De l'arsenal à l'entreprise
Ouvrage coécrit par un directeur-général de la Direction des constructions navales (DCN) et le vice-président d’un cabinet d’audit, le cabinet Bearing Point, ce livre présente avant tout le point de vue des artisans même de la réforme du principal acteur des constructions navales en France. Cependant, il ne passe pas sous silence les principaux dysfonctionnements qui ont rendu nécessaire le changement de statut de DCN, qui est intervenu le 30 mai 2003 lorsque la nouvelle entreprise est créée.
Parmi les nombreux handicaps que la DCN a subis, le principal est son statut de direction administrative, qui, d’une part, lui interdit toute souplesse dans le recrutement du personnel et d’autre part, la contraint à appliquer le code des marchés publics dont la rigidité ne contribue pas à mener à bien les négociations commerciales, notamment à l’exportation. À cela s’ajoute également l’absence de personnalité juridique, de comptabilité propre et de compte de résultat qui rend impossible le calcul de tout coût réel.
À partir des années 1970, il n’est plus possible d’ignorer l’archaïsme de ce statut, d’autant plus qu’en 1971, les arsenaux des poudres deviennent une société de droit privé, la Société nationale des poudres et explosif (SNPE), alors que dans le domaine terrestre, la séparation des tâches industrielles et étatiques s’amorce.
C’est bien cette distinction entre le rôle de donneur d’ordres et celui de fabricant, qui a conduit à la séparation des activités étatiques et industrielles ; condition préalable au retour de DCN à la compétitivité.
Cette réforme est d’autant plus nécessaire que dans les années 1970 le plan de charge diminue et oblige la DCN à conquérir des marchés à l’exportation. Dans ces conditions, les contradictions d’une entreprise publique dont l’activité est privée et les lourdeurs du code des marchés publics apparaissent plus clairement.
Aussi, la première étape de la réforme fut la création de DCN International, structure de droit privé chargée de négocier les contrats internationaux à l’exportation. Parallèlement, la confrontation avec la concurrence internationale à l’exportation rend nécessaire d’accepter la vérité des coûts et de créer des structures comptables adéquates. Ce dont a été chargé le cabinet Bearing Point.
Les auteurs soulignent combien le diagnostic porté dans les années 1970 s’est vu confirmé dans les années 1990 lorsque le chiffre d’affaires de DCN passe de 3 milliards à 1,5 milliard d’euros, et que les effectifs passent de 28 000 à 14 000 personnes. Le soutien qu’apportent les recettes d’exportation, qui représentent le quart du chiffre d’affaires, prend alors toute sa signification.
Au terme de cette réforme, les auteurs affichent leur confiance dans l’avenir de l’entreprise, lequel s’annonce européen. Écartant tout rapprochement avec les Chantiers de l’Atlantique à Saint-Nazaire, les auteurs insistent au contraire sur l’intérêt d’un rapprochement avec l’allemand HDW et l’espagnol Izar, et soulignent la nécessité de poursuivre le rapprochement entrepris avec Thalès (1). ♦
(1) NDLR - On a bien là la seule vision de DCN. Il reste à écrire le chapitre des acteurs étatiques, donneurs d’ordres et clients que sont la DGA et la Marine nationale !