Afrique - Sahara occidental : affaire réglée sans vainqueurs ni vaincus ? - L'Afrique australe à l'heure vaticane
Sahara occidental : affaire réglée sans vainqueurs ni vaincus ?
Les relations diplomatiques de l’Algérie et du Maroc ont été reprises officiellement en mai. Cette normalisation ne semble pas avoir été provoquée seulement par le désir du roi Hassan II de participer au sommet arabe qui se tenait à Alger début juin 1988. Elle repose sur des impératifs politiques, économiques et sociaux qui imposent des objectifs que l’évolution intérieure de chacun des partenaires et une amorce de détente internationale permettent d’espérer pouvoir atteindre aujourd’hui. Les dangers de l’intégrisme musulman, la perspective d’une intégration plus poussée des États de l’Europe occidentale, les problèmes que pose une trop forte natalité rendent nécessaire une harmonisation des politiques des pays maghrébins, au moins des quatre pays de formation française sinon d’expression francophone, la Libye s’y ajoutant parce qu’elle ne peut ou elle ne veut pas suivre la même voie que l’Égypte son voisin oriental. Une concertation et un rapprochement supposent que les conflits qui ont divisé jusqu’ici ces États trouvent des solutions à l’amiable. La Tunisie n’a plus de contentieux avec l’Algérie et s’est rapprochée de la Libye grâce à l’entremise algérienne. La Mauritanie entretient de bons rapports avec tous quoiqu’elle ait tendance à rechercher tour à tour l’appui du Maroc ou de l’Algérie, ces deux États ayant toujours sollicité son alliance dans le conflit qui les oppose. Pour qu’une entente maghrébine devienne une hypothèse réalisable, il ne reste plus aujourd’hui qu’à trouver une solution au problème du Sahara. L’affaire n’est pas facile à mener étant donné l’intensité des passions que la crise a soulevées tant au Maroc qu’en Algérie et la clarté des engagements pris par chacun des régimes concernés à l’égard de sa population et des gouvernements qui ont bien voulu les suivre. Pour arriver à une paix définitive, il faudrait qu’il n’y eût ni vainqueurs ni vaincus, sinon la solution trouvée pourrait provoquer, dans la zone pacifiée, l’instabilité des pouvoirs en place, situation dont profiteraient sans doute les forces intégristes qu’une concertation maghrébine aurait eu en partie pour mission de contenir.
Le problème posé par la décolonisation du Sahara occidental a intéressé au premier chef le Maroc et l’Algérie, ainsi que les populations sahraouies que le Polisario prétendait représenter en formant le gouvernement de la « République arabe saharouie démocratique » (RASD), reconnu par 72 États et admis solennellement parmi les membres de l’Organisation de l’unité africaine (OUA). La solution du problème intéresse donc aussi ces 72 États. Ceux-ci, au nom des principes qui ont présidé aux diverses décolonisations survenues depuis la Deuxième Guerre mondiale et qui ont fait jurisprudence, n’ont pas accepté l’accord hispano-maroco-mauritanien grâce auquel l’ancienne possession espagnole a été partagée, dans un premier temps entre le Maroc et la Mauritanie, puis, après le renoncement de Nouakchott, a pu devenir province marocaine. Alger ne reconnut pas la validité de cet accord en ayant constaté qu’une partie de la population ne l’acceptait pas ; sa position était alors simple : la puissance coloniale aurait dû proclamer l’indépendance du territoire dont elle était responsable et c’était à la population de celui-ci à décider de son sort par voie de référendum. Donc, pour Alger, le vote était nécessaire et le contrôle de l’ONU devait apporter la garantie de l’impartialité du scrutin. Pour sa part. Rabat estimait que l’histoire plaidait en sa faveur et qu’une consultation électorale ne pouvait être menée à bien par des populations nomades sur un territoire où le découpage frontalier, tracé par des accords internationaux, n’avait pas tenu compte des migrations des tribus. D’un côté, on exigeait l’application d’une règle en s’en tenant au respect des principes ; de l’autre, on jugeait impossible d’appliquer cette règle sur le terrain et l’on proposait la solution qui, dans la pratique, s’avérait la plus commode et la moins dangereuse. Cependant Alger laissait entendre qu’un accord entre tous les États voisins, obtenu dans le cadre d’une entente maghrébine, même si la population sahraouie n’était pas consultée, pourrait donner au Sahara un statut qui garantirait son autonomie.
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