Politique et diplomatie - La troisième métamorphose de l'Asie
En cette fin des années 80, la détente est américano-soviétique. Elle est également européenne. Enfin, elle est asiatique. Là, en émerge une autre, qui se dissocie des schémas Est-Ouest.
Entre Washington et Moscou ou en Europe, la détente est une expérience ancienne, s’esquissant dès les années 50, et connaissant plusieurs renaissances depuis les années 60. Il s’agit d’abord d’organiser, de gérer l’héritage de la Seconde Guerre mondiale ; ainsi que l’a montré la Conférence d’Helsinki (1973-1975), cette détente prend appui sur le statu quo territorial et politique (ainsi que jusqu’à présent sur la division de l’Allemagne). Les alliances, la dissuasion nucléaire enferment cette détente dans des règles du jeu relativement fixes : d’un côté, rien de fondamental — en matière d’armements, de sécurité — ne peut être décidé sans l’accord des États-Unis et de l’Union Soviétique ; de l’autre côté, dans ce cadre, les États européens, et en premier lieu l’Allemagne fédérale, conquièrent une capacité de manœuvre par le dialogue Est-Ouest.
En Asie, l’environnement est profondément différent. L’héritage de la Seconde Guerre mondiale est limité et pourtant capital. Il se résume à trois éléments : appartenance du Japon à la sphère américaine de défense et d’échanges ; occupation des îles Kouriles, au nord du Japon, par l’Union Soviétique ; partage de la Corée entre un État communiste et un pro-occidental protégé par les États-Unis. En cette fin des années 80, c’est cet héritage (tout comme le problème allemand en Europe) qui tend à émerger au cœur de la détente asiatique et des négociations qui pourraient reformuler les équilibres géopolitiques de ce continent. L’Europe et ses deux protecteurs, ne parvenant pas à mettre sur pied un traité de paix à propos de l’Allemagne, ont contourné la difficulté par la consécration quasi juridique des acquis de la guerre (accords d’Helsinki). En Asie, rien de tel, mais plutôt un puzzle en mouvement : la Chine et le Japon ont signé un traité de paix en 1978 ; l’Union Soviétique et le Japon ont « mis fin à l’état de guerre » en 1956. En Europe, la guerre a engendré l’ordre Est-Ouest ; en Asie, elle n’a été qu’une étape dans la naissance, toujours en cours, de ce continent à la modernité.
Il reste 85 % de l'article à lire
Plan de l'article