l’Histoire, l’Europe doit abandonner « l’idéologie bisounours » dénoncée par Hubert Védrine (12) en définissant et en nommant clairement les menaces auxquelles elle doit faire face.
Les menaces sur la souveraineté économique et technologique
Le poids économique des pays européens baisse continuellement sous l’effet de l’émergence de nouveaux compétiteurs. Vers 2050, la part de l’Europe des 27 dans la production mondiale pourrait passer sous les 10 %, seule l’Allemagne fera partie des dix premières puissances économiques mondiales (13). Le défi est économique et technologique. « Le capitalisme européen ne résistera au XXIe siècle face aux oligopoles américains et chinois soutenus pas leurs États que s’il est adossé à une capacité de décision forte et crédible. Elle n’est plus à la portée des Nations européennes isolées, dès lors qu’elle s’applique à des défis globaux. Elle constitue la raison d’être de l’Union, à condition qu’elle se repense en termes de puissance » (14).
La Base industrielle, technologique et de défense européenne (BITDE) évolue dans un environnement de plus en plus concurrentiel, marqué par l’arrivée de nouveaux acteurs, comme ceux du New Space américain. Les États-Unis disposent aussi d’un pouvoir de blocage sur les ventes d’armement en imposant la norme ITAR (International Traffic in Arms Regulations) en vertu de laquelle ils peuvent interdire la vente d’un armement à un pays tiers si celui-ci contient au moins un composant américain placé sous ce régime particulier. Depuis avril 2018, ils s’opposent à la vente de missiles européens à l’Égypte, bloquant la vente d’avions de combat supplémentaires. Pour Éric Trappier, président de Dassault Aviation, « les Américains utilisent ces règles pour limiter certaines exportations vers des pays pourtant amis, pour des raisons souvent plus politiques que juridiques ». Ces restrictions touchent aussi le domaine de l’Espace. En 2013, les États-Unis ont refusé une demande de réexportation aux Émirats arabes unis de composants américains, nécessaires à la fabrication de deux satellites français produits par la France (15).
Les autorités françaises veulent désormais s’assurer d’une moindre dépendance aux composants relevant de cette législation. Au-delà, une Europe désunie risque une « vassalisation technologique » (16) sauf si elle réussit à s’accorder sur des projets concrets comme l’agence de recherche avancée européenne portée par André Loesekrug-Pietri, qui vise à soutenir un écosystème européen de l’innovation, impliquant les États et la Commission, pour que l’UE préserve son autonomie technologique.
Refuser de sombrer dans l’insignifiance
Innover pour exister
L’Europe fait donc face à des menaces multiples, simultanées et durables. Pour certaines, il n’existe pas le moindre début de solution. L’absence d’Europe dans le concert stratégique dessert les pays européens car une partie des menaces provient de crises extérieures non résolues. Le risque d’un déclassement stratégique irréversible est réel, avec, par exemple, seulement 4 pays européens (France, Royaume-Uni, Allemagne et Italie) parmi les 15 premiers budgets de la défense dans le monde. La complexité de cet environnement se traduit par une divergence d’intérêts parfois forte entre Européens. L’enjeu est de parvenir à fédérer le plus grand nombre autour d’une politique volontariste pour susciter une solidarité stratégique plus forte. La protection du continent européen et de ses citoyens passe par le renforcement de l’autonomie stratégique de l’Europe, donc l’intensification des efforts communs de défense.
