Le Maréchal Foch a très vite compris comment travailler avec le général Pershing, chef des troupes américaines en 1918. Plutôt persuader et associer, qu’ordonner sèchement, permettant ainsi à l’officier américain de renforcer la cohésion de son armée. Foch sut maintenir cette ligne malgré l’échec en Argonne et les critiques de Clemenceau.
Histoire militaire - Foch–Pershing, ou l’Entente franco-américaine au niveau militaire
Military History - Foch–Pershing: The Military Aspects of the Franco-American Entente
Marshal Foch quickly learned how to work with General Pershing, commander of American troops in 1918: by persuasion and sharing, rather than giving direct orders, he allowed the American officer to strengthen the cohesion of his force. Foch was able to maintain this approach despite the setback in the Argonne campaign and Clemenceau’s criticism.
Ce serait commettre un grave contresens historique que de vouloir considérer l’exercice du commandement interallié du général (puis Maréchal à partir d’août) Foch en 1918 à l’aune de celui du général Eisenhower à la tête des armées alliées en Europe en 1944-1945. En effet, Eisenhower disposait d’un commandement intégré « joint » qui lui faisait commander des groupes d’armées multinationaux (1), au sein desquels toute notion d’armée nationale et donc de « commandant en chef » national avait totalement disparu. Alors qu’en 1918, Foch, commandant en chef interallié, commandait à des commandants en chef nationaux, Pétain pour l’armée française, Haig pour l’armée britannique et Pershing pour l’armée américaine. Chacun d’eux, certes subordonné à Foch pour la conduite des opérations, demeurait néanmoins responsable devant son gouvernement, pour ce qui relevait de la préservation de ses intérêts nationaux. Ceci se concrétisait par le droit de recours des commandants en chef auprès de leur chef de gouvernement (2). C’est à l’aune de cette réalité qu’il convient de considérer les relations de commandement entre Foch et Pershing.
Cette excellence des rapports entre les deux généraux va être explicitée en s’appuyant sur deux exemples : la perception par Foch de la place et du rôle des contingents américains au sein des forces de l’Entente (3), pour le premier, et la crise d’octobre 1918 en Argonne pour le feu des critiques, notamment de Pétain et de Clemenceau, pour le second. Dans les deux cas, Foch a toujours arbitré en faveur de Pershing (4).
Armée américaine ou divisions américaines au sein d’armées françaises
Par ailleurs, s’agissant des conditions futures d’engagement de l’armée américaine, alors en cours de débarquement dans les ports français à compter du printemps 1918, les opinions divergeaient. Pétain clamait haut et fort : « J’attends les Américains et les chars ». Pourquoi ? Face au renforcement du potentiel militaire allemand sur le front occidental par le transfert de grandes unités depuis le front russe – éteint suite à la paix de Brest-Litovsk (3 mars 1918 (5)) –, facteur accentué par une grave crise des effectifs consécutive aux pertes subies, l’armée française se trouvait dans un rapport de force nettement défavorable par rapport à l’armée allemande. Pour pallier cette situation, Pétain avait imaginé un système selon lequel, au terme d’une période d’aguerrissement dans un secteur calme du front, le groupe d’armées de l’Est, les grandes unités américaines du niveau de la division se trouveraient amalgamées au sein des corps d’armée français. Une telle vision n’était pas celle de Foch. Même s’il n’en avait pas été informé officiellement, Foch se doutait bien que Pershing disposait de directives politiques claires de la part du gouvernement américain, visant à lui faire constituer une armée autonome et indépendante de l’armée française. Foch ne se trompait pas : Pershing était détenteur d’une instruction personnelle et secrète signée du Président et allant dans ce sens.
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