La guerre en Ukraine depuis bientôt 3 ans dépasse largement le cadre de l’affrontement entre Kiev et Moscou. Cela reflète le changement de paradigme plutôt brutal pour les Européens. Il s’agit désormais de devoir anticiper la confrontation en se dotant des capacités permettant d’éviter la guerre. C’est une obligation impérative que l’on ne peut ignorer.
Conflits et crises actuels : quels retours d’expérience stratégiques et opérationnels ?
Current Conflicts and Crises: Operational and Strategic Lessons Learned
The war in Ukraine, which has been waging for nearly three years, has consequences far beyond a confrontation between Kyiv and Moscow—it reflects a quite brutal change in the European situation. We now have to be able to anticipate confrontation by acquiring the necessary capacity to avoid war. This is imperative: we cannot ignore it.
Les Conversations de Gouvieux 2024, manifestation annuelle organisée par le Centre d’études et de prospective stratégique (CEPS), dédiées à des sujets de défense, se sont tenues au Sénat cet automne. De nombreux intervenants de haute qualité se sont succédé et ont partagé leurs analyses et réflexions sur l’état du monde. De ces échanges, on peut retenir quelques grandes idées en partant d’un constat géostratégique vu depuis la France. Ce tableau est à compléter en s’intéressant aux tendances majeures qui se dessinent. Enfin, nous relèverons un ensemble de réponses envisageables et souhaitables pour nous permettre de faire face et de renforcer la compréhension d’une situation qui n’est rien moins que menaçante à bien des égards.
Crises et conflits
Les crises et les guerres qui nous entourent se caractérisent par une accélération d’occurrence rapide et d’évolution. Leur simple énoncé permet de s’en persuader aisément. Cependant, quelques commentaires sur les principaux théâtres s’imposent afin d’en apprécier les nuances et d’en tirer de précieux enseignements.
La guerre en Ukraine vient en premier illustrer ce nouveau contexte géopolitique. Plus que l’imprévisibilité du comportement de la Russie de Vladimir Poutine, il faudrait mettre en exergue une incompréhension ou sous-estimation de la détermination russe par notre logique occidentale en dépit d’informations et de signaux forts. Cette guerre démontre de façon indiscutable le retour de la force dans les relations internationales, cela à un niveau d’engagement en qualité, quantité et durée de ressources impliquées sans équivalent dans notre histoire européenne récente. Les dernières évolutions vers une implication d’acteurs mondiaux à des degrés divers, soulignent l’effet « tache d’huile » d’une situation que la diplomatie ne parvient pas à circonscrire et encore moins à maîtriser. Sur le terrain, la transparence du champ de bataille, le retour de l’artillerie, la prééminence des drones s’imposent, avec un retour aux volumes importants engagés dans cette guerre d’attrition dans laquelle les belligérants se cherchent des soutiens. On assiste aussi à une opposition plus globale entre un camp des démocraties libérales et un regroupement de régimes autoritaires qui n’hésitent plus à s’affirmer par des voies conflictuelles plus ou moins discrètes. Cette opposition se double d’un décrochage idéologique et stratégique Nord-Sud qui accentue l’enchevêtrement des crises.
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