C’est, je crois, la première fois qu’une journée d’études de notre Comité est consacrée à l’Amérique latine. Il est vrai que ce thème n’est pas aussi familier que d’autres à une grande partie du public français : votre assistance montre cependant la curiosité qu’on en éprouve et je pense que les circonstances imposaient, à beaucoup d’égards, ce sujet.

Parmi les transformations du monde auxquelles notre génération a dû assister, celles qui affectent l’Amérique latine ne sont pas les moins importantes. Qu’il s’agisse de son développement économique, des changements parfois extraordinaires des régimes politiques ou encore des problèmes sociaux, souvent cruciaux, significatifs de notre époque, l’Amérique latine évolue sous nos yeux ; la plupart d’entre nous doivent procéder à l’égard de ce continent à une révision de nombre de leurs certitudes, de leurs analyses, et se décider à approcher une réalité qui pendant très longtemps fut différente de celle qui se présente sous nos yeux.

Il est juste de dire que pendant fort longtemps notre appréciation de l’Amérique latine fut marquée par la sensibilité que nous avions des événements qui s’y produisaient, sensibilité qu’il ne faut pas renier car il n’y a aucune raison de l’oublier. À quelques jours de l’anniversaire de la mort de Georges Pompidou, je ne peux qu’évoquer ici la décision qu’il avait prise d’attribuer la Légion d’honneur au grand poète chilien Pablo Neruda alors que celui-ci était enfermé dans sa propre maison sur le point de mourir, et l’image de notre ambassadeur, M. de Menthon, traversant les rangs de la police pour aller lui remettre cette décoration est restée gravée dans mon esprit. Il ne faut pas non plus oublier les jugements ou réactions que nous avons eus face aux événements qui se sont produits là-bas au cours des dernières décennies, niais ce n’est pas une raison pour que nous ne soyons pas capables de révision, de réappréciation. C’est pourquoi il nous a paru important de consacrer cette journée à l’Amérique latine. Pour traiter ces différents thèmes, personne n’était mieux qualifiée que M^me Andrée Martin-Pannetier, docteur en droit, membre de notre conseil et qui s’est tant consacrée aux études concernant l’Amérique latine ; aussi je lui ai demandé de présenter l’ensemble des travaux de cette journée. Ensuite, le professeur René-Jean Dupuy, membre de l’Institut, professeur honoraire au Collège de France, évoquera le mouvement des idées et les forces politiques ; le général Yves Salkin axera son exposé sur les armées et le pouvoir politique.

Cet après-midi, nous entendrons successivement le RP Pacho Roca, de la Société de Jésus, sur les données ethniques et les questions sociales ; mon ami Bruno Moschetto dont j’ai pu, il y a quelques mois encore, apprécier sur place l’extrême compétence comme ministre conseiller à Mexico et chargé des représentations financières de la France dans l’ensemble de l’Amérique du Sud, viendra nous parler du bilan des expériences économiques actuellement menées ; enfin, M. Jorge Elena, représentant spécial en Europe de la Banque interaméricaine de développement, nous parlera de la place de l’Amérique latine dans l’économie mondiale.

Comme chaque année en ce qui concerne les actes de cette journée d’études, leur richesse nous conduit à les publier en deux livraisons : 1^er juillet et 1^er août. ♦