Politique et diplomatie - Le Liban, Pologne du Proche-Orient
Certains États attirent, concentrent sur eux jusqu’à la tragédie les tensions du système international. Complexes, situés au point de rencontre de zones géographiques, de populations, de cultures, ces pays, ouverts par tradition et position, et accédant à une forme d’exemplarité, sont condamnés à la vulnérabilité. Leur équilibre, leur tolérance sont à la merci de forces qui peuvent à tout moment se déchaîner. Telle fut la Pologne des XVIIe et XVIIIe siècles.
Ainsi, le Liban fut regardé comme la Suisse du Proche-Orient. Le pacte national de 1943 (tout comme la Constitution du royaume de Pologne) est bien un modèle, distribuant avec minutie les charges majeures de l’État entre chrétiens et musulmans. Ce système exemplaire — comme toute organisation proche de la perfection — a besoin, pour son fonctionnement, de conditions, elles aussi, exemplaires : à l’intérieur, la stabilité économique et sociale, un consensus édifié par les épreuves ; à l’extérieur, l’accord tacite des pays proches et des grandes puissances pour préserver cette entité privilégiée.
Or, le Liban est d’abord marqué par le plus intime des déséquilibres, celui que crée la démographie. Lors du recensement de 1932 (sur les chiffres duquel est établi le pacte national), les chrétiens représentent 52 % de la population ; en 1983, seulement 43 %. L’augmentation du pourcentage des musulmans (1932 : 48 % de la population ; 1983 : 57 %), est due surtout à la communauté chiite (1932 : un peu moins de 20 % de la population libanaise ; 1983 : 30 %) ; quant aux sunnites et aux Druzes (parti socialiste progressiste de Walid Joumblatt), leur part stagne : les premiers autour de 20 %, les seconds de 6 %.
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