Napoléon et « l’arrière »
Dans L’Art de la Guerre, Machiavel nous apprend qu’il ne suffit pas de vaincre, il faut aussi exploiter sa victoire. « César ne prenait pas un instant de repos et poursuivait son ennemi avec plus de fureur et d’impétuosité qu’il ne l’avait attaqué au moment du combat. » (1)
Que le Florentin ait figuré parmi les auteurs de prédilection de Bonaparte dans sa jeunesse ne saurait nous surprendre. Dès la Première Restauration, les pamphlets royalistes ne manquèrent pas de dresser un parallèle entre l’auteur du Prince et l’empereur déchu. Bonaparte a probablement étudié Machiavel dans la belle édition Vollard, après avoir lu en 1791 l’Histoire de Florence dans la traduction de Barrett (2) ; mais Frédéric II et Guibert furent davantage ses maîtres dans le domaine de la stratégie et de la tactique, comme l’a montré tout récemment encore Jean Mistler dans le bel ouvrage collectif Napoléon et l’Empire publié pour le deuxième centenaire de la naissance de l’Empereur. Aux grands généraux qui l’avaient précédé, Napoléon a donc beaucoup emprunté, mais comment n’aurait-il pas médité sur la remarque de Machiavel : « un lieutenant général, s’il veut acquérir grande réputation, doit inventer quelque chose de son esprit outre celles que nous avons des anciens et des autres. » Et il est permis de se demander si ce que Napoléon a apporté, n’est pas le souci de « l’arrière », l’importance attachée plus encore que chez César, à la propagande, à l’exploitation psychologique de la victoire.
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