La perspective d’une armée commune, déjà envisagée en 1954, reste lointaine et la construction d’une Europe de la défense crédible et puissante n’a pas encore abouti. Le fait que la Commission européenne se saisisse des sujets de défense marque les limites du processus intergouvernemental. L’expression d’armée européenne, employée par le Président français (17), doit être comprise comme la volonté de faire émerger une capacité militaire commune suffisante pour pouvoir intervenir et défendre les intérêts européens. Les incertitudes politiques actuelles pèsent logiquement sur l’Europe de défense. L’année 2016 a été marquée par de nombreuses avancées avec une Politique européenne de sécurité et de défense (PESD) renouvelée et peut-être la conscience que l’Europe ne peut être totalement nue et ne dépendre que des États-Unis, où les trois fondements traditionnels de la puissance américaine (libéralisme économique, multilatéralisme, défense des droits de l’homme et démocratie) sont remis en cause et où la diplomatie semble désormais plus transactionnelle que géopolitique. Depuis 2017, dans le contexte du Brexit, la défense européenne semble relancée avec la concrétisation des Coopérations structurées permanentes (CSP) et le Fonds européens de défense (FEDef). Les critiques et les obstacles ne manquent pas. L’attitude versatile et imprévisible du Président américain, Donald Trump, inquiète ceux qui veulent éviter de provoquer un affaiblissement irréversible de l’Otan et la menace russe amène logiquement de nombreux États d’Europe de l’Est à privilégier l’assurance américaine pour assurer leur défense. Pourtant, développer l’autonomie stratégique européenne permet de répondre directement aux demandes américaines de partage du fardeau (burden-sharing), et de montrer que les Européens sont capables d’assumer leurs responsabilités.
La construction d’une défense européenne crédible ne doit pas forcément concerner d’emblée l’ensemble des États-membres. Le principe de l’unanimité n’est pas à rechercher systématiquement. Il s’agit d’être pragmatique et concret en développant des coopérations bilatérales ou multilatérales sur la base de dépendances ou d’interdépendances consenties, en profitant par exemple des coopérations capacitaires réussies. L’autonomie stratégique peut se construire progressivement, autour d’un noyau de pays dont les intérêts convergent. Elle doit pouvoir associer des pays européens non-membres de l’Union, au premier rang desquels la Grande-Bretagne. Les récentes initiatives marquent un changement notable dans le comportement de certains pays et la volonté de faire émerger une autonomie stratégique européenne soutient un mouvement global de renforcement capacitaire. Le dialogue actuel sur la sécurité doit servir de cadre pour parvenir à des interventions communes, en liant intérêts politiques, économiques et stratégiques. La politique de la règle, celle des petits pas réglementaires, qui a prévalu depuis le début de la communauté européenne, doit être subordonnée à la politique de la décision, qui suppose « culot, visibilité et improvisation » (18), c’est-à-dire un passage à la responsabilité politique, en remettant les Nations au centre des décisions. D’autant que l’Europe a réussi à dépasser de nombreux tabous. La notion de frontière est ainsi désormais ouvertement réaffirmée. Le point de vue français d’une Europe agissante pourrait prendre l’ascendant grâce aux circonstances. Le devoir de faire face simultanément à la Russie, à la Chine et à l’éloignement relatif des États-Unis est sans doute une chance qu’il faut saisir.
Faire émerger progressivement une conscience stratégique durable et soutenable
L’Europe doit être prête à défendre seule son modèle économique et social, ses valeurs, en se dotant d’une véritable politique de sécurité. « Elle doit se penser et se constituer progressivement en puissance politique et en acteur stratégique » (19). La première étape sera d’obtenir une définition partagée de la notion d’autonomie stratégique, qui est, de fait, comprise différemment dans les pays européens. En France, le concept « d’autonomie stratégique » apparaît dans le Livre blanc sur la défense publié en 1994 (20). L’autonomie stratégique est alors entendue comme synonyme de « l’indépendance et de la liberté d’action politique » de la France (21). Dans le Livre blanc de 2008, elle repose sur la somme de trois libertés : liberté d’appréciation, liberté de décision et liberté d’action (22). Dans ces deux acceptions, l’autonomie stratégique européenne peut être entendue comme une part de la défense de l’Europe et comme la capacité à agir en dehors du continent. Lors du discours prononcé à la Sorbonne le 26 septembre 2017 (23), Emmanuel Macron parle d’une capacité d’action autonome de l’Europe, complémentaire des capacités de l’Otan, la CSP et le FEDef étant considérés comme les principaux piliers de la relance de l’Europe de la défense. Mais le Président français insiste aussi sur la nécessité de parvenir à surmonter les divisions entre pays européens, l’ambition de certains étant limitée à une stricte complémentarité avec l’Otan et d’autres souhaitant couvrir l’ensemble du spectre des capacités militaires. Mais cette vision doit être partagée par d’autres pays pour que le projet français puisse émerger.
