Les forces armées dans la Nation
Pendant les dix années qui ont suivi la fin de la dernière guerre, les Français se sont peu préoccupés de leurs Forces Armées. Ils les connaissaient d’ailleurs fort mal. La plus grande partie se trouvait hors du territoire national : en Indochine d’abord, où les Officiers et militaires de carrière menaient de durs combats auxquels le contingent ne participait pas, en Afrique du Nord et dans les territoires d’Outre-Mer, en Allemagne enfin, où des unités bien équipées et dotées d’un armement américain coopéraient à la défense immédiate du Monde occidental. Si bien qu’en Métropole ne subsistaient que des Écoles, des Services et quelques Corps de troupe aux effectifs et aux moyens réduits.
L’opinion publique se faisait généralement des cadres de ces Forces une conception déjà ancienne et assez sommaire : celle d’hommes attachés à des valeurs morales fort estimables mais quelque peu désuètes, ayant des connaissances intellectuelles et des préoccupations générales assez limitées. Il était établi depuis longtemps que l’Armée était en toutes circonstances à la disposition entière du Gouvernement et qu’elle ne devait intervenir en aucune façon dans la vie politique. Ses membres n’étaient pas autorisés à exprimer librement leur opinion sur les affaires publiques : c’était « la Grande Muette ».
En schématisant, on peut dire que les Forces Armées n’étaient pas pour l’opinion un grave sujet de préoccupations, sauf peut-être pour le poids dont elles pesaient sur le budget. Cette optique changea lorsque, la guerre d’Indochine étant terminée, l’effort principal porta sur l’Afrique du Nord. Si le Maroc et la Tunisie obtenaient leur indépendance, provoquant le repli de la quasi-totalité des troupes qui y étaient stationnées, par contre l’Algérie exigeait un effort considérable où la plus grande partie de nos forces vives (1) devait être engagée. Et, cette fois, le contingent tout entier participa à la lutte, des disponibles même furent rappelés.
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