Gendarmerie - Évolutions récentes de la Gendarmerie mobile
Depuis sa création par la loi du 22 juillet 1921 sous la forme de « pelotons mobiles de gendarmerie » regroupés en 1926 au sein de la garde républicaine mobile, la gendarmerie mobile a connu un mouvement ininterrompu de spécialisation et de professionnalisation. Avec la mise en œuvre du plan « Armées 2000 » (décrets du 14 juillet 1991), cette subdivision de la gendarmerie a amorcé une profonde réorganisation qui, s’inscrivant dans le sens d’un renforcement de son autonomie, s’est traduite par la création de 9 légions de gendarmerie mobile (8 nouvellement créées dans les circonscriptions de gendarmerie et la légion de gendarmerie mobile d’Île-de-France) réunissant les 26 groupements (chaque groupement de gendarmerie mobile étant désormais constitué de quatre à six escadrons), ce qui représente, à l’heure actuelle, environ 17 000 officiers et sous-officiers répartis dans 128 escadrons.
À l’instar de la brigade territoriale pour la gendarmerie départementale, l’escadron est l’échelon de base, la cheville ouvrière de la gendarmerie mobile. Chacun se compose, en moyenne, de 130 personnels placés sous les ordres d’un officier (capitaine) et répartis en pelotons. Compte tenu de la nécessité d’évoluer, le cas échéant, dans un environnement hostile et éloigné de ses cantonnements, il comprend un peloton hors rang (PHR) destiné à apporter un soutien logistique aux trois autres pelotons spécialement chargés, quant à eux, des tâches de maintien et de rétablissement de l’ordre. Le PHR est composé d’un groupe de commandement (commandant d’escadron, chauffeur et opérateurs radio) et d’un groupe de service (secrétaires, infirmiers, spécialistes en armement, mécaniciens automobiles et dépanneurs, spécialiste casernement et moniteur EPS). Chaque escadron dispose, enfin, depuis le début des années 80, d’une équipe légère d’intervention (ELI) composée d’une dizaine de gendarmes spécialement entraînés pour exécuter les interventions délicates, comme l’arrestation des meneurs dans un attroupement, la neutralisation de manifestants installés dans des lieux difficiles d’accès, le dégagement de personnes menacées ou retenues par les manifestants. Les ELI peuvent également être engagées au profit des autres unités de gendarmerie lors d’opérations ponctuelles ne nécessitant pas de faire appel au GIGN, qu’il s’agisse d’arrestations de malfaiteurs, de surveillances et de transfèrements de détenus. Depuis le 1er janvier 1997, les ELI ont été transformées en pelotons légers d’intervention (PLI), avec une augmentation importante de leur effectif (1 officier et 24 sous-officiers), cette évolution étant justifiée par la nécessité de répondre aux nouvelles menaces révélées par les troubles graves à l’ordre public intervenus ces dernières années (manifestations violentes, groupes de casseurs, « hooliganisme », violences urbaines, insécurité dans les grands ensembles…).
Tout comme dans les domaines de la formation, des doctrines et des techniques d’emploi, les expériences acquises ont donné lieu, pour ce qui est des équipements, à la détermination de moyens perfectionnés destinés à permettre une conduite pacifiée des antagonismes sociaux et manifestations de rue, susceptible de concilier, dans le cadre républicain de l’État de droit, les impératifs de l’ordre public avec la libre expression collective des opinions et mécontentements. Ce mouvement contemporain de professionnalisation des forces de maintien de l’ordre transparaît manifestement dans l’équipement individuel du gendarme mobile. En effet si, pendant les événements de mai 1968, ce dernier ne disposait pas d’équipements particuliers (il opérait en vareuse, chemise blanche et cravate, avec parfois, pour protéger son visage, un grillage ajouté à la hâte sur le casque militaire bleu frappé sur le devant de la grenade), des évolutions importantes sont intervenues depuis, de telle sorte qu’extérieurement le « moblot » d’aujourd’hui présente, pour certains, de troublantes similitudes… avec le personnage de « Robocop » : blouson sans col ignifugé sans point d’ancrage et avec renforts aux articulations, pantalon type fuseau, gilet de protection sous le blouson, casque avec visière et languette arrière, masque à gaz, jambières de protection, bouclier ovoïde (protection jusqu’au genou), bâton… Dans les années à venir, cette panoplie, qui est destinée à concilier la protection corporelle et la mobilité, devrait être complétée par de nouveaux équipements : une tenue à la fois ignifugée, imperméable, légère et plus près du corps, des chaussures plus souples et dotées de protections de la semelle et du bout de pied, un gilet pare-coups porté sur la tenue (permettant de protéger les parties sensibles du corps, notamment contre les coups de couteau et de poinçon), des protections d’avant-bras contre les coups de barre de fer et les objets tranchants, un bâton en matériau composite…
Pour ce qui est des moyens matériels, la gendarmerie a engagé récemment une réflexion portant sur la définition et la mise en place d’un engin blindé unique (EBU), destiné à remplacer, dans les prochaines années, les automitrailleuses légères (AML) et les véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG). Pour l’accomplissement de ses missions, celle-ci s’est vue en effet attribuer, à côté des équipements spécifiques au maintien de l’ordre également en dotation pour l’essentiel dans les CRS, tout un arsenal de moyens militaires. Si la possession d’équipements et d’armements militaires est manifestement justifiée par le rôle de la gendarmerie dans la défense nationale (défense opérationnelle du territoire), ces moyens peuvent malgré tout être utilisés, dans des circonstances exceptionnelles, lors des opérations de rétablissement de l’ordre, de manière dissuasive ou bien alors en raison de leur capacité de déplacement, voire de leur puissance de feu.
La gendarmerie comprend, en outre, avec le groupement blindé de la gendarmerie mobile (GBGM) de Satory, une véritable formation combattante, composée uniquement de personnels d’active, soit plus d’un millier d’officiers et de sous-officiers regroupés en neuf escadrons. Tout en participant en temps normal aux missions exercées par la gendarmerie mobile, cette formation est chargée, en cas de crise grave, de garantir la liberté d’action et la sécurité des organes gouvernementaux, grâce notamment à ses 120 véhicules blindés (sur les quelque 340 que compte la gendarmerie), parmi lesquels des véhicules blindés canon (VBC canon 90), des véhicules de transport de troupe (VTT AMX 13), des véhicules blindés à roues de la gendarmerie (VBRG) et des automitrailleuses légères (AML 60 et 90).
Au-delà de cette nécessaire adaptation des équipements, et pour se livrer à une étude prospective, il est possible de recenser deux principaux domaines susceptibles de conduire, dans les mois à venir, à d’autres évolutions importantes pour la gendarmerie mobile : d’une part l’accroissement prévisible de son utilisation dans des missions de sécurisation, notamment en renfort des forces de police et de gendarmerie départementale engagées dans la lutte ô combien difficile ! contre la délinquance et l’insécurité dans certains quartiers ; d’autre part, suite à la professionnalisation des armées et à la profonde réforme du service national, l’intégration éventuelle d’engagés volontaires dans les escadrons de gendarmerie mobile, selon des modalités et dans des emplois qui restent en toute hypothèse à déterminer. ♦