L’autonomie stratégique ne peut signifier indépendance totale tant les lacunes accumulées depuis plusieurs décennies seront difficilement comblées. D’autant que l’autonomie et l’indépendance stratégiques absolues n’existent pas. L’indépendance suppose la capacité à agir seul partout et de pouvoir agir à sa guise partout dans le monde. Plus aucun pays ne peut tout faire seul, pas même les États-Unis. Dans le contexte actuel, être autonome signifie disposer des capacités nécessaires pour surmonter des chocs fréquents et violents, pour peser sur les affaires du monde et pour défendre ses intérêts propres, d’où la notion d’autonomie stratégique. Pour les pays européens, cette autonomie repose sur deux principes simples : être informés de manière exacte et rapide et être en mesure d’agir seuls si nécessaire, les intérêts de l’Europe l’exigent. Il ne s’agit donc pas de s’organiser en opposition aux États-Unis et à l’Otan ou de chercher à les concurrencer mais plutôt d’être en mesure d’agir en complément. L’alliance avec les États-Unis reste fondamentale pour assurer la défense de l’Europe. Au-delà, la France pourrait proposer une garantie de sécurité solide, qui puisse donner un très fort crédit à son projet de convergence stratégique européenne.
Défendre la souveraineté politique de l’Europe
La communication stratégique et politique est vitale pour faire comprendre, rassurer et faire accepter le principe d’une autonomie stratégique par les alliés de l’Europe et par les Européens eux-mêmes. Mais c’est surtout la question de la crédibilité du projet qui est posée. Les pays européens ont désappris à s’unir sans les États-Unis, la plupart n’ont pas connu le « moment gaullien » français qui a permis d’affirmer la préservation d’une certaine indépendance nationale comme pierre angulaire de leur politique étrangère. La démarche portée par la France est mal perçue par certains Européens, tétanisés à l’idée de voir les États-Unis négliger leur statut de puissance européenne pour se tourner définitivement vers l’Asie. Il semble donc nécessaire de définir un message clair, adressé à tous les citoyens européens. L’autonomie stratégique européenne est indispensable pour rester souverain et maître de son destin. L’Europe doit assumer ses responsabilités stratégiques. Dans le strict respect de ses alliances, en premier lieu l’Alliance atlantique, l’Europe doit donc être en mesure d’affirmer d’abord son autonomie politique, c’est-à-dire sa capacité à prendre des décisions dans le domaine de la défense et à les mettre en œuvre ; ensuite, son autonomie opérationnelle pour planifier et conduire de manière indépendante des opérations civiles et militaires ; enfin, son autonomie industrielle, pour pouvoir développer et construire les capacités requises pour atteindre l’autonomie opérationnelle. Le Traité franco-allemand d’Aix-la-Chapelle signé le 22 janvier 2019 est par exemple un progrès (24). La France et l’Allemagne s’engagent à instaurer une culture commune entre leurs forces armées et se fixent comme objectif de surmonter leur divergence en matière d’exportation d’armements. Ce Traité marque une avancée symbolique même s’il n’efface pas ce qui sépare une puissance nucléaire mettant en exergue son autonomie stratégique et un pays résolument arrimé à l’Otan. La France et l’Allemagne n’en demeurent pas moins des partenaires de premier plan, a fortiori dans un contexte de Brexit. La volonté forte de développer des outils de défense crédibles, notamment par la conception et la production en commun des systèmes d’armement du futur, peut constituer un début de garantie d’autonomie pour l’Europe, dans l’esprit des pères fondateurs, la construction d’intérêts économiques communs participant à l’émergence d’un projet plus global.
Il est dès lors essentiel de développer une culture stratégique commune qui permet de renforcer l’interopérabilité et la capacité à s’engager ensemble mais qui ne fasse pas disparaître toutes les différences, qui restent une source de richesse stratégique pour l’Europe. Cette culture commune, c’est-à-dire une compréhension partagée des enjeux stratégiques pour l’Europe, évitera de faire de l’Union une arène de compétition entre ses États-membres. Elle peut aussi être vue comme une nécessité vitale pour rester cohérents face à la domination chinoise et américaine mais aussi face à des acteurs privés, comme les GAFAM. Elle permettra de rapprocher les perceptions sur la réalité et la nature des menaces, sur leur dangerosité et sur les conséquences qu’elles produisent sur la sécurité mondiale et européenne. Dans ce cadre, l’Initiative européenne d’intervention (IEI), portée par la France depuis juin 2018 (25), représente une opportunité intéressante et constitue un vrai défi d’appropriation. Agréger un cercle de Nations able and willing pour développer une culture stratégique commune en étudiant des scénarios pour développer l’interopérabilité et préparer des engagements communs permet d’avancer de manière concrète avec les pays intéressés et de développer un véritable esprit de défense et d’intervention, tout en laissant la porte ouverte à ceux qui souhaiteront rejoindre plus tard. La participation de la Grande-Bretagne est un gage de crédibilité.
