L’intelligence artificielle va jouer un rôle croissant dans la conduite des opérations. Cela nécessite une réflexion de fond sur les enjeux, les opportunités mais aussi les risques liés à l’IA. Cela exige aussi de nouvelles compétences et des ressources humaines pour mieux appréhender un domaine en pleine mutation.
Emploi opérationnel de l’intelligence artificielle
Operational Use of Artificial Intelligence
Artificial intelligence (AI) is going to play an increasing role in the conduct of operations, one that requires careful thought on the challenges, opportunities and risks that stem from AI. It will also require new competencies and substantial human resources in order to understand better this rapidly-changing field of development.
Si la stratégie est la clef de voûte du succès des forces armées, l’histoire militaire a montré que l’adaptation des forces armées à l’environnement opérationnel était un facteur essentiel à la réussite des opérations. Le succès de cette adaptation dépend en partie de différents domaines capacitaires, dont la doctrine, l’entraînement ou l’équipement des forces (1). L’emploi d’une artillerie qui tirait plusieurs centaines de mètres plus loin que celle de l’ennemi à Valmy en 1792 a eu raison des velléités des Prussiens et des Autrichiens de prendre Paris. Aujourd’hui, la révolution numérique accélère le tempo des évolutions technologiques et multiplie les champs d’applications dans le domaine des opérations. La saisie d’opportunités liées au développement de l’intelligence artificielle doit être recherchée pour aller « plus loin » que nos adversaires dans le domaine informationnel et améliorer l’efficacité de nos systèmes d’armes pour favoriser le succès de nos engagements futurs.
Les capacités qui seront mises en place dans le cadre de la prochaine loi de programmation militaire vont générer de véritables tsunamis de données. À titre d’illustration, chacun des trois satellites d’observation successeur d’Hélios 2, dont la mise en service est prévue à partir de 2019 permettra de produire 100 fois plus d’informations que l’ensemble des satellites d’observation utilisés par les armées aujourd’hui. La captation de toute la valeur informationnelle issue de ces capteurs au profit de la planification et de la conduite des opérations nécessite de revoir l’organisation. Compte tenu de la masse d’informations à venir, il ne peut plus être question de traiter chaque image comme celles des premiers appareils photographiques de reconnaissance aérienne : le remplacement de la plaque de verre et de la table lumineuse de 1915 par un écran d’ordinateur ne constitue qu’une adaptation à la marge du travail des analystes qui ne peut répondre à une pleine exploitation de ces données. Dans cette perspective de court terme, il est indispensable de revoir les processus et plus particulièrement la répartition des rôles entre l’analyste et la machine.
Sans s’attarder sur les aspects techniques de l’intelligence artificielle, on peut retenir que cette technologie permet de traiter d’importants volumes de données, au-delà des limites quantitatives humaines de traitement. Certains de ces traitements peuvent également trouver des applications s’approchant du temps réel, là encore au-delà des limites cognitives humaines de rapidité d’analyse. En s’appuyant sur des techniques d’apprentissage automatique (2) réalisées à partir de données existantes, il est envisageable de catégoriser, sans intervention humaine, de nouvelles données ou de mener des analyses prédictives appliquées à des phénomènes complexes. Ces technologies peuvent, par exemple, s’appliquer à la maintenance : l’apprentissage automatique réalisé à partir de données – en grand nombre – de températures, de vibrations mécaniques, de viscosité d’huile de graissage, d’images ou d’enregistrements sonores d’un système mis sous surveillance permettra de configurer un algorithme d’intelligence artificielle en mesure de détecter l’imminence d’une panne. Cette maintenance, dite prédictive, complète avantageusement les procédures curatives de dépannage ou les interventions programmées préventives.
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