Les relations de l’Otan avec la Russie restent marquées par une méfiance réciproque malgré le redémarrage voulu par le Président américain, il y a deux ans. C’est à des représentations du monde bien différentes que sont abonnés Washington, Bruxelles et Moscou, et la DAMB en a été l’un des révélateurs. Dans le même temps, la relation technique fonctionne plutôt bien et les domaines de coopération recouvrent des intérêts communs bien identifiés, comme en Afghanistan.
Otan-Russie : une relation à double détente
NATO-Russia: a two-speed relationship
Relationships between NATO and Russia remain tainted by mutual mistrust despite efforts two years ago by the US President to renew them. Recent issues surrounding ABM defence have revealed the degree to which Washington, Brussels and Moscow see the world differently. At the same time, however, the technical relationship is working pretty well, and areas of cooperation include well-identified common interests, such as Afghanistan.
Ennemis potentiels quatre décennies durant, la Russie et l’Otan entretiennent encore, vingt ans après la disparition de l’URSS, une méfiance réciproque et des relations pour le moins ambiguës. Cette situation a encore été confirmée dans les derniers documents doctrinaux publiés en 2010 ou lors du Sommet de Chicago qui a été marqué par l’absence d’autorité politique russe au plus haut niveau tout comme par le report de la réunion, initialement programmée, du Conseil Otan-Russie (COR). Et ce, malgré le « redémarrage » (reset) proposé par Barack Obama en 2009 ou les appels d’Anders Fogh Rasmussen lors de sa prise de fonction comme Secrétaire général de l’Organisation quelques mois plus tard. Pourtant, nombre de dossiers « chauds » concernent directement tant la sécurité de la Russie et des espaces eurasiatiques que celle de l’Alliance et des espaces euro-atlantiques. Or, cette méfiance, souvent instrumentalisée et amplifiée dans des discours à usage interne – a fortiori en période électorale – ne favorise pas l’élaboration de réponses cohérentes aux nombreux défis auxquels est confronté le continent européen dans son intégralité, de Brest à Vladivostok. Des représentations différentes, voire concurrentes, de cet espace ne suffisent pas à expliquer les difficultés à trouver un langage commun. Des enjeux de puissance instrumentalisés interfèrent dans les relations entre une organisation et un État en quête d’identité nouvelle, sans même parler des relations particulières avec les États-Unis qui accroissent parfois la confusion des genres.
Regards croisés sur l’Autre
Les documents doctrinaux présentés par la Russie et par l’Otan en 2010, tout autant que les commentaires qu’ils ont suscités, constituent un bon baromètre des relations complexes entre Moscou et Bruxelles. Premier en date de ces documents, la doctrine militaire de la Fédération de Russie de février 2010 a souvent fait l’objet d’une lecture partielle, voire partiale, dans les médias occidentaux notamment en ce qui concerne l’interprétation de la place qui y est attribuée à l’Otan (1). Certes, les Russes ont sans doute également joué sur l’ambivalence de la distinction entre, d’une part, risque et menace et, d’autre part, l’Organisation en soi et son action politique. Pour les Russes – et cette distinction n’a guère été prise en compte dans la plupart des analyses effectuées par les pays de l’Otan – ce n’est pas l’Otan en soi, mais sa politique d’élargissement aux frontières de la Russie qui constitue non pas une menace, mais un risque. Parmi les autres risques énoncés figurent la globalisation de l’Alliance et le déploiement d’un système de défense antimissile balistique (Damb), perçus comme autant d’outils visant à l’encercler, sachant que le complexe d’encerclement est obsidional à Moscou.
Il reste 84 % de l'article à lire