Pour préserver sa souveraineté et son autonomie, compte tenu de l’émergence de nombreuses puissances, malgré les nombreux obstacles qui ne manqueront pas d’apparaître, l’Europe doit aussi parvenir à développer une BITDE cohérente, fondée sur la maîtrise des technologies de pointe et sur un marché européen de la défense. C’est un défi de taille. Pour certains pays, qui pratiquent les achats sur étagères, sans marquer de préférence européenne, le concept de BITDE est totalement inconnu. Pour d’autres, dotés d’une industrie d’armement, la BITDE est un terrain de compétition acharnée qui pourrait empêcher la relance d’une dynamique durable. Les trois nouveaux outils créés pour soutenir l’industrie, la recherche et les investissements européens doivent être soutenus dans la durée pour produire des effets concrets : le FEDef (500 millions d’euros en 2019 et en 2020, 13 milliards € ensuite), le processus annuel de revue des plans nationaux de défense et les CSP prévues par le Traité de Lisbonne. Au-delà, les règles définies pour la participation d’États tiers devront être assez ouvertes pour associer des Européens non-membres de l’Union. La convergence d’intérêts entre États européens doit permettre de définir et de conduire une action coordonnée durable.
La France, acteur central de l’autonomie stratégique européenne
Une nécessité pour notre pays
Les pays européens, au premier rang desquels la France, sont donc aujourd’hui confrontés au piège de l’insignifiance et de l’effacement. L’Europe représente 10 % de la population mondiale, 10 % des terres émergées et 20 % du PIB mondial ; la France 1 % de la population, 1 % des terres émergées et 4 % du PIB mondial. La Chine représente 20 % de la population mondiale, 20 % des terres émergées et 20 % du PIB mondial. Les pays européens doivent s’organiser pour défendre leurs intérêts collectifs et nationaux, et surtout leur souveraineté. L’autonomie stratégique européenne est un levier pour un pays comme la France, qui pourrait ne plus peser dans le futur concert des Nations, surtout si elle ne parvient pas à disposer de marges de manœuvre pour entretenir des capacités propres pour défendre ses intérêts vitaux.
Tant que l’Union européenne ne sera pas en mesure d’assurer toute ou partie de la défense de l’Europe et des intérêts européens, la France sera tenue de disposer de capacités de défense significatives, dans tous les domaines, jusqu’au moment où elle ne pourra plus en supporter le coût. Or, l’autonomie stratégique de la France est remise en cause sous l’effet d’une contrainte budgétaire qui s’est traduite par une réduction des capacités militaires et diplomatiques et par des renoncements. La France doit disposer de capacités d’information et d’action pour agir seule, sans dépendre d’un autre État ou d’une autre organisation, et des moyens diplomatiques et politiques pour expliquer et porter son action tout en sachant rallier d’autres États à sa cause si nécessaire. L’autonomie de la France s’appuie sur d’autres piliers : une économie robuste, une situation financière saine, une démographie dynamique et un potentiel technique et scientifique de très haut niveau. La France dispose encore d’atouts remarquables avec notamment sa dissuasion nucléaire et son siège de membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, son réseau diplomatique, l’étendue de son territoire national et de son espace maritime, la pratique du français dans le monde.
Même si son poids démographique est faible au regard de la croissance d’autres pays, la France reste une puissance économique de premier rang avec des capacités scientifiques encore mondialement reconnues. Elle est encore l’une des premières puissances militaires. Elle possède la capacité, rare au niveau mondial, de projeter des forces loin et rapidement. Elle peut facilement agir à proximité du territoire français ou de bases outre-mer. Mais, l’engagement lointain d’unités françaises dans la durée nécessite une coopération avec d’autres partenaires, à l’image de l’opération Barkhane. Au plus fort de l’opération, les armées françaises devaient transporter 18 000 tonnes de fret par mois. La France n’a pas les capacités pour agir entièrement seule. Elle doit compter sur des alliés. Selon le type d’engagement, elle devra renoncer ou accepter d’agir au sein d’une coalition. La question de la crédibilité de notre pays sur la scène internationale est donc posée.
