Dans cet exposé, nous distinguerons : 1° la réforme agraire ; 2° l’industrialisation et, corrélativement, les communications et les grands travaux ; 3° les réformes sociales : émancipation de la femme, structure de la famille, langage et écriture ; 4° le sort des minorités nationales.

1° La Réforme agraire

Première en date et en importance, la réforme agraire. De celle-ci ou de l’industrialisation, laquelle mériterait de se voir réserver la priorité ? Il y eut, avant le 1^er octobre 1949, à l’échelon des organismes supérieurs du Parti, d’innombrables discussions. Si la « ligne » paraissait sinueuse aux yeux des étrangers qui ne concevaient pas que l’on pût faire marcher au même rythme, pari passu, dix millions d’ouvriers et cinq cents millions de paysans vers le socialisme, elle ne l’était pas tellement pour les chefs chinois. Ceux-ci ne devaient ni ne voulaient (ne doivent ni ne veulent) s’aliéner les paysans ; et ils prétendent conférer à la classe ouvrière la direction de la révolution. L’opposition dans les termes, la recherche de l’absolu ne sont jamais pour eux des obstacles insurmontables. Le pendule oscille-t-il tantôt vers la campagne, tantôt vers la ville ? L’art des chefs s’accommode d’impératifs contradictoires ⁽¹⁾. On exige beaucoup des paysans, mais on leur promet davantage ; en même temps qu’on recrute les membres du Parti, plutôt que dans les villages, dans la classe ouvrière. (Des chiffres récents seraient requis qui exprimeraient utilement l’origine des membres du Parti, la représentation des classes de la base au sommet.)

La réforme agraire, dans la septième année de la République populaire, apparaît comme une opération compliquée, en deux temps : elle figurait certes au programme du Kouo-min tang, comme à celui du Parti communiste, dès 1927 ; mais n’avait-on pas réclamé en Chine, depuis l’origine, « une » réforme agraire ? Henri Maspero, dans ses Études Historiques (1950, Histoire des régimes fonciers, p. 149-192) présente ces durables observations :