Le Commonwealth : une communauté de destin
Lorsqu’au printemps dernier l’Afrique du Sud décida de se retirer du Commonwealth, les commentateurs diplomatiques s’efforcèrent surtout de déceler les conséquences prévisibles, ou vraisemblables, de ce retrait. Pour les uns, il annonçait la désagrégation prochaine de cette association ; pour les autres, au contraire, le coup de théâtre de Lancaster House réservait l’avenir en renforçant la coalition d’un groupement multiracial dont l’influence dans les affaires mondiales reste importante dans la mesure où il jette un pont entre l’Occident blanc et les pays « non-engagés ». Mais la formule même, Commonwealth, demeura entourée d’autant d’obscurités. Certes, M. Diefenbaker, Premier ministre canadien, précisa : « Nous avons déclaré que la non-discrimination raciale est la pierre angulaire d’une association multiraciale comprenant des membres dans toutes les parties du monde » — mais s’il apportait un élément de définition, il laissait dans l’ombre une grande partie des facteurs qui, pour extérieurs qu’ils soient aux tensions raciales actuelles, ne s’en avèrent pas moins fondamentaux. M. Duncan Sandys, qui, au sein du cabinet britannique, est chargé des relations avec le Commonwealth, déclara de son côté : « La raison d’être du Commonwealth n’est pas de constituer un bloc, mais un trait d’union, non un front, mais un instrument d’unification dans le monde » — opinion que confirmait l’Economist en comparant le Commonwealth à un trousseau de clés ouvrant plusieurs portes : ses membres africains et asiatiques lui assurent un contact utile avec le monde « non-engagé » de Bandoeng, le Canada le relie aux États-Unis, et bon gré mal gré le Royaume-Uni assure la liaison avec l’Europe. Mais si M. Duncan Sandys donnait une indication quant à une orientation politique, il laissait dans l’ombre les éléments grâce auxquels on pourrait répondre à la question : « Qu’est-ce que le Commonwealth ? ». Et l’on ne pouvait pas alors ne pas songer à la définition donnée par M. Churchill : « Une énigme enveloppée de mystères ».
Il n’y a pas là un simple problème grammatical, car avant de parler du Commonwealth, il conviendrait de mieux savoir de quoi il s’agit. D’autant que le Commonwealth est au cœur de deux séries de préoccupations actuelles :
— Pour certains, Français et Africains, le but à atteindre pour l’aménagement des rapports entre la France et les États indépendants de l’ex-Afrique Noire française serait la mise sur pied d’un « Commonwealth français » ;
— M. Harold Macmillan n’a pas caché que l’attitude de la Grande-Bretagne à l’égard des projets tendant à son entrée dans le Marché Commun dépendrait, dans une très large mesure, des réactions des pays membres du Commonwealth.
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