Les femmes en Union soviétique : leur rôle dans la vie nationale
Basée sur des sources soviétiques – en particulier sur le dépouillement de la presse – cette étude fait un tableau très complet de la condition féminine en URSS.
Principe de l’égalité absolue des hommes et des femmes devant la loi et devant la vie ; excédent considérable de la population féminine sur la population masculine (il était de plus de vingt millions au recensement de 1959) telles sont les deux données de base. On peut y ajouter une troisième : la situation diminuée dans laquelle se trouvaient les femmes au moment où éclata la Révolution d’Octobre.
L’application stricte du principe rappelé plus haut a conduit à une double impasse : d’une part, les conséquences d’unions conclues et dissoutes à volonté ont été lamentables pour la moralité publique et pour les enfants nés de ces mariages insuffisamment soudés ; d’autre part, il a bien fallu reconnaître à l’expérience qu’il était impossible d’effacer les différences biologiques et d’exiger des femmes le même travail que celui qui était demandé aux hommes. La loi soviétique est donc revenue à des conceptions moins tranchées ; elle a consolidé le mariage en rendant le divorce difficile ; elle a codifié les règles du travail. En ce domaine, l’évolution ne semble pas encore suffisante, et l’opinion éclairée demande que de nouvelles mesures soient prises pour mieux adapter le travail des femmes à leur nature et à leurs obligations traditionnelles.
Le résultat de cette évolution est incontestablement une élévation intellectuelle de la femme ; l’analphabétisme féminin a disparu, et une participation des femmes aux activités sociales et professionnelles les plus diverses est devenue de plus en plus grande. Dans la vie politique, si les femmes ne participent encore qu’en faible proportion aux instances dirigeantes du parti, elles apparaissent dans les soviets divers dans une proportion du tiers (il est vrai que ces soviets n’ont pas grande influence, sinon sur le plan purement local). Dans la vie économique, les femmes forment la majorité des travailleurs de kolkhozes, près de la moitié des travailleurs de l’industrie, mais les trois quarts du personnel enseignant dans les classes primaires et une très forte proportion des cadres sanitaires. Elles ont une place importante dans la vie intellectuelle et artistique.
Toutefois, cet exposé statistique ne rend pas compte de la vie des femmes et ne permet pas une comparaison avec celle qu’elles mènent dans les pays occidentaux. C’est dans le texte même du livre, dans les mille anecdotes ou exemples que cite l’auteur, qu’il faut trouver les éléments d’une telle comparaison. La vie reste dure pour les femmes en URSS, malgré les progrès statistiques, parce qu’il reste encore beaucoup à faire dans le domaine de l’habitat, de la distribution des marchandises, de l’équipement ménager. Les tâches humbles et harassantes dont les femmes d’Occident commencent à se trouver largement libérées sont encore le lot des femmes soviétiques, mis à part une poignée de privilégiées, épouses des hommes de la caste dirigeante.
Le livre d’André Pierre est facile à lire, très intéressant. Au-delà du sujet qu’il traite, il donne un tableau de la vie en pays soviétique, tableau qui corrobore les témoignages les plus objectifs dont nous disposons pour savoir comment on vit au-delà du Rideau de fer. ♦