Préserver nos capacités essentielles
La France peut jouer un rôle d’entraînement tout en conservant la capacité de défendre seule ses intérêts vitaux. La construction d’une autonomie stratégique ne doit pas se traduire par un moindre effort de défense. La France est l’un des seuls pays européens à maintenir un outil militaire et diplomatique de niveau mondial, et l’Union est utilisée comme un amplificateur, le « levier d’Archimède » du général de Gaulle, qui permet de protéger et de promouvoir nos intérêts nationaux. Cette conception s’inscrit dans le cadre d’une Europe puissance, capable de parler d’égal à égal avec les grandes puissances mondiales. Hier, avec les États-Unis et l’URSS, aujourd’hui et demain avec la Chine et les États-Unis. Notre pays doit continuer à disposer de forces armées pouvant intervenir sur tout l’éventail des engagements, en particulier dans des opérations de haute intensité avec la capacité d’entrer en premier, tout en consentant certaines interdépendances ou dépendances, clairement identifiées dans la Revue stratégique de 2017 (26).
L’autonomie nationale est fondée sur le maintien de capacités clés, au premier rang desquelles une dissuasion nucléaire reposant sur ses deux composantes océanique et aéroportée qui constitue l’assurance vie de la Nation en cas de menace des intérêts vitaux. La préservation de ce « socle de notre indépendance » (27) constitue l’un des grands défis des années à venir. La modernisation de la dissuasion exige un investissement conséquent, dans la durée. L’investissement sera supérieur à 3 Mds € en 2019, soit un peu moins de 10 % du budget de la Défense.
Outre la dissuasion, plusieurs domaines d’avenir, à très forte valeur ajoutée, doivent être maîtrisés, parfois par le biais de coopération restreinte avec d’autres pays européens. Il s’agit tout d’abord de l’Espace, où la France a su développer son autonomie après la guerre du Golfe, ce qui a permis de ne pas être pris au piège des affirmations américaines sur les armes de destruction massive détenues par Saddam Hussein en 2003. Cette capacité est essentielle dans le monde à venir. L’Espace est un multiplicateur de force et la France maîtrise l’ensemble des compétences et des technologies clés dans ce domaine. Pour rester souveraine quant à la protection de ses intérêts vitaux, la France doit parvenir à préserver son indépendance pour certaines capacités clés tout en développant des partenariats limités pour des capacités où des interdépendances sont tolérables. Ainsi, le programme national de satellites de communication Syracuse permet à la France d’être indépendante pour ses communications sécurisées. Cette indépendance est complétée par une sorte de réassurance en cas de panne d’un des deux satellites. En effet, un accord avec l’Italie prévoit l’utilisation d’un satellite italien SICRAL pour assurer la permanence des communications militaires françaises. Dans le domaine de l’imagerie spatiale, la France exploite des satellites Helios, avec l’Italie, l’Espagne, la Belgique et la Grèce, et CSO, avec l’Allemagne, pour l’observation optique. Ces différents accords complètent les capacités françaises mais surtout permettent de dégager les marges de manœuvre pour développer seuls des capacités critiques comme les satellites d’écoute électromagnétique Ceres. Aujourd’hui, une course est engagée avec d’autres puissances, comme la Chine, la Russie et les États-Unis pour continuer à pouvoir disposer librement de l’espace exo-atmosphérique et y protéger nos capacités. Nous devons valoriser et protéger nos satellites pour construire et préserver notre autonomie stratégique. Pour cela, nous devons les protéger, savoir exploiter les données donc conserver et développer une autonomie d’analyse et de traitement de l’information.
