Alliance Against Hitler. The Origine of the Franco-Soviet Pact
Ce copieux ouvrage est l’œuvre d’un professeur-assistant d’histoire à l’Université de Duke, spécialiste des questions européennes. Il est sans doute le premier à être consacré à l’histoire détaillée des relations franco-russes de 1931 à 1935. William Evans Scott juge que le pacte d’assistance mutuelle du 2 mai 1935 entre les deux pays est au centre des origines de la Seconde Guerre mondiale, jugement que d’aucuns contesteront certainement, mais qui explique pourquoi il y a consacré une si longue et si minutieuse étude.
La tradition de l’alliance franco-russe, le désir de recouvrer les fonds prêtés par les Français au régime tsariste, la crainte de voir renaître une Allemagne forte et dangereuse, sont à l’origine du rapprochement du côté français, non sans de nombreuses réticences quant à la menace de voir se répandre l’idéologie communiste. Du côté russe, on ne se montre pas pressé de renouer des relations vers l’Ouest. Staline, peu familier des questions de politique extérieure, préoccupé par la mise au point et la réalisation des plans quinquennaux, laisse – involontairement peut-être – une certaine initiative à Litvinov. Un traité de non-agression est signé le 29 novembre 1932, mais les choses traînent en longueur pour faire le pas suivant, et c’est le réarmement allemand et la menace hitlérienne qui précipitent la signature du traité d’assistance mutuelle.
De nombreux hommes d’État français se succèdent au pouvoir au cours de ces années. L’auteur en fait de vifs portraits ; sa sympathie va à la bonne volonté et à l’honnêteté (peut-être un peu naïve) d’Édouard Herriot et de Paul Boncour. Louis Barthou lui paraît plus complexe, mais si, malgré ses tendances « de droite », il pousse à la signature du pacte, c’est parce qu’il est, avec Litvinov, « un des rares hommes d’État européens qui aient lu Mein Kempf ». Enfin, il admire la ruse et l’habileté de Pierre Laval qui, craignant que le pacte soit une provocation pour Hitler et un encouragement pour les communistes français, se trouve finalement contraint de le signer.
Il était évidemment impossible de traiter d’un sujet pareil sans faire, au moins à grands traits, un tableau de la politique européenne de l’époque. William Evans Scott n’y manque pas, ce qui enrichit son œuvre et place dans leur contexte et leur complexité les relations entre la France et l’URSS.
On lira ce livre avec un intérêt d’autant plus grand qu’il vient d’un spectateur lointain. ♦