Verbatim II (1986-1988)
Concernant cette chronique polémique portant sur les années de la première cohabitation, il ne sera évidemment fait allusion ici qu’à ce qui touche aux relations internationales. Celles-ci ne couvrent qu’une mince partie d’un livre fait de notes prises au jour le jour, dans l’ambiance du moment et dont on se plaît à croire qu’elles n’ont pas été remaniées pour les mettre à de changeants goûts du jour.
Il s’agit d’un autre monde que celui d’aujourd’hui, et maints dossiers d’alors paraissent bien poussiéreux. On retire de la lecture des pages consacrées aux rapports Est-Ouest une grande leçon de modestie, à voir la somme d’efforts consacrés à des questions, notamment dans le domaine du désarmement, maintenant dépassées sans que, apparemment, personne n’ait été assez avisé pour prévoir qu’elles ne tarderaient pas à l’être.
Avec le recul, on s’aperçoit que la période en question, fertile en activités diplomatiques, correspond à la fin d’une époque. Encore quelques mois, et l’on assistera au début des bouleversements qui, en Europe, marqueront l’ère nouvelle dans laquelle nous nous trouvons.
En ce temps-là, les priorités comprenaient les modalités d’un désarmement lent à prendre forme sur notre continent, les discussions entre Européens pour concevoir une union dont les traits n’apparaissaient pas encore, les affaires du Tchad, la récupération des otages du Liban, le contentieux avec l’Iran. Ce contentieux, en partie greffé sur le dossier des otages, ne cessait de prendre de l’ampleur jusqu’à peser lourd sur la campagne présidentielle.
On comprend que l’auteur, tenu par la réserve, ne laisse pas toujours visible le fil d’Ariane qui permettrait de mieux repérer le cheminement parcouru dans le labyrinthe allant de Beyrouth à Paris en passant par Damas et Téhéran. On comprend moins bien, en revanche, qu’il n’observe pas cette réserve lorsqu’il met dans la bouche de hauts personnages des appréciations sur des hommes d’État étrangers dont il pourrait leur être tenu grief.
Reste que le bloc-notes est fort intéressant et instructif. Le principal mérite du rédacteur est d’en avoir rassemblé les éléments quotidiennement, avec une sincérité manifeste qui fait parfois songer à de la naïveté, non sans prendre les risques que font courir l’humeur du moment et les préventions du milieu. Pour en tirer le meilleur profit, il convient de n’absorber ce pesant ouvrage qu’à petites doses, en le lisant au moins au second degré, pour éviter d’être lassé par la fastidieuse navette des dossiers, la noria des soucis du jour et, encore davantage, par le caquetant manège des entourages. ♦