Autre domaine stratégique : le cyber, où les enjeux actuels se rapprochent, en partie, de ceux des années 1950 lorsqu’il s’est agi d’assurer l’indépendance de la France en construisant la dissuasion. Aujourd’hui, les menaces à caractère cyber sont telles qu’elles pourraient mettre en péril l’équilibre du dispositif de défense et de protection de notre pays, y compris la dissuasion, en portant directement atteinte à nos intérêts vitaux. Elles constituent une rupture à la fois technologique et numérique, la menace pèse sur les systèmes militaires et civils, et elle peut gravement porter atteinte à nos intérêts. Cette rupture se traduit concrètement par le fait que les critères de notre autonomie stratégique se sont complexifiés.
Plus globalement, la préservation d’une BITD au meilleur niveau est indispensable pour rester souverain et pouvoir agir selon ses intérêts, face à une surprise stratégique dans le cadre d’une remontée en puissance majeure. Les technologies clés : les algorithmes de cryptage pour assurer la confidentialité des échanges, l’authentification des correspondants et l’intégrité des informations transmises, les moyens de calculs (LMJ (28)) et l’Intelligence artificielle (IA) considérée comme la troisième rupture technologique pour la France après le nucléaire et le numérique (29). Pour cela, trois conditions doivent être remplies : la formation de scientifiques de haut niveau, le maintien de l’attractivité de la France, la mise en place et le maintien de structures industrielles dédiées. Parvenir à conserver et à développer le potentiel scientifique et technique français est un défi majeur. Actuellement, 35 000 ingénieurs sont formés tous les ans alors que le besoin est estimé à 50 000 (30). Sans inflexion durable, nous ne disposerons par de l’expertise scientifique pour conserver notre rang et notre influence.
Apporter des garanties de sécurité et de la crédibilité
Le projet porté par la France doit donc rassurer et entraîner nos alliés européens. Il doit être crédible et apporter des garanties de sécurité. La conservation d’un modèle d’armée complet, fondé sur d’importantes capacités de projection, qui participent directement ou indirectement à la sécurité du continent, représente un atout considérable dans le débat actuel, surtout lorsque ces capacités militaires sont adossées à une diplomatie active et influente, ce qui est encore le cas. Politiquement, la France peut continuer à affirmer son statut de pays moteur, même si l’UE tarde à exister effectivement sur le plan militaire. Les initiatives qu’elle porte depuis 2017 lui donnent un rôle de leader qui peut fédérer. Sa démarche est justifiée par l’évolution du contexte mondial et sa forme permet de préserver nos intérêts vitaux, domaine très particulier où l’efficacité n’est pas négociable et relève directement des intérêts nationaux. Comme « la France ne peut évidemment pas laisser son propre destin et même sa propre vie à la discrétion des autres » (31), l’ambition est alors double : renforcer l’autonomie stratégique européenne pour renforcer notre autonomie nationale afin de préserver la part essentielle de notre souveraineté, c’est-à-dire la défense de nos intérêts vitaux.
La France reste un pays clé pour la sécurité européenne mais sa situation économique actuelle lui offre peu de marges de manœuvre et décrédibilise en partie son discours volontariste. Si elle rétablit durablement sa situation économique, la France pourra compter sur son influence naturelle et sur son poids militaire et diplomatique pour peser sur la définition de la politique de sécurité et de défense commune. L’autonomie stratégique de notre pays passe par la préservation d’une forme d’indépendance et de compétences dans des domaines stratégiques. Cette autonomie profite à tous les Européens. Ainsi « la France ne conçoit pas sa stratégie de défense de manière isolée, même dans le domaine nucléaire (…) ; l’existence d’une dissuasion nucléaire française apporte une contribution forte et essentielle à l’Europe » (32). L’élargissement du parapluie que constitue la dissuasion française à l’ensemble des pays de l’Union reste une question pendante. En 1995, le concept de dissuasion concertée porté par Alain Juppé, alors Premier ministre, n’avait pas emporté l’adhésion de nos partenaires. Le changement radical de contexte stratégique et le projet d’autonomie stratégique européenne justifient la relance d’une concertation et d’une réflexion commune, tout d’abord entre la France et l’Allemagne, sur le rôle que pourrait jouer la dissuasion pour la sécurité du continent et dans la construction d’une Europe de la défense crédible et forte.
