Actualité économique - La « conversion » de la Grande-Bretagne à la Communauté économique européenne (CEE)
« Nous devons toujours nous rappeler que nous sommes voisins, mais non partie du Continent. » Cette formule de Bolingbroke, par laquelle André Maurois ouvre son excellente Histoire d’Angleterre, ne peut manquer d’être évoquée à l’heure où s’engagent, d’une part des pourparlers franco-britanniques relatifs aux projets de tunnel ou de pont à travers la Manche, d’autre part les négociations en vue de l’adhésion du Royaume-Uni à la Communauté Économique Européenne. Sans doute, comme l’a souligné l’auteur de la Vie de Disraëli, cette formule définit-elle parfaitement la politique originale de la Grande-Bretagne dans les siècles passés et jusqu’à une date très récente. Mais sera-t-elle encore justifiée dans l’avenir ? L’Angleterre va-t-elle cesser d’être une île ? Géographiquement une telle éventualité n’est plus inconcevable : la relance de l’idée de l’édification d’une voie « fixe » de communication entre la Grande-Bretagne et le Continent, semble avoir été accueillie avec une certaine faveur de part et d’autre du « channel ». Mais la construction d’un pont ou d’un tunnel a surtout valeur de symbole. C’est sur un tout autre plan que se profile l’espoir de l’établissement d’une liaison intime et permanente substituant à des rapports de voisinage, ceux d’une appartenance commune à un même ensemble économique et politique : En demandant, au début du mois d’août, l’ouverture des négociations avec les Six, le Gouvernement de Sa Majesté n’a-t-il pas manifesté — malgré quelques réserves — son désir de renverser son attitude à leur égard et de partager désormais leur destin ?
Lourde de conséquences sur l’évolution de la Communauté que nous avons esquissée dans notre dernière chronique, l’initiative du cabinet Macmillan exprime aussi une « conversion » dont il convient maintenant de prendre pleinement conscience.
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