Guerre, État et Société à la fin du Moyen-Âge. Études sur les armées des rois de France 1337-1494
Fruit d’études approfondies, bourré de références extrêmement détaillées, cet ouvrage n’est pas d’un accès facile. Il implique de la part du lecteur une très bonne connaissance de la période considérée : aucun rappel des principaux événements qui ont émaillé la guerre de Cent ans et les règnes de Charles VII (1403-1422-1461), Louis XI (1423-1461-1483) et Charles VIII (1470-1483-1498), aucun tableau chronologique ne viennent à l’aide de celui qui ne serait déjà un familier de cette époque. On peut le regretter d’autant plus que l’évolution des forces armées est intéressante à suivre, conditionnée qu’elle est par les guerres, elles-mêmes conséquences aussi bien que causes du lent processus par lequel le pouvoir royal se renforça aux dépens de la féodalité et de la progressive prise de conscience nationale face aux menaces extérieures.
Le Professeur Contamine s’attache à montrer, par la multiplication des exemples particuliers, comment les souverains Valois tentèrent de résoudre les problèmes posés par la recherche d’un judicieux équilibre entre « forces de manœuvre » et « forces de défense du territoire », entre éléments montés et éléments à pied et, pour ceux-ci, entre archers, arbalétriers, piquiers, tout en tenant compte des « impératifs logistiques », dans un cadre politique et social lui-même assez stable dans son ensemble mais évolutif dans certaines de ses composantes et dont l’influence sur l’organisation du commandement était déterminante. De cette masse de « cas concrets », l’auteur fait bien ressortir la pérennité du caractère impératif (et limitatif !) des aspects financiers et de l’influence considérable qu’exerçaient dans ce domaine états généraux, assemblées provinciales et municipales et opinion publique.
Des milliers de noms, des centaines de citations en langue de l’époque font respirer au lecteur pour qui l’histoire n’est pas une science abstraite un parfum de la vieille France vivante, foisonnante, riche de toute son histoire à venir, de tout notre passé ! Sans doute n’est-ce pas là un effet recherché en premier lieu par l’érudit qu’est M. Contamine. Qu’il nous soit cependant permis d’évoquer cette impression poétique et sentimentale qui sourd d’un ouvrage, somme toute austère, remarquablement documenté, instrument de travail capital pour les chercheurs et les étudiants de l’histoire de nos armées. ♦