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L’avenir de l’Europe comme acteur stratégique se joue dans les prochaines années. Les pays européens doivent parvenir à définir une convergence d’intérêts durable, condition indépassable pour renforcer une coopération, fondée sur une véritable politique d’influence et une diplomatie efficace. Le principe de lucidité impose d’appréhender avec honnêteté et vigilance l’ensemble des défis auxquels l’Union fait actuellement face. Les obstacles sont nombreux, en particulier le positionnement de chacun des pays vis-à-vis des États-Unis. Il faut pouvoir s’appuyer sur deux piliers fondamentaux qui fonctionnent de concert : défense-sécurité et diplomatie.
Les progrès entre Européens conditionnent directement la capacité française à conserver son indépendance dans des domaines clés. Compte tenu des bouleversements stratégiques en cours, avec une Chine qui transforme tous les équilibres, sans renforcement de l’autonomie stratégique européenne, la France finira par perdre toute ou partie de son indépendance. L’Europe a sans doute besoin de la France mais la France, tout comme l’ensemble des pays du continent, s’effacera si l’Europe échoue à exister comme puissance. Devant l’urgence historique, l’Europe puissance, même à géométrie variable, est la seule réponse. Ce n’est pas de la Chine, de la Russie ou des États-Unis dont les Européens doivent avoir peur mais de leurs propres faiblesses et de l’absence de vision stratégique.
La France doit désormais faire partager sa vision et porter un projet global, fondé sur des garanties de sécurité solides, propres à rassembler les pays européens autour d’une vision commune.
Éléments de bibliographie
Allison Graham, Vers la guerre : l’Amérique et la Chine dans le piège de Thucydide ?, Odile Jacob, 2019, 416 pages.
Alomar Bruno, La réforme ou l’insignifiance : dix ans pour sauver l’Union européenne, Éditions de l’École de Guerre, 2018, 154 pages.
Livre blanc sur la Défense, La Documentation française, 1994, 164 pages (www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/944048700/index.shtml).
Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale, Odile Jacob-La Documentation française, 2008, 350 pages (http://archives.livreblancdefenseetsecurite.gouv.fr/2008/information/les_dossiers_actualites_19/livre_blanc_sur_defense_875/index.html).
Delpech Thérèse, L’ensauvagement, Le retour de la barbarie au XXIe siècle, Grasset, 2005, 366 pages.
Fukuyama Francis, La fin de l’histoire et le dernier homme, Flammarion, 1992, 418 pages.
Gergorin Jean-Louis et Isaac-Dognin Léo, Cyber, la guerre permanente, Les éditions du Cerf, 2018, 318 pages.
Pertusot Vivien, Notre intérêt national, quelle politique étrangère pour la France ?, Odile Jacob, 2017, 336 pages.
Midelaar (van) Luuk, Quand l’Europe improvise, dix ans de crise politique, Gallimard, 2018, 416 pages.
Revue stratégique de défense et de sécurité nationale, La Documentation française, 2017, 109 pages (www.defense.gouv.fr/dgris/presentation/evenements-archives/revue-strategique-de-defense-et-de-securite-nationale-2017).
(1) Alomar Bruno, La réforme ou l’insignifiance : dix ans pour sauver l’Union européenne, Éditions de l’École de Guerre, 2018, 154 pages.
(2) Général François Lecointre, « Allocution », Universités d’été de la défense, Satory, 10 septembre 2018 (https://ceis.eu/UED/Actes_UED_2018.pdf).
(3) Gergorin Jean-Louis et Isaac-Dognin Léo, Cyber, la guerre permanente, Les éditions du Cerf, 2018, 318 pages.
(4) Delpech Thérèse, L’ensauvagement, Le retour de la barbarie au XXIe siècle, Grasset, 2005, 366 pages.
(5) Fukuyama Francis, La fin de l’histoire et le dernier homme, Flammarion, 1992, 418 pages.
(6) Ibid., p. 75.
(7) Propos de Wolfgang Ishinger (directeur de la conférence sur la sécurité de Munich) dans son entretien avec André Luc, « Wolfgang Ishinger : “La politique étrangère de l’Union européenne doit se décider à la majorité” », L’Opinion, 12 novembre 2018 (www.lopinion.fr/).
(8) Ancien officier du renseignement militaire russe et agent double pour le MI6 (renseignement extérieur britannique), victime avec sa fille d’un empoisonnement au Royaume-Uni, le 4 mars 2018.
