Former est au cœur des préoccupations de nos armées. Former est exigeant et nécessite de répondre aux vrais besoins opérationnels. Cela impose une formation qui doit s’adapter en permanence, innover pour affronter les exigences du combat et doit s’inscrire dans la durée pour préparer l’avenir.
De l’art de « former innovant » dans les armées
The Art of Innovative Training in the Armed Forces
Training is at the very heart of our forces’ preoccupations: it is demanding, and has to respond to genuine operational requirements. In turn, that means adoption of a form of training that can adapt permanently and innovate in order to face up to the demands of combat, and which has to be considered over the long-term when preparing for the future.
Nous sommes en 2060. La section à l’instruction reconnaît lentement, mais sûrement, cette portion de zone urbaine qui ressemble à s’y méprendre à un film de science-fiction datant pourtant du XXe siècle. Le premier groupe progresse au sol. Les soldats augmentés sont à l’affût. À une dizaine de mètres au-dessus d’eux, un autre groupe appui la progression. Franky Zapata aura eu une idée de génie. Présentée pour la première fois aux Français lors du 14 juillet 2019, l’évolution de son Flybord Air a révolutionné le combat. Légers, mobiles, rapides, les voltigeurs – le terme « grenadier » auparavant associé a disparu – sont presque invisibles à l’œil nu, du fait de leur camouflage obtenu grâce à un procédé d’imagerie lenticulaire. Développé sur l’idée d’un officier général ayant rejoint un grand industriel de défense, personne n’y croyait il y a quarante ans. C’est désormais une réalité. Le troisième groupe couvre à partir de véhicules Griffon V3, qui commencent à être obsolètes. Soudain, la section est prise à partie par un tir laser à haute fragmentation. « Stop les gars ! On arrête tout ! » hurle alors le sergent-major instructeur dans son micro-gorge. « Retirez-moi vos casques. Rassemblement autour du visionneur 3D. Débriefing. » Chaque soldat ôte son casque de réalité virtuelle. Quelques secondes sont nécessaires pour se réhabituer à la lumière blafarde de cet ancien gymnase reconverti en salle d’immersion. L’autoévaluation de l’exercice peut commencer.
2020. Retour au temps présent. « Penser autrement, Vivre autrement, L’école autrement, Manger autrement… ». La liste est longue, l’expression étant déclinée dans tous les domaines. Il faut désormais tout faire « autrement », comme si le présent qui découle du passé n’était subitement pas à la hauteur des enjeux futurs. Il n’y aurait donc que le monde d’avant et celui d’après ! L’expression correspond à un effet d’aubaine calqué sur une technique de communication qui consiste à effrayer : il faudrait à tout prix réagir avant qu’il ne soit trop tard. Cette peur permettrait une prise de conscience responsable et raisonnable. Affabulation ! À moins d’être sérieusement préparé à l’affronter, la peur annihile bien plus souvent les facultés de réflexion qu’elle ne les décuple. Elle gomme cette lucidité bienveillante qui évite de tomber dans le piège médiatique et lobbyiste de l’« autrement ».
Dans le cadre du thème considéré, « Former autrement » signifierait changer radicalement les méthodes, parce que le besoin l’impose, en rupture totale avec les anciens codes par le biais de mesures disruptives. Or, même avec le retour probable des conflits de haute intensité, est-ce que l’outil de formation dans les armées ne répond plus au besoin ? Est-il obsolète, archaïque, dépassé ? La question semble légitime.
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