Diplomaties en guerre, sept États face à la crise irakienne
Diplomaties en guerre, sept États face à la crise irakienne
Au cours des quelque sept mois qui ont précédé l’invasion anglo-américaine de l’Irak, en mars 2003, les principales puissances ont dû se prononcer, non seulement sur l’opportunité d’une opération militaire que la plupart d’entre elles ne croyaient pas nécessaire, mais aussi, et surtout, manifester leur solidarité avec les États-Unis et le Royaume-Uni. Celle-ci était toujours mise à plus rude épreuve au fur et à mesure que l’on découvrait l’ampleur de la manipulation de certains faits, les informations tronquées et les « dérapages » ayant conditionné la guerre en Irak ; sous couvert de la preemptive war, et qui semblait inaugurer une nouvelle phase des relations internationales, marquée par une évolution notable du principe de la légitime défense.
La décision de faire ou non, de soutenir ou de critiquer la guerre en Irak est devenue l’un des épisodes clés des relations internationales ; un moment où, face à une seule guerre, se rencontraient de multiples conceptions du monde. Ainsi, la Russie, la Chine, la Grande-Bretagne, la France, membres du Conseil de sécurité de l’ONU, mais également l’Allemagne et le Canada, qui les rejoignent au sein du G8, ont, pour des raisons diverses, choisi leur camp et s’appliquent à agir en fonction d’intérêts géopolitiques qui touchent l’ensemble des acteurs de la scène internationale, avec en ligne de mire, une préoccupation largement partagée de lutter contre le terrorisme.
L’ouvrage met en évidence un jeu de rôles fluctuant, aux intérêts croisés, entre relation transatlantique historique et émergence d’une solidarité européenne, qui se révèle dans les relations bilatérales que les États-Unis entretiennent avec les États évoqués ; de la conception que chacun se fait de la prégnance du droit international et du multilatéralisme et du rôle structurant joué par les Nations unies dans ce contexte.
Les nombreux auteurs de cet ouvrage, la plupart chercheurs et enseignants du Centre d’études des politiques étrangères et de sécurité (CEPES) de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) examinent en détail la position de chacun de ces États et la lecture que leurs dirigeants font du dossier irakien, selon leurs propres opinions publiques et choix indépendants en matière de politique étrangère. Un dernier texte analyse également les réactions des Américains à ces prises de position.
Le mérite de cet ouvrage réside dans les analyses fines de ce nouvel environnement géopolitique ; car la guerre en Irak a durablement affecté les rapports des États-Unis, avec quelques-uns de ses partenaires les plus importants, grandes puissances soucieuses de participer activement au fonctionnement du système international. La guerre en Irak a même créé, dans certains cas, des divisions profondes qui risquent d’avoir des conséquences à long terme pour l’avenir des relations internationales.
Cette démarche comparative est d’autant plus pertinente, qu’elle tient compte minutieusement des fondements d’un nouvel ordre international, caractérisé notamment par la volonté de l’ancrer dans l’unipolarité qu’accompagne la capacité d’adhésion ou de rejet à cette thèse, et de l’irrationalité de certaines décisions prises, du rôle prépondérant joué par l’idéologie et les conséquences internes et externes, en tenant compte par exemple du cadre européen, pour ce qui concerne les trois diplomaties concernées (Allemagne, France et Grande-Bretagne).
Ainsi, la justesse de l’analyse de cet ouvrage réside peut-être dans la conclusion que chaque lecteur pourra tirer de ce rapport de forces nouveau, que l’on pourrait résumer sous le vocable « d’associés-rivaux ».
N’est-ce pas Palmerston, Premier ministre britannique du XIXe siècle, qui rappelait que les nations n’ont pas d’amis, elles n’ont que des intérêts ; c’est aussi vrai que l’ont soit à Ottawa, Washington, Londres, Berlin, Paris, Moscou ou Pékin. ♦