Le combat naval à l’horizon 2040 s’appuiera sur des technologies en pleine évolution comme l’IA ou le quantique, mais également avec de nouveaux modes opératoires tels que l’usage massif de drones couvrant un spectre de plus en plus large de missions. La France et ses partenaires européens doivent prendre en compte l’ampleur de ces transformations du combat naval.
Les perspectives technologiques du combat naval en 2040
The Technological Outlook for Naval Warfare in 2040
Looking ahead to 2040, naval warfare will rely on technologies that are currently under rapid development, such as AI and quantum computing, and also on new modes of operation such as the mass use of drones to cover an increasingly broad range of missions. France and its European partners must take full account of the scale of these changes in the naval battle.
À échéance de 2040, il y a peu d’incertitudes sur les technologies qui pourront influencer le combat naval. Les événements en Ukraine et en mer Rouge donnent une idée des nouveaux modes opératoires qui préfigurent certains aspects du combat naval à venir. Ce combat, traditionnellement décisif, létal et fulgurant, tend vers une nouvelle temporalité. Aux armes décisives, tels que des missiles de croisière ou balistiques, s’ajoutent des armes d’usure ou d’attrition avec le développement des drones navals. L’amiral Vaujour, Chef d’état-major de la Marine, utilisait une parabole sportive lors des dernières Rencontres stratégiques de la Méditerranée (1) pour souligner cette dichotomie entre fulgurance et usure : agilité au filet et puissance de fond de cour.
Les perspectives technologiques pour les quinze à vingt prochaines années éclairent le champ des possibles pour les acteurs du combat naval. Si les scénarios de la Red Team, sollicitée par le ministère des Armées pour imaginer l’avenir, ne sont pas encore une réalité – en effet pas d’ascenseur spatial, ni de Nation pirate qui s’en prend aux infrastructures terrestres françaises –, de nouvelles armes feront leur apparition sur les océans, tandis que d’autres déjà existantes auront bénéficié de progrès technologiques et auront proliféré chez des compétiteurs étatiques ou non.
Les progrès de la fulgurance : les technologies de rupture
La progression technologique d’armes décisives
L’accélération de l’évolution des technologies améliore les armements traditionnels. Les performances des missiles, armes par excellence du combat moderne, progressent significativement, que ceux-ci soient tirés à partir de navires ou dirigés vers eux. Ils sont plus précis, plus rapides, d’une plus grande portée. Parmi eux, les missiles hypersoniques sont de nature à modifier les rapports de force dans le combat naval. De nature variée, pouvant aller du missile balistique libérant des ogives manœuvrantes au planeur hypersonique rebondissant sur les couches supérieures de l’atmosphère, ou encore aux missiles de croisière à superstatoréacteurs réalisant l’essentiel de leur trajectoire dans l’atmosphère, ils ont pour caractéristiques communes une vitesse supérieure à Mach 5 (6 000 km/h) tout en conservant leur manœuvrabilité à haute vitesse. Ceci rend leur interception très difficile avec les systèmes de défense actuels. Désignés par la Chine comme des missiles « tueurs de porte-avions », ils ont un effet cinétique particulièrement destructeur. La défense la plus efficace contre ce type d’armes consiste à brouiller ou leurrer les satellites assurant la détection de leurs cibles en mer et le recalage de leur navigation dans les phases terminales du vol. Malgré la mise en service prochaine de nouveaux intercepteurs efficaces, comme le missile Aquila du missilier européen MBDA et le projet GPI (Glide Phase Interceptor) américain, les missiles hyper-soniques resteront une menace forte pour les navires, autant qu’un armement performant qu’ils seront en mesure de mettre en œuvre. Ces systèmes, bien qu’ils soulèvent des défis technologiques importants et restent financièrement peu accessibles (au moins au développement), proliféreront très certainement grâce à leur vente par des pays actuellement dotés de missiles balistiques : par exemple, l’Iran ou la Corée du Nord qui pourraient, d’ici quelques années, maîtriser l’ogive manœuvrante ou le planeur, potentiellement avec le soutien de la Russie.
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