Armée de terre - Le plan de modernisation de la fonction personnel
Le Plan de modernisation de la fonction personnel (PMFP), lancé en 1989, entre maintenant dans sa phase terminale. Ce plan a vu le jour suite à une étude nécessitée par le renouvellement du système d’information de la Direction du personnel de l’Armée de terre (DPMAT) et faisant clairement apparaître le besoin de moderniser la fonction personnel de l’Armée de terre. La décision de mettre en œuvre ce plan a été prise par le ministre de la Défense le 18 juin 1991.
Les buts majeurs poursuivis par le PMFP sont les suivants : unifier la fonction personnel, c’est-à-dire permettre à une seule autorité d’avoir la maîtrise de l’ensemble de la fonction ; hisser la fonction « ressources humaines » au même niveau que les fonctions « équipement » et « organisation » ; replacer les différents acteurs dans leurs rôles respectifs au sein de la chaîne personnel ; donner les moyens à l’État-major de l’Armée de terre (EMAT) d’élaborer une politique des personnels en ayant une vision à long terme et de définir des objectifs réalistes à moyen terme aussi bien à la DPMAT qu’au Commandement des organismes de formation de l’Armée de terre (Cofat) ; permettre à chaque acteur d’assurer le suivi de ces objectifs.
C’est dans cette optique qu’a été développé un nouveau système informatique entièrement intégré relié à une base de données et à un référentiel communs ; tous les acteurs de la fonction personnel sont ainsi reliés entre eux par une chaîne d’informations parfaitement cohérente utilisant un unique et même langage.
Le PMFP est donc un projet ambitieux et d’une ampleur sans précédent entraînant une nouvelle approche des problèmes et de nouvelles méthodes de travail et d’organisation. La maîtrise d’œuvre en a été confiée à un groupement d’intérêt économique. La maîtrise de l’ouvrage a été confiée à la Mission fonction personnel (MFP), bureau créé spécialement à cet effet et assisté par des personnels d’un cabinet de consultants. Une structure de conduite du projet a également été mise en place avec un comité directeur, un comité exécutif et de nombreux experts et utilisateurs.
Un des premiers changements visibles a été la création, à l’été 1992, de la division Organisation ressources humaines (ORH) au sein de l’EMAT et la transformation du Bureau effectifs personnels (BEP) et du Bureau mobilisation organisation (BMO) en Bureau planification des ressources humaines (BPRH) et Bureau organisation effectifs (BOE). L’organisme destiné à unifier la fonction personnel et à lui donner le poids qui lui revenait était ainsi créé.
Une autre étape majeure a été franchie avec la mise en place du descriptif de l’Armée de terre en termes de compétences : ont été ainsi décrits des grands corps de métiers appelés « domaines de spécialités », et des métiers appelés « natures de filières ». La notion d’emploi a ensuite été développée pour définir le déroulement de carrière dans chacun de ces métiers. L’emploi se caractérise par une plage de grades, une formation reçue et une durée de vie minimale. Il représente donc un niveau de compétences et une étape dans la carrière à l’intérieur de chacun des métiers. L’emploi tient une place centrale dans le PMFP aussi bien en prévision qu’en gestion et il a fallu plusieurs mois de travail pour classifier la ressource existante et décrire les besoins de l’Armée de terre en termes de métiers et d’emplois ; mais cela fait, il devient impossible de déterminer l’évolution souhaitable de la ressource pour qu’elle puisse satisfaire les besoins définis à moyen ou à long terme.
C’est à partir de cette notion d’emploi qu’a été développé le système informatique du PMFP. Mis en place progressivement dès 1993, il vise à fournir une aide aux décideurs dans trois domaines principaux : la prévision, la gestion et la formation. Un instrument de pilotage de l’action complète ce dispositif et permet à chaque acteur de suivre les objectifs par des indicateurs adaptés.
La prévision
Toute la problématique de la prévision répond au souci de permettre à l’EMAT de donner des objectifs fiables et réalistes aussi bien à la DPMAT qu’au Cofat. À partir d’une maquette d’effectifs à long terme, trois systèmes informatiques travaillant par propagation de contraintes calculent l’évolution que doit suivre la ressource, année par année, pour satisfaire les besoins à l’horizon de la maquette. À chacune des étapes du processus et en fonction de critères qui lui sont propres, le décideur doit valider la solution proposée par chacun des systèmes ; c’est à lui qu’il appartient de paramétrer les données introduites pour que la solution proposée soit à la fois réaliste et réalisable. Tout ce travail se fait au BPRH en liaison étroite avec le BOE et avec la DPMAT/études générales (DPMAT/EG). Au terme du processus, le BPRH est en mesure de donner à la DPMAT des objectifs en emplois, année par année, pour les dix ans à venir. Comme emploi et formation sont étroitement associés, il est également capable de donner au Cofat des objectifs de formation, année par année, au même horizon.
La gestion
Les objectifs en emplois étant connus, la DPMAT/EG va devoir déterminer, bureau de fonction par bureau de fonction, l’évolution que devra suivre la ressource pour que ces objectifs soient atteints. Elle dispose pour ce faire d’un système informatique d’aide à la décision qui lui permet d’élaborer sur cinq ans ses propres objectifs. Les bureaux de fonction sont chargés, quant à eux, de mettre en œuvre, en gestion, les objectifs reçus du bureau études générales. Pour faciliter leur travail, le PMFP a prévu de nombreux logiciels d’aide à la gestion qui seront opérationnels à la fin de l’année et qui serviront aussi bien pour l’avancement et la notation que pour l’orientation, l’affectation ou la mise en formation des personnels qu’ils gèrent.
La formation
Ayant reçu ses objectifs de formation pour les années à venir, le Cofat est en mesure d’élaborer le plan de charge de ses écoles. Ces dernières mettent au point leur planification et la communiquent au Cofat qui peut alors rédiger le calendrier des actions de formation et le transmettre à la DPMAT. Des systèmes informatiques, en cours de développement, permettront au Cofat de disposer d’une aide considérable tant pour l’établissement du plan de charge des écoles que pour la rédaction du calendrier des actions de formation.
Il est important de souligner que la prévision permet de donner en parallèle à la DPMAT et au Cofat des objectifs parfaitement cohérents entre eux puisqu’à chaque changement d’emploi est liée une action de formation. Ces deux organismes disposent en outre du même descriptif des emplois de l’Armée de terre contenant toutes les passerelles entre ceux-ci et les formations associées. On le voit, le référentiel et le langage communs sont un gage de cohérence et d’efficacité pour tous les acteurs de la fonction personnel ; c’est là encore un des apports essentiels du PMFP.
Le pilotage de l’action
C’est une notion nouvelle pour l’Armée de terre qui se déduit de façon évidente des concepts élaborés par le PMFP. En effet, à partir du moment où est mise en place une gestion par objectifs, il devient nécessaire de vérifier leur réalisation, ne serait-ce que pour prendre les mesures correctrices qui se révéleraient indispensables, voire pour réestimer les objectifs eux-mêmes. C’est pourquoi il a été décidé de prévoir un système informatique dédié au pilotage de l’action. Chaque acteur de la fonction personnel amené à