Le 2 décembre 1976, M. Roper (député britannique, Commission des Questions de Défense et des Armements) a présenté à la 22e session de l’Assemblée de l’Union de l’Europe occidentale un intéressant rapport sur la lutte anti-sous-marine. Après avoir présenté le potentiel soviétique dans ce domaine, ce rapport analysait la vulnérabilité de l’Occident, présentait les moyens de l’Otan en matière de recherches, de détection, de systèmes d’armes, et évaluait le potentiel de lutte anti-sous-marine des alliés. Il concluait à la nécessité pour ceux-ci de coordonner leurs tactiques, d’intensifier leurs efforts de recherche et de veiller à l’interopérabilité de leurs forces en ce domaine. Ce rapport est ici commenté par un spécialiste de ces questions.
Toutefois, les recommandations de ce rapport sont sujettes à discussion. Elles invitent, en effet, les Européens à appliquer leurs moyens à des missions de lutte anti-sous-marine principalement dans les eaux côtières et à l’approche des ports, zones qui, souligne le rapport, sont plus propices à la prise en chasse des navires civils par les sous-marins ennemis. Les États-Unis se chargeraient des eaux océaniques. Notre pays, qui a des intérêts mondiaux et dont les routes maritimes débordent largement la zone couverte par l’Alliance Atlantique, ne peut évidemment se satisfaire d’une telle délimitation des compétences.
Dans un passé encore récent, l’histoire du monde se confondait avec celle de l’Europe qui elle-même s’identifiait à la Chrétienté du XIVe au XXe siècle. Europe divisée cependant, où s’affrontaient les puissances, Espagne, Hollande, Angleterre, France puis Allemagne ; champ clos où se vidaient les querelles des religions puis des nationalismes. Le monde extérieur partagé entre les empires européens concourait aux efforts des métropoles. La stratégie se bornait aux théâtres européens. À l’analyse, au-delà de l’histoire événementielle, on retrouve toujours le schéma cher à l’Amiral Castex, celui de la coalition conduite par la Puissance Maritime, « la petite île immense, cauchemar de la stratégie napoléonienne », contre l’Alliance Continentale. Dans cette Europe-là, la France fut toujours de l’Alliance Continentale.
Nos esprits, tout nourris de cette histoire où nous avions le beau rôle, discernent mal la mutation stratégique de l’Europe Libre où nous vivons et telle que l’ont laissée les accords de Yalta. Notre Europe, qui continue à faire illusion avec le dixième de la population, le tiers des revenus mondiaux, et surtout l’immense attraction culturelle qu’elle ne cesse d’exercer sur le monde entier, mais réduite physiquement à ce qu’elle est, tout juste les 3,5 % de la surface de la planète. Le centre de gravité du monde ne s’y trouve plus. Aujourd’hui, la Puissance Insulaire et Maritime est aux États-Unis, la Puissance Continentale est en Union Soviétique. Nous appartenons à cette frange, enjeu traditionnel entre les empires. L’Europe occidentale est à l’Amérique ce qu’était à l’Angleterre le camp retranché de Torrès Vedras au Portugal, contre l’Europe napoléonienne.
Tête de pont continentale de la stratégie américaine, isolée du continent par la fermeture totale des frontières à l’Est, l’Europe occidentale est à tous points de vue en situation insulaire. Comme telle, sa survie, tant politique qu’économique, n’est possible qu’à la double condition de tenir son sanctuaire territorial hors d’atteinte et de sauvegarder ses libertés de communication avec l’outre-mer.
Aperçu du rapport à l’UEO
Quelques caractères techniques et cinématiques de la lutte ASM
Le milieu marin
Le sous-marin
Les moyens de lutte anti-sous-marine
Essai de prospective
Conclusion