Ce nouvel ouvrage de Bertrand de Jouvenel est, en fait, un recueil d’articles déjà parus dans différentes revues spécialisées et de communications présentées à l’occasion de réunions ou de congrès, le tout s’échelonnant entre 1956 et 1967, et groupé sous le titre de l’une de ces contributions. Il s’agit Du Principat, qui traite de la concentration des pouvoirs politiques sur une seule tête, phénomène qu’on observe de plus en plus fréquemment dans les régimes contemporains. Les autres contributions se présentent, plus ou moins, comme des variations sur ce même thème : presque toutes font une place assez importante à la prévision – le grand souci de toujours du président fondateur de « Futuribles ».

Les lecteurs ayant déjà pratiqué Bertrand de Jouvenel retrouveront avec plaisir dans ce volume les principales qualités de l’auteur : l’élégance du style, l’originalité et la distinction de la pensée, le bonheur dans l’expression, la subtilité du raisonnement et, surtout, l’étonnante érudition dont il sait faire preuve, à la fois avec modestie et avec un parfait à-propos. Autrement dit, le lecteur est sûr, une fois de plus, de se retrouver, comme il s’y attend, en fort bonne compagnie, dans le droit fil de la tradition établie par les meilleurs de nos écrivains politiques : Montesquieu, Alexis de Tocqueville, Benjamin Constant, pour ne citer que les plus connus et auxquels Jouvenel se réfère le plus volontiers.

Ceci dit, ce volume présente, à notre avis, les faiblesses inhérentes aux recueils de ce type, où se trouvent juxtaposées des œuvres écrites et publiées en des circonstances et au gré d’inspirations fort diverses, dans des buts spécifiques, qui ne sont pas forcément compatibles. La nécessité et l’intérêt de ces groupages n’apparaissent pas avec évidence. On ne peut s’empêcher d’y voir un artifice de circonstance et le plaisir de la lecture s’en ressent malgré tout. ♦