(9) Jamal Khashoggi, journaliste d’opposition saoudien, tué et démembré dans l’ambassade d’Arabie saoudite d’Istanbul, le 2 octobre 2018.
(10) Livre blanc sur la Défense et la Sécurité nationale, 2008, p. 39 (http://archives.livreblancdefenseetsecurite.gouv.fr/).
(11) Allison Graham, Vers la guerre : l’Amérique et la Chine dans le piège de Thucydide ?, Odile Jacob, 2019, 416 pages. L’historien américain appelle « piège de Thucydide » l’antagonisme qui oppose la puissance établie et la puissance ascendante et le risque de guerre qui en résulte. Sparte et Athènes s’affrontent au cours de la guerre du Péloponnèse (431-404 av. J.-C.), le Royaume-Uni et l’Allemagne en 1914. Les États-Unis et la Chine pourraient bientôt se trouver dans une situation comparable.
(12) Mathieu Béatrice et Rosencher Anne, « Hubert Védrine : “La faute des élites européistes” », L’Expansion, 1er juin 2018 (https://lexpansion.lexpress.fr/actualite-economique/la-faute-des-elites-europeistes_2013590.html).
(13) Hawksworth John, Audino Hannah et McKellar Duncan, The World in 2050—The long view: how will the global economic order change by 2050?, PWC, février 2017 (www.pwc.com/).
(14) Baverez Nicolas, « Pas de croissance sans souveraineté », Le Figaro, 11 mars 2019.
(15) Cabirol Michel, « Réglementation ITAR : États-Unis, cet ami qui ne veut pas que du bien à la France », La Tribune, 23 avril 2018 (www.latribune.fr/).
(16) Guillemard Véronique, « Loesekrug-Pietri André : “Nous risquons la vassalisation technologique de l’Europe” », Le Figaro, 21 mars 2019.
(17) Interview d’Emmanuel Macron par Nikos Aliagas, Europe 1, 6 novembre 2018 (www.europe1.fr/politique/macron-pour-une-vraie-armee-europeenne-un-projet-realisable-3794831).
(18) Midelaar (van) Luuk, Quand l’Europe improvise : dix ans de crise politique, Gallimard, 2018, 416 pages.
(19) Baverez Nicolas, « Reconstruire la sécurité de l’Europe », Le Figaro, 25 février 2019.
(20) Livre blanc sur la Défense, La Documentation française, 1994, p. 49
(www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports-publics/944048700/index.shtml).
(21) Ibid., p. 52.
(22) Livre blanc 2008, op. cit., p. 69.
(23) Macron Emmanuel, « Initiative pour l’Europe - Discours pour une Europe souveraine, unie, démocratique », La Sorbonne, 27 septembre 2017 (www.elysee.fr/).
(24) Traité de coopération franco-allemand d’Aix-la-Chapelle, France diplomatie (www.diplomatie.gouv.fr/).
(25) DGRIS, « L’initiative européenne d’intervention », 26 février 2019 (www.defense.gouv.fr/).
(26) Revue stratégique de défense et de sécurité nationale, La Documentation française, 2017, p. 69 (www.defense.gouv.fr/).
(27) Hollande François, « Vœux aux armées du président de la République », Paris, 6 janvier 2017 (http://discours.vie-publique.fr/notices/177000053.html).
(28) Laser Mégajoule : il « sert à étudier, à toute petite échelle, le comportement des matériaux dans des conditions extrêmes similaires à celles atteintes lors du fonctionnement nucléaire des armes » (www-lmj.cea.fr/).
(29) Discours de Jean-Yves Le Drian, colloque à l’Assemblée nationale, 16 février 2017.
(30) Tricornot (de) Adrien, « Les écoles d’ingénieurs alertent sur le manque de diplômés », Le Monde Campus, 26 février 2017 (www.lemonde.fr/).
(31) Conférence de presse du général de Gaulle sur la réforme de l’Otan, Palais de l’Élysée, 5 septembre 1960 (https://fresques.ina.fr/de-gaulle/fiche-media/Gaulle00061/conference-de-presse-du-5-septembre-1960.html).
(32) Hollande François, « Discours du président de la République sur la dissuasion nucléaire », Istres, 19 février 2015 (http://discours.vie-publique.fr/notices/157000492.html).