Le Sahara
On parle beaucoup du Sahara et la grande presse, les revues publient des articles, souvent bien faits, sur ses richesses, son avenir et les perspectives que sa mise en valeur offre à l’économie française.
Il est plus difficile de trouver, condensée en un court volume, une vue d’ensemble précise et objective. Le livre de M. Varlet vient heureusement combler une lacune, et enrichir la collection « Que sais-je ? » d’un ouvrage dont on s’étonnait presque de ne pas encore voir figurer le titre parmi les 766 volumes déjà publiés.
En si peu de pages, il était évidemment impossible de tout dire sur le Sahara. Comme la matière était abondante, il faut féliciter l’auteur d’en avoir extrait ce qui paraît vraiment être l’essentiel. En un peu plus d’une heure de lecture, on sait, de façon claire, ce qu’il faut savoir pour posséder des notions d’un des grands problèmes de notre temps, on a pu voir s’ouvrir le sujet, et on est orienté vers des études plus approfondies.
Dans l’opinion, le Sahara, c’est le pétrole. Un des mérites de M. Varlet est d’avoir montré sans ambiguïté que d’autres questions se posent, que l’exploitation du pétrole entraîne, dès maintenant, une modification profonde des conditions d’existence des habitants du Sahara, suppose un développement de l’agriculture, bref, entraîne un mouvement général qui ne peut aboutir heureusement que s’il se fait harmonieusement.
Il semble inutile de résumer, pour les lecteurs de la Revue de Défense Nationale, les différents aspects d’un développement rapide du Sahara. L’auteur les passe en revue, en étudiant successivement la géographie physique, la géographie humaine, l’histoire, la mise en valeur actuelle, notamment dans les domaines du pétrole, de l’eau, des ressources minières, des ressources énergétiques.
Dans l’ensemble, M. Varlet semble avoir voulu, sans nier les possibilités éventuelles du Sahara de l’avenir, insister sur les possibilités immédiates ; il s’est gardé, et il met les lecteurs en garde, contre les rêves et les utopies. C’est un retour au réel, après les anticipations souvent téméraires que l’on peut lire si fréquemment. Mais il est présenté, non comme un freinage, mais comme une prise de contact avec des impératifs sévères : le climat, la longue durée des prospections, la difficulté des estimations justes, les crédits considérables que nécessite toute entreprise d’une certaine envergure. Certains seront peut-être déçus et seront tentés d’accuser l’auteur de pessimisme. Mieux vaut dire optimisme raisonné.
C’est, pensons-nous, le meilleur langage à tenir vis-à-vis de tous les publics, et notamment vis-à-vis des jeunes, auxquels pense l’auteur dans le dernier alinéa de son livre, en rappelant les paroles de Vauban à Louvois : « Faites mentir ceux qui disent que les Français entreprennent tout et ne finissent rien ».
On pourra regretter peut-être que la bibliographie donnée en fin de volume soit trop courte. L’intérêt du sujet aurait mérité, semble-t-il, une plus longue et surtout une plus précise énumération des ouvrages, articles et documents auxquels se référer après avoir été mis en appétit par la lecture de cette excellente introduction du Sahara qu’est le livre de M. Varlet. Comme il est à prévoir que la première édition de cet ouvrage sera vite épuisée, on peut souhaiter qu’il soit tenu compte de cette remarque dans la prochaine édition.
Mais ce n’est là que reproche mineur. Si nous étions professeur dans une classe de première, de math élem ou de philo, nous ferions lire ce livre à nos élèves et le leur ferions commenter. Ce serait la meilleure leçon de géographie, d’économie et de civisme que nous pourrions leur donner. Et ce serait peut-être aussi un moyen d’amener les parents à lire cet ouvrage et à se mettre à jour sur une question de toute première actualité, en même temps que du plus lointain et du plus important avenir. ♦