Batailles politiques et militaires sur l’Europe
L’ouvrage du général Armengaud est aussi intéressant que riche en enseignements.
L’auteur, singulièrement préparé à l’étude des grands problèmes militaires par les hauts commandements qu’il avait exercés, par ses travaux personnels et par ses nombreux voyages à l’étranger, rappelle comment et pourquoi il avait pu affirmer avant la guerre que l’avion et le char donneraient aux opérations un caractère nouveau de rapidité et de violence ; malheureusement, ces avis, pourtant justifiés, ne furent pas écoutés.
Le récit de ses missions en Pologne, en Roumanie, en Yougoslavie, en Angleterre au cours de la guerre, celui de ses entretiens avec les chefs de gouvernements et les représentants du Haut Commandement en France, en Angleterre, en Belgique et en Hollande éclairent d’une lumière nouvelle bien des événements jusqu’alors peu connus. L’énergie et la franchise avec lesquelles le général Armengaud défendit alors ses opinions sont aussi remarquables que la valeur des arguments qui leur servirent de base ; malheureusement il se heurta le plus souvent à l’indifférence ou à l’incompréhension.
Les chapitres relatifs à la campagne de France et aux conditions dans lesquelles fut signé l’armistice témoignent d’un sentiment exact des situations militaires et politiques et d’une juste appréciation des motifs d’ordre psychologique ou humain qui dominèrent souvent les décisions des Hauts Commandements et des Gouvernements. On ne peut que s’incliner devant la franchise et l’indépendance que l’auteur apporte dans son jugement sur les événements et sur les hommes.
Une précieuse leçon pour l’heure présente se dégage de la lecture de l’ouvrage : les progrès de jour en jour plus rapides de la science constituent une menace grandissante pour la paix et donnent à cette menace un caractère d’urgence dans ses possibilités, chaque jour plus accentué.
La guerre se gagnera désormais, surtout, par sa préparation ; le seul moyen de la prévenir c’est d’interdire cette préparation à l’adversaire. Cette préparation embrasse un ensemble de problèmes d’ordre économique, social, politique, diplomatique, financier, industriel et militaire : elle exige désormais auprès du chef du Gouvernement un organe unique et permanent, dégagé de tout esprit de parti, de toute idée préconçue, capable de suivre l’évolution du progrès dans tous les domaines et d’adapter les ressources matérielles et humaines de la Nation à cette évolution, sans sa préparation à la guerre.