Outre-mer - Le Sahara occidental et le jeu maghrébin - La conférence sur la coopération économique internationale : l'apprentissage du dialogue
Le 1er mai 1977, un commando du Front POLISARIO à Zouérate, la cité minière de la Mauritanie, fit trois victimes françaises et prit en otages six de nos compatriotes, parmi lesquels une femme ; son action provoqua l’exode d’une grande partie des techniciens de la Cominor. Cette société nationale, dont les recettes représentent 15 % des entrées budgétaires de la Mauritanie, se voit contrainte de ralentir ses activités à une époque où le pays ne survit que grâce aux dons accordés par les pays arabes du golfe et à l’aide militaire du Maroc.
On avait cru, au lendemain de l’attaque sur Nouakchott de juin 1976, qui causa la mort du secrétaire général du POLISARIO, que ce mouvement avait renoncé à des raids lointains sur la Mauritanie et qu’il concentrait ses efforts sur le secteur du Sahara occupé par les Marocains, c’est-à-dire la mine de phosphate de Bou Craa et ses débouchés vers la mer, secteur plus facile à atteindre depuis les sanctuaires que les Sahraouis occupent en Algérie. En réalité, il ne s’agissait pas d’une volonté délibérée d’épargner les Mauritaniens mais d’une réorganisation des guérilleros. Désormais, ceux-ci sont regroupés en trois zones opérationnelles dont les bases arrières se situent en territoire algérien mais dont les PC se trouvent en permanence sur leur terrain d’activité ; la zone nord comprend la partie du territoire marocain placée entre l’oued Draa et l’ancienne frontière du Sahara espagnol : les zones centre et sud correspondent aux régions dévolues respectivement au Maroc et à la Mauritanie par la partition, mais la dernière déborde sur le territoire mauritanien ; elle englobe par conséquent la région de Zouérate et celle où circule la voie ferrée qui, suivant le tracé de la frontière coloniale, relie ce centre minier à Nouadhibou (Port Étienne). On sait en effet que lors de la mise en exploitation du bassin de Zouérate par la France en 1963, plusieurs solutions avaient été envisagées pour l’évacuation du minerai de fer à travers le territoire espagnol ; elles n’avaient pas été retenues et l’on s’était résolu à adopter un tracé situé entièrement en territoire mauritanien, donc beaucoup plus long (657 km), pour éviter d’avoir à doter l’entreprise d’une couverture financière trop complexe. Dès janvier 1977, le POLISARIO se manifesta sur toute la surface de la zone sud, coupant la voie ferrée, tendant les embuscades aux forces mauritaniennes, cherchant à contrôler les populations nomades. Cette reprise d’activité n’ayant pas fait l’objet d’une grande publicité, elle devait aboutir à une action plus spectaculaire, celle du raid de Zouérate qui non seulement tendait à perturber gravement l’économie mauritanienne mais aussi comportait une prise d’otages européens que la presse ne pouvait passer sous silence.
En effet, l’objectif prioritaire du Front POLISARIO est de montrer aux instances africaines et internationales que la population sahraouie n’a pas renoncé à faire valoir ses droits à l’autodétermination, droits que l’Assemblée des Nations unies d’ailleurs n’a jamais contestés ouvertement. Ses dirigeants estiment que leurs revendications sont conformes aux usages qui ont présidé jusqu’ici aux décolonisations, alors qu’une partition d’un territoire colonial par un accord particulier entre le colonisateur et deux États indépendants, sans consultation des populations, n’a pas de précédent dans l’histoire des Nations unies. Le Maroc et la Mauritanie ont toujours soutenu, en dehors de la légitimité de leurs droits historiques ou religieux, que la consultation de populations nomades était très difficile à organiser et qu’en tout état de cause, elle ne pourrait pas être probante en raison de la perméabilité des frontières : on ne pourrait s’en tenir, pour fixer le nombre des électeurs, au recensement espagnol auquel les familles réfugiées dans les territoires voisins n’avaient pas participé ; les résultats d’un référendum seraient donc toujours contestés par l’une ou l’autre des parties. La solution que les Algériens avaient initialement proposée permettait de pallier cette difficulté : l’avenir du Sahara occidental aurait dû être l’objet d’un accord entre les trois pays limitrophes, dans le cadre d’une « entente maghrébine », afin que les ressources de ce pays fussent consacrées en priorité au développement régional ; l’indépendance aurait été ainsi garantie par les trois pays voisins qui auraient aidé conjointement le nouvel État à s’organiser, à s’administrer et à exploiter ses ressources.
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