Les nouveaux guides Gallimard
Cette collection, créée courant 1993, est déjà riche d’une cinquantaine de volumes, dont beaucoup captiveront certainement les lecteurs de Défense Nationale. Ils sont une fenêtre ouverte sur le monde, une analyse des civilisations, des cultures et des sociétés, grâce à une cartographie inédite à trois dimensions, riche et foisonnante, qui d’emblée jette le lecteur dans les réalités les plus profondes, durables, multiples des pays et contrées décrits.
Parmi les titres déjà parus, signalons pour ce qui en est des zones géopolitiques particulièrement intéressantes : le Maroc, la Tunisie, l’Égypte, la Malaysia et Singapour, le monde maya… Ils ont entre 350 et 580 pages ; leur contenu est d’une densité et d’une richesse véritablement exceptionnelles, d’abord par leur construction. Tous décrivent la nature du pays, essentiellement à l’aide de schémas, de planches, de clichés, dont la plupart sont en relief et tous en couleur. En quelques pages, c’est toute la vallée du Nil, le monde maya, la Malaysia, Singapour et Brunei, le Maroc et la Tunisie qui apparaissent en modèle réduit, presque vivants devant nous. Faune, flore, relief, climatologie, habitat, tout est présenté ainsi.
Puis vient l’histoire, certes plus classique, mais rendue attrayante par les tableaux, prises de vue, fac-similés de documents et témoignages du passé. La situation contemporaine n’est nullement négligée, tout au contraire ; de fort beaux chapitres aussi sur les pays vus par les peintres et les écrivains. Vient enfin la description touristique et culturelle des principaux itinéraires.
S’ajoutent à tout cela des carnets pratiques fort bien présentés et également fort riches, nouveau coup d’œil sur les sociétés d’aujourd’hui. Des bibliographies de 3 à 5 pages clôturent ces guides au format très pratique. Une lecture attentive permet de dire qu’au moins 35 à 40 % du contenu de l’ouvrage portent sur des éléments se rapportant à la géopolitique, à la géoculture ou à la connaissance des lieux et des hommes.
À propos du monde maya, déchiré par les conflits, le guide nous apprend concrètement bien plus que maints ouvrages purement narratifs. Groupes ethniques et linguistiques, descriptions fouillées des centres et terres communautaires, marchés, artisanat, types humains, architectures, occupation de l’espace, etc. permettent d’entrer dans les réalités profondes de cet ensemble de peuples répartis sur un territoire de 324 000 kilomètres carrés. Pour une étude plus historique, se reporter au volume de la collection « Découvertes » chez le même éditeur : Les cités perdues des Mayas (176 pages). Si la thèse d’Huntington sur les chocs de civilisations au-delà des quelque huit à neuf grandes ères culturelles de la planète revêt un sens c’est, comme l’a montré Yves Lacoste, dans les micro-ensembles, là ou se déploient les stratégies locales ou les conflits.
Les mêmes observations pourraient évidemment être faites pour cette partie de l’Asie du Sud-Est asiatique où se rencontrent des populations malaises, chinoises et indiennes : Malaysia, Singapour et Brunei. Sur les plantations d’hévéas et de palmiers à huile, sur l’islam malais, sur la famille royale de Brunei (une des plus anciennes de la région : elle remonte au XIVe siècle), sur cette civilisation du riz, exposée par P. Gourou, sur le monde de la mousson, sur l’architecture moderne des cités en plein essor, voilà encore des éléments très riches et combien parlants.
Ressortissant tout à la fois à la catégorie du livre de géographie et d’histoire, de sociologie culturelle et des sociétés en mouvement, des répartitions des populations sur des territoires donnés, les guides Gallimard, par leur présentation inédite essentiellement picturale, mais toujours étayée par des explications concises et complètes, sont certainement, à côté de leur élément esthétique, des ouvrages permettant de mieux comprendre notre monde, ses enchevêtrements de cultures, de populations et de conflits, ses héritages multiples. ♦