S’interroger sur ce qui fonde le métier de soldat à notre époque paraît essentiel à l’orée de la consolidation de la professionnalisation ; mais cette recherche impose à la fois d’embrasser avec un grand recul les évolutions à l’œuvre dans notre pays et de plonger dans toute la richesse de la psychologie humaine. Rarement un engagement ne résulte donc d’un faisceau de motivations aussi disparates. Cette étude tente justement d’éclairer ce phénomène de la manière la plus complète possible.
Pourquoi est-on soldat aujourd'hui ?
« L’existence du Soldat est, (après la peine de mort), la trace la plus douloureuse de barbarie qui subsiste parmi les hommes » (1) écrivait Alfred de Vigny. L’engagement d’une personne au sein des forces armées a toujours suscité interrogation et parfois incompréhension ; mais le passage au troisième millénaire semble apporter son lot supplémentaire de questions sur le rôle même de l’armée, voire un certain malaise au sein de l’institution.
On peut penser à un nécessaire temps d’adaptation après le profond bouleversement de 1996 amenant ce grand service de l’État à revoir ses structures de fond en comble. On peut supposer que les problèmes sociaux actuels, la perte de repères, la « crise de l’autorité », l’éclatement de la structure familiale, ont un retentissement non négligeable sur l’armée, émanation de la société. On peut incriminer aussi l’étroitesse des budgets accordés aux forces armées pendant ces dix dernières années, alors que les missions à remplir sont toujours plus nombreuses et diverses, et le matériel à entretenir toujours plus complexe et onéreux.
Au-delà de ces questions, comment peut-on définir le soldat dans l’absolu ? Jouant un rôle social bien défini, il sert dans une armée encadrée et organisée, soumise au pouvoir politique en place, et contribue ainsi à défendre les intérêts de l’État. Il est partie du bras armé de la nation ; il est dépositaire de la force légale. Il se différencie ainsi du mercenaire ou du milicien dont les motivations apparaissent le plus souvent « égoïstes » et d’ailleurs plus simples à cerner (argent, goût du risque…) (2).
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