Le concept Indo-Pacifique a été porté initialement par des acteurs extérieurs à la région. Aujourd’hui, le terme reste abondamment débattu et commenté, d’autant plus que l’on assiste à une militarisation croissante de cette crise essentiellement maritime. La compétition États-Unis–Chine oblige ainsi les États insulaires à réfléchir à leur destin commun, malgré leurs différences.
L’Indo-Pacifique à l’aune des critiques océaniennes de sa militarisation
The Indo-Pacific Region in the Light of Oceanian Criticism of its Militarisation
The concept of the Indo-Pacific was originally coined by actors from outside the region. The term is still widely debated and discussed today, especially since we are now seeing growing militarisation of an essentially maritime crisis. Furthermore, competition between the United States and China is compelling Island countries in the Pacific to consider their common future in spite of their differences.
Alors que le concept Indo-Pacifique a été porté le plus souvent par les décideurs politico-administratifs de la défense des États qui l’ont endossé, faut-il vraiment s’étonner que son volet militaire soit désormais mis en cause par beaucoup dans le Pacifique ? À cette question, il convient, sans hésiter, de répondre par la négative. Étant parvenus à un temps post -définition de l’Indo-Pacifique et celui de sa mise en œuvre concrète, nous sommes dans un moment « normal » de contestations. Jamais, le thème Indo-Pacifique n’a été autant débattu et inséré dans les débats publics, et sorti des arènes de discussion des experts des questions internationales et stratégiques. Jamais, il n’a également autant servi de repoussoir à ceux contestant l’ordre Pacifique présent.
L’Indo-Pacifique : un élément constitutif du débat politique océanien contemporain
Après une bonne dizaine d’années d’existence, la terminologie « Indo-Pacifique » s’est imposée dans le langage international. Ce qui fut, dans un premier temps, perçu comme une abstraction, une idée de quelques-uns, est devenu un élément constitutif de nombreux échanges intergouvernementaux. L’argument Indo-Pacifique participe désormais des politiques publiques d’États de l’Asie (ex. Corée, Indonésie, Japon), du Pacifique (Australie, Nouvelle-Zélande), de l’Amérique du Nord (Canada, États-Unis), d’Europe (Allemagne, France, Lituanie, Pays-Bas, République tchèque) ou encore de groupements régionaux (ASEAN, Union européenne). Autrement dit, les colporteurs de cette ambition airale se sont multipliés un peu partout ; bien qu’encore peu nombreux sur les côtes orientales africaines ou parmi les pays du Moyen-Orient. Néanmoins, les approches des Nations les plus déterminées ont fait émerger des convergences stratégiques entre des États ainsi que des projets concrets.
Si l’Indo-Pacifique fut d’abord un récitatif de préoccupations et d’intérêts stratégiques, il n’avait pas vocation à demeurer à l’état d’éléments de langage. Ses promoteurs n’ont jamais fait mystère qu’il devait rapidement se traduire en actes. C’est d’ailleurs ce qui a été fait. Les décideurs furent donc rapidement interpellés en interne et par leurs partenaires de pays tiers sur les mises en œuvre, en matière militaire et autres domaines (cf. lutte contre le changement climatique, protections sanitaires, relances économiques). Les jugements (inter)nationaux ne se portent donc plus sur un récit mais sur des politiques.
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