La guerre engagée par la Russie contre l’Ukraine puise ses racines dans une relecture de l’Histoire à des fins idéologiques. Certes, le passé est complexe et douloureux depuis des siècles, mais cela ne justifie pas de vouloir modifier l’Histoire par la force.
Comment l’Histoire inspire l’actualité
How History Inspires the Present
Russia’s war against Ukraine has its roots in a re-reading of history for ideological reasons. The past has certainly been complex and painful for centuries but that does not justify wanting to change history by force.
Célèbre écrivaine ukrainienne Oksana Zabuzhko rappelle avec insistance une citation attribuée à Otto von Bismarck : « Les guerres ne sont pas gagnées par des généraux, mais par des professeurs d’écoles et des curés de paroisse. »
Aujourd’hui, la nostalgie historique semble passionner au plus haut point certains dirigeants sur le continent européen. Le monde entier a eu droit à une leçon biaisée d’histoire par le président russe Vladimir Poutine inaugurant la reconnaissance des Républiques séparatistes, préalable à la déclaration de la guerre en Ukraine (1). Cette singulière analyse historique en a laissé plusieurs sans voix et a provoqué de multiples discussions au sein de la communauté internationale et scientifique. L’Histoire ou plutôt la version proposée par le Président russe lui fournit toutes les justifications pour agir selon ses convictions intimes, exprimer sa colère ou son sentiment d’humiliation qui n’a pas échappé aux spectateurs attentifs.
Cette passion pour l’histoire se transforme en arme qui alimente le discours politique, souvent populiste, envers la nation voire le monde extérieur. On observe ce phénomène en Russie, en Biélorussie, mais aussi en Hongrie. En Biélorussie, le président Loukachenko se positionne comme historien de formation, spécialisé en relations internationales (2). Il ne cesse d’y revenir et de glorifier l’histoire de la Seconde Guerre mondiale et le passé communiste. De l’autre côté de la frontière de l’Union européenne, en Hongrie, Viktor Orbán s’acharne à restaurer la gloire nationale, réécrit l’histoire en s’appuyant entre autres sur l’Institut Veritas, fondé en 2014, devenu son arme de fabrication narrative (3), instaure des fêtes nationales et réhabilite des personnalités historiques tous azimuts, enfin se proclame le père sauveur de la nation (4). Il serait peu sérieux de comparer ces pays au moyen d’une analyse simpliste. Cependant, nous pouvons dégager quelques tendances que l’on observe parmi ces Présidents devenus maîtres de l’histoire de leur nation. Deux figures présidentielles opposées dans un conflit militaire illustrent ces tendances.
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