Téhéran s’est imposé depuis 1979 comme un acteur régional majeur s’appuyant sur l’islamisme et son nationalisme perse. Son anti-occidentalisme brutal et revendiqué entre pourtant en contradiction avec les aspirations sociétales d’une société civile plus ouverte au monde, obligeant les Ayatollahs à un certain pragmatisme.
La République islamique d’Iran face aux Occidentaux : un conflit stratégique ou conjoncturel ?
The Islamic Republic of Iran Against the West: a Strategic or Short-Term Conflict?
Teheran has developed since 1979 into a major regional player, built upon Islamism and Iranian nationalism. Its openly-declared and violent anti-Western stance nevertheless contradicts the aspirations of a civil society more open to the world, which compel the Ayatollahs to act with a degree of pragmatism.
Le renversement de la monarchie iranienne et l’instauration de la République islamique d’Iran en 1979 furent une vraie révolution, dramatique et globale, aux effets durables, pour la société iranienne comme pour la sécurité régionale. L’ancien « gendarme du golfe Persique », protecteur de nos intérêts pétroliers face à la menace soviétique, venait de renverser ses alliances et devenait une menace pour les pays occidentaux et pour leurs alliés de la région, notamment pour Israël.
À juste titre, les dimensions culturelles et islamiques de cette révolution ont été mises en évidence, mais elles ont parfois occulté d’autres dynamiques constitutives de ce mouvement, comme le nationalisme qui n’était pas seulement l’apanage du Chah. Le consensus révolutionnaire associait en effet l’opposition nationaliste à l’omniprésence des États-Unis dans la politique du régime impérial et un retour à l’islam chiite qui avait été au cœur de la création de l’État iranien moderne au XVIe siècle. Cette alliance nationaliste des identités culturelle et politique a exacerbé un anti-occidentalisme aux racines profondes, qui semblait néanmoins paradoxal, en contradiction avec les aspirations d’une société iranienne massivement instruite et ouverte à la mondialisation et à la culture européenne (1).
Les racines du consensus nationaliste
Islamisé mais jamais arabisé, premier pays musulman indépendant, membre fondateur de la Société des Nations, la Perse/Iran a toujours valorisé un nationalisme sourcilleux fondé sur son exception culturelle, ethnique et politique. Au XIXe siècle, l’Iran multiethnique, était isolé et encerclé par les empires ottoman, britannique et russe, et défendait son unité et son indépendance en valorisant son identité iranienne et chiite face aux impérialismes chrétiens (2).
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