La puissance est redevenue centrale dans le fonctionnement du monde où le conflictuel et le guerrier sont désormais la norme, le néolibéralisme et l’individualisme remettent en cause les équilibres traditionnels. D’où le besoin de réfléchir sur la perception de ce qu’est la puissance aujourd’hui. Trop souvent, les États et leurs opinions ont une vision imaginaire de la réalité géopolitique, surestimant leurs capacités réelles.
La guerre des puissances des imaginaires nationaux : réflexions sur ce moment post-clausewitzien
Power Struggles and National Fantasies: Reflections on a Post-Clausewitzian Moment
Possession of power is once again central to a world in which conflict and the warrior have become the norm, and in which neo-liberalism and individualism are challenging traditional power balances. We should reflect on what today’s perception of power really is: all too often countries, and the opinions they engender, offer a make-believe vision of geopolitical reality which over-estimates their true capabilities.
Le monde est devenu conflictuel et guerrier. Les opinions publiques et classes dirigeantes, surtout en Occident, n’y sont pas préparées. Cela tient à des raisons matérielles, morales et à un désarroi intellectuel. C’est que les cadres de pensées économicistes et technicistes dominants n’ont pas pu conjurer ce qui advient et réussit à le penser. Ainsi, dans le domaine militaire, on peine à analyser la nouvelle période. Dans ce long tournant de siècle, on assiste à un renversement. Le front arrière devient la ligne de front. La conquête militaire des territoires dépend désormais de la conquête des esprits. C’est que l’influence et la puissance des nations dépendent en dernier ressort, non pas tant de la puissance prodigieuse matérielle et technologique mais de la solidité et durabilité du lien entre gouvernants et gouvernés. La guerre est l’affrontement de puissances des imaginaires nationaux. Voilà ce qui la relie à la paix, sous la conduite du politique.
Je vais, pour des raisons de place, énoncer à grands traits ce qui agit les peuples, caractérise la nouvelle période, le fondement des puissances des imaginaires nationaux, les formes actuelles de leurs confrontations et au travers du cas français ; sa puissance imaginaire à l’épreuve de la guerre en Ukraine.
Néolibéralisme, retour des guerres et puissances imaginaires
Les guerres asymétriques et les progrès technologiques en matière de guerre de l’information et cyberguerres ne sont pas tant les causes de ce qui advient en matière militaire, que les révélateurs et amplificateurs d’un mécanisme latent, caché et profond de ce qui agit les communautés humaines, civilisations et nations depuis leurs origines perturbées par les singularités de la mondialisation actuelle qui entraîne en réaction le retour des guerres. Chaque peuple est mû par un inconscient collectif, un imaginaire pérenne ; une façon de voir, d’être et de faire qui prend des formes religieuses, politiques, sociales et géopolitiques variables pour s’adapter au réel.
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