La guerre en Ukraine imposée par la Russie oblige les pays européens à s’interroger sur l’architecture de sécurité qui résultera de ce conflit majeur. Les approches sont fondamentalement différentes avec la question complexe de la nature de la relation avec Moscou, quelle que soit l’issue de la crise ouverte depuis le 24 février 2022.
L’Europe et son futur ordre de sécurité : existe-t-il une vision partagée ?
Europe and its Future Security Arrangements: Is There a Shared Vision?
The war imposed by Russia on Ukraine is compelling European countries to examine the security structure that might result from that major conflict. Approaches differ fundamentally: key to each is the complex matter of relationships with Moscow, whatever the outcome of the crisis which has raged since 24 February 2022.
La guerre en Ukraine et contre l’Ukraine a fait voler en éclats l’ordre de sécurité de l’Europe. Les contours d’une nouvelle architecture de sécurité ne se dessinent que lentement. Ce qui semble clair, c’est que dans les années, voire les décennies à venir, il n’y aura pas de renaissance de la « sécurité coopérative » avec la Russie. Au contraire, les relations entre Moscou et l’Occident seront caractérisées par l’antagonisme. Traduite en termes militaires, la dissuasion jouera un rôle prépondérant. Ces idées ne sont pas controversées au sein de l’Otan. Cependant, la manière exacte de gérer l’antagonisme avec la Russie n’est pas (encore) consensuelle et un véritable débat n’a pas encore vu le jour. Qui plus est, la plupart des approches centrées sur la dissuasion reposent sur l’idée d’un enga-gement futur des États-Unis dans les affaires de sécurité européennes. La manière de faire face à une diminution de l’engagement américain est débattue en Europe, à tel point que le sujet est à peine abordé. Avec ces deux questions cruciales en toile de fond, cet article vise à décrire les principaux défis du futur débat sur la sécurité en Europe. Sa première partie portera ainsi sur les divisions parmi les Européens et les paradigmes sur lesquelles elles reposent. Une seconde partie sera ensuite consacrée à la question de savoir comment l’Europe pourra aller de l’avant.
Une Europe divisée
Un débat à peine entamé
En ce qui concerne la sécurité européenne, l’attention actuelle est nécessairement centrée sur la guerre en Ukraine. Soutenir Kyiv et mettre fin à la guerre d’une manière acceptable pour les Ukrainiens est la tâche urgente à accomplir. Une fois la guerre terminée, l’Occident devra prendre un certain nombre de décisions importantes sur la manière dont il doit soutenir la reconstruction matérielle, économique et politique de l’Ukraine, et sur la manière dont il doit répondre au désir du pays d’adhérer à l’Union européenne et à l’Otan.
Il serait cependant naïf de penser que la fin de la guerre signifiera le retour de la paix en Europe. Le conflit avec la Russie ne se terminera pas avec la guerre en Ukraine. Le régime russe a toujours clairement indiqué qu’il se voyait enfermé dans une confrontation avec l’Otan et les États-Unis. L’Occident doit donc envisager les questions difficiles auxquelles il est confronté dans le contexte plus large de ce conflit profondément enraciné, ce qui nécessitera de repenser l’ordre de sécurité européen. Parmi les rares choses qui sont claires à ce stade, il y a le fait que dissuader la Russie de toute attaque contre un pays européen jouera un rôle central dans ce nouvel ordre – comme l’illustre le dernier Concept stratégique (1) de l’Otan qui définit la dissuasion et la défense comme la première des trois tâches fondamentales de l’Alliance. Au-delà, il n’y a guère de consensus parmi les Européens. Le rôle que les États-Unis joueront dans la sécurité européenne, une fois que le président Joe Biden aura quitté ses fonctions, est également entouré d’un certain flou.
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