Revue des revues
• Études, août-septembre 1981 : « La crise des rationalisations », par Jean Moussé SJ (pour Societas Jesu, jésuite). Dans cet article, le père Moussé commente les thèmes de Jürgen Habermas qui prolongent les travaux de Max Weber et des philosophes de l’École de Francfort. Celles-ci montrent que la société traditionnelle, dite « interactionnelle » par Habermas, a favorisé le développement des sciences et des techniques qui ont progressivement mis en place ce que Weber appelle une « rationalisation par les fins », les hommes assignant des objectifs à leurs actes et organisant leurs activités en conséquence. Il en est résulté la société industrielle moderne. La critique même de Karl Marx ne renonce pas à une rationalité scientifique et technique mais, au contraire, la développe et aboutit à la planification socialiste.
Ce mouvement est à son apogée. L’économie domine la société. Les idéologies et les religions traditionnelles sont minées. « En fait, chacun se trouve soumis à un code vide de reconnaissance humaine dans la mesure où il est ordonné à la connaissance et à la possession des choses ». La révolution idéologique bourgeoise comme la révolution industrielle moderne, à l’Est comme à l’Ouest, cachent des rapports de domination.
La méprise porte sur le concept de rationalité. Celle-ci s’applique en effet à la conduite de l’action et à la mise en œuvre des techniques beaucoup plus qu’à la fixation des buts poursuivis. La rationalité invoquée est le plus souvent la justification de choix opérés sur des critères qui débordent largement toute rationalité. « Si les acteurs de la vie économique demeurent inconscients des relations politiques et sociales pénétrées de violence qui conditionnent leurs décisions, ils provoquent l’accroissement de cette violence… Au nom de ce que l’on estime raisonnable, on provoque la déraison ».
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