Il n’y a de vraies surprises que pour qui refuse de s’informer ou fait preuve de distraction ou de désintérêt. L’analyse prospective des services compétents et leur perspicacité sont rarement prises en défaut. Ce qui est coupable n’est pas tant d’être pris par surprise que d’être neutralisé par saisissement et démuni par impéritie.
Surprises sans surprise, mais pas sans risques
Surprises without surprise, but not without risk
Real surprises only happen to those who refuse information or who allow themselves to be distracted or uninterested. The perspicuity and analytical abilities of the competent services are rarely found wanting. Guilt lies not so much in being taken by surprise as in being neutralized by shock and disarmed by ineptitude.
Il ne se passe guère de semaines sans qu’un discours d’une autorité militaire ne s’ouvre en faisant référence à la désormais fameuse « surprise stratégique ». Celle-ci serait éminemment représentée par la survenue de la crise financière de 2008 ou par l’explosion du « printemps arabe » cette année.
Bien entendu, il n’en est rien : ces deux « surprises » étaient parfaitement lisibles dans les documents de prospective élaborés par les propres services de ces autorités : on pourra trouver la mention de l’hypothèse de la crise financière déclenchée par une crise immobilière américaine à la page 92 du document Prospective géostratégique à l’horizon des trente prochaines années, édité par la Délégation à l’information et à la communication de la Défense (Dicod) en avril 2008 et qui reprenait des travaux diffusés au sein du ministère en 2007 ; quant à la survenance possible des événements communément dénommés aujourd’hui « printemps arabe » avec un optimisme dont on espère qu’il ne sera pas trop vite démenti, elle est mentionnée à titre d’hypothèse de rupture dans ce même document, à la page 45, et assez bien détaillée dans un autre document, intitulé Préparer les engagements de demain, édité par la Dicod en juin 2007, à la page 36.
De surprise, donc, point. Tout au plus distraction ? Ou manque d’intérêt de la part des autorités à l’égard de ce type de travaux ? Elles ne sont du reste pas les seules victimes de ce genre de myopie : on se souvient comment les attentats du 11 septembre 2001 ou la catastrophe de l’ouragan Katrina en 2005 ont laissé littéralement bouche bée un président Bush dont les services disposaient pourtant de tous les signaux précurseurs possibles, y compris dans le cas de Katrina, de scénarios détaillés allant jusqu’à décrire la situation humanitaire catastrophique qui se développerait parmi les réfugiés dans le Superdome de La Nouvelle-Orléans.
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