La vraie guerre du Kippour
« La valeur d’un compte rendu rédigé si tôt après les événements pourra être discutée par certains. Toutefois une étude immédiate lorsqu’on a encore présent à l’esprit l’atmosphère d’une crise, et avant que la légende ne s’en empare, présente aussi des avantages. Je n’ai pas eu accès à des documents inédits… mais je crois pouvoir prédire qu’à peu près 98 % de sources intéressantes pour l’histoire sont d’ores et déjà accessibles ».
Cette phrase extraite de la préface du livre de Walter Laqueur, directeur de l’Institut d’histoire contemporaine de Londres, marque à la fois l’intérêt et les limites de l’ouvrage.
C’est une analyse et un bilan aussi complets que possible de la crise d’octobre, plus axés sur le contexte politique local et mondial que sur les opérations militaires proprement dites. On trouvera néanmoins sur ce plan, l’essentiel concernant l’étude de la stratégie israélienne, le mythe des frontières sûres, le secret de la préparation des armées arabes ainsi que des jugements nets et précis sur l’emploi des différentes armes, marine, aviation, blindés, infanterie, antichars et sur le rôle des services secrets.
Mais c’est l’aspect de la crise sur le plan international et notamment l’attitude des deux Grands, écartelés entre la nécessité du soutien à leurs « champions » respectifs et le maintien de leur politique de détente qui reste au centre des préoccupations de l’auteur. Dans ce domaine il donne des réponses aux principales questions que peuvent se poser les lecteurs sans dissimuler ses préférences américaines. Il se montre très sévère pour les Européens, et le titre du chapitre qui leur est consacré : « l’attitude des Européens ou 9 x 0 = 0 », est un juste reflet de son opinion.
L’accès de l’ouvrage pour un lecteur non averti est facilité par un long chapitre sur les principaux événements du Proche-Orient entre la guerre des Six Jours de 1967 et celle du Kippour, où il utilise des articles écrits antérieurement, ce qui l’amène d’ailleurs à certaines redites dans la suite de son livre, peu gênantes au total.
Enfin, dans un chapitre consacré à l’arme du pétrole, il rassemble clairement l’essentiel de l’influence importante de ce facteur dans les données du conflit.
Un ouvrage solide et sérieux, pas toujours facile à lire, mais qui a le mérite d’apporter très vite une ample moisson de sujets de réflexion. ♦