L’Europe centrale et orientale est mal connue de l’Orient, pour de nombreuses raisons dont une histoire complexe et en mutation quasi permanente. Après la chute du Mur, les sociétés civiles ont pu renaître et se rapprocher, au-delà des méfiances ancestrales. La crise actuelle ouvre de nouvelles perspectives.
L’Europe centrale et orientale : une communauté de destin ?
Central and Eastern Europe: a Community with a Destiny?
Central and Eastern Europe is often referred to simply as ‘the East’ for many reasons, not least of which a complex history and almost permanent state of change. Since the fall of the Wall, civil societies have been able to transcend ancient mistrust to rebuild themselves and establish closer relationships. The current crisis is opening up new perspectives.
Une communauté de destin figure comme un synonyme de l’Europe ou de l’Union européenne. Une désignation communément adoptée pour décrire notre espace des valeurs communes, des choix de vie, de la pensée libre, de la protection des droits de l’homme et enfin, de l’héritage chrétien. Au sein de la famille européenne, il y a pourtant une certaine distinction entre l’Est et l’Ouest, parfois plus accentuée. Sans vouloir aucunement porter un regard de division en Europe, il nous semble pourtant nécessaire de mieux connaître « Cette Europe qu’on dit centrale » – reprenons le titre d’un des plus importants ouvrages que Catherine Horel a consacré à l’Europe du centre-est (1). Il fut courant, en Occident, de s’étonner d’une certaine solidarité entre la Hongrie, la Pologne, la République tchèque ou de considérer comme altérée ou démesurée l’inquiétude de l’Europe de l’Est vis-à-vis de la Russie. Par simplification, on remettait cette angoisse sur le dos du passé proche au sein de l’URSS. La participation des dirigeants baltes ou polonais du côté de l’opposition ukrainienne lors des Maïdans de 2004 ou de 2014 surprenait, mais on n’y prêtait guère importance à l’Ouest. Des innombrables appels à la solidarité européenne venant encore une fois des pays baltes sonnaient dans le vide. Et, en même temps, on ressentait une proximité entre ces pays avec l’exception de l’Ukraine qu’on situait plutôt du côté russe, par facilité géopolitique et en cherchant certainement à ménager la Russie. Et pourtant, les cartes sont brouillées.
Le 24 février 2022 a dévoilé une frontière orientale de l’Europe, celle que l’Occident ignorait pendant trop longtemps : l’agression de la Russie contre l’État ukrainien souverain et ayant choisi le destin européen et le non-alignement à son immense voisin avide de restauration impériale. Les jours et les semaines suivants illustraient cette détermination, mais aussi ont mis en lumière une communauté de destin qui inspire ces peuples européens qui s’étendent, en réalité, sur presque la moitié de l’Europe. Au milieu de ce conflit historique sur le continent européen, les liens contigus dans cet espace commun se sont exprimés à nouveau avec une solidarité puissante. En dépit des singularités nationales et politiques, on pourrait avoir le sentiment d’une voix commune de ces pays. Serait-il une exception face à la menace russe qui réveille un passé communiste proche ou y a-t-il une explication supplémentaire ?
Des unions politiques et militaires
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