Gendarmerie et sécurité intérieure - Le Plan d'adaptation des grades aux responsabilités exercées (Pagre)
Le 27 mai 2004, devant les membres du Conseil supérieur de la fonction militaire, le ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, a annoncé qu’un « plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées » (Pagre) sera mis en œuvre dans la Gendarmerie pour la période 2005-2012. Les gendarmes ont alors découvert le « Pagre » — acronyme empruntant le nom d’un poisson de mer, voisin de la daurade — grâce à plusieurs actions de communication : le déplacement du major général de la Gendarmerie dans les régions (juin 2004), la publication de questions-réponses dans le périodique La lettre aux unités (juin 2004 et novembre 2004), la mise en ligne de deux forums sur gendcom.info (9-21 juin 2004 et 20 septembre-11 octobre 2004), l’envoi de messages explicatifs aux unités, la tenue de réunions de concertation au niveau des échelons territoriaux de commandement et des unités élémentaires, la convocation du personnel concerné par les bureaux des ressources humaines des légions…
Repyramidage
Ce plan a pour objet de transformer jusqu’à 5 000 postes de sous-officiers en officiers (portant leur nombre de 4 063 en 2004 à 9 350 en 2012) et de repyramider le corps des sous-officiers (entre 2004 et 2012 : + 410 majors, + 2 110 adjudant-chefs, + 4 200 adjudants et - 3 590 maréchaux des logis-chefs). Il prévoit certaines évolutions indiciaires pour les sous-officiers, en particulier la possibilité pour les gendarmes n’ayant pas bénéficié de mesures d’avancement de terminer leur carrière au grade d’adjudant, dans le cadre d’une « gestion de fin de carrière » prenant en considération les responsabilités exercées et les formations qualifiantes suivies. Le plan suppose enfin, à titre transitoire, différentes adaptations statutaires concernant les officiers (notamment la majoration de l’âge de recrutement des « officiers rang » de 47 à 52 ans et la suppression de la notion de quota maximum d’« officiers rang » par rapport aux autres recrutements) et les sous-officiers (réduction du temps de séjour dans le grade, notamment de maréchal des logis-chef afin de faciliter l’écoulement de la gestion de fin de carrière). Par ailleurs, une réflexion d’ensemble sur le corps des officiers devrait être engagée concernant, en particulier, les questions de recrutement initial, de formation et de déroulement de carrière.
La première année de mise en œuvre du Pagre (2005) doit ainsi donner lieu aux mesures suivantes (pour un coût de 20,6 millions d’euros) : transformation de 1 000 postes de sous-officiers en officiers ; recrutement de 750 majors supplémentaires lors d’un concours complémentaire et nomination de 160 au choix ; nomination de 2 000 adjudant-chefs, de 2 900 adjudants et de 1 800 maréchaux des logis-chef ; nomination de 600 gendarmes au grade de maréchal des logis-chef au titre de la gestion de fin de carrière.
Une réforme décisive
Dans l’état actuel des choses, il est encore pour le moins prématuré de tirer des enseignements sur la mise en œuvre de cette réforme, notamment s’agissant de son impact sur l’ordonnancement hiérarchique et les relations de commandement. Le Pagre apparaît manifestement comme une réforme décisive, pour ne pas dire capitale, de nature à engendrer des réorganisations et des mutations, mais aussi des inquiétudes et des résistances. Sans présager de sa capacité effective à produire des améliorations significatives ou, au contraire, des effets pervers et dysfonctionnels, le Pagre peut être synthétisé, sur le plan de sa structure générale, de ses objectifs et de ses ambitions, à partir des éléments suivants.
Il s’inscrit dans un contexte de réformes intervenues depuis le début des années 90, à la fois au plan de l’exécution du service (mise en place des centres opérationnels Gendarmerie et des communautés de brigades, modernisation du parc automobile et de l’armement, dotation de moyens informatiques et bureautiques…) et des conditions de travail (attribution des quartiers libres, revalorisation salariale, réduction du temps de travail, développement de la concertation…).
Il entend relever le niveau hiérarchique de commandement des unités élémentaires, en assurant un rattrapage au regard des autres institutions de sécurité, notamment de la police nationale (des officiers subalternes devant ainsi normalement assurer le commandement des communautés de brigades et des brigades autonomes).
Il représente une avancée sociale considérable, en proposant notamment aux sous-officiers de nouvelles perspectives d’avancement et de carrière, en particulier un accès plus important en nombre au corps des officiers.
Il répond au moins partiellement aux revendications salariales du personnel exprimées notamment lors des mobilisations collectives de décembre 2001 (1), les promotions dans les grades supérieurs s’accompagnant, en effet, d’une augmentation de solde prise en compte, de surcroît, pour la retraite.
Il prend en considération les attentes des sous-officiers concernant la mobilité géographique, en faisant en sorte que cette dernière ne devienne plus systématique en cas d’avancement, qu’elle réponde uniquement aux exigences du service et tienne compte des souhaits du personnel. ♦
(1) Cf. « Retour sur la crise de la Gendarmerie », Défense Nationale, chronique « Gendarmerie et sécurité intérieure », mars 2002.