Institutions internationales - L'ONU, l'Europe et les Églises face à la guerre du Golfe
La fin des idéologies ouvrait la voie à un retour de la politique ; c’est au retour de la guerre que nous assistons. Les juristes ne manqueront certainement pas d’étudier la manière dont a fonctionné le Conseil de sécurité de l’ONU en la circonstance. La Charte impose aux pays d’avoir recours, en cas de crise, aux modes de règlement pacifique (art. 2, § 3), or l’offensive a été déclenchée sans que le Conseil de sécurité ait eu le temps d’amender le plan de compromis élaboré par Moscou. Ne voulait-on pas accorder à M. Gorbatchev un succès diplomatique ou bien avait-on la certitude que Bagdad ne cherchait qu’à laisser courir les délais au-delà desquels l’intervention militaire devenait plus périlleuse pour les membres de la coalition ?
La sécurité collective dont l’ONU se prévaut d’avoir la charge est donc une nouvelle fois l’occasion d’une guerre sans concessions : sa raison d’être n’en devient-elle pas fort problématique ? Depuis le vote de la résolution 678, le 29 novembre 1990, l’ONU est restée aphone. Des réunions du Conseil de sécurité ont eu lieu, à huis clos, sans que rien n’en résulte. Mieux encore, M. Perez de Cúellar, le secrétaire général de l’Organisation, ne se fit pas faute de préciser, dans une interview au Monde, le 9 février 1991, que « les hostilités ont été autorisées par le Conseil de sécurité. Ce n’est pas une guerre des Nations unies, il n’y a pas de Casques bleus ni le drapeau de l’ONU… Cela dit, c’est une guerre légale ». Autrement dit, à Manhattan, plutôt que de s’affairer à la prévention des conflits, on se contente de les légitimer ! A-t-on vraiment besoin d’un appareil international aussi pesant pour ce faire ?
Si, comme l’avoue M. Perez de Cúellar, ce n’est pas une guerre de l’ONU contre un perturbateur, le Conseil de sécurité a simplement apporté sa caution à la diplomatie de Washington. Il n’y a, certes, rien à redire puisque ses membres y ont consenti en toute connaissance de cause. Mais cela soulève un autre problème. Ainsi, comme l’avançait M. Alain Peyrefitte dans Le Figaro du 13 août 1990, « peut-être le Conseil de sécurité va-t-il enfin devenir ce pour quoi il a été créé : un embryon de gouvernement mondial » ; si ce fait est avéré, nous avons lieu de nous interroger sur la nature de ce condominium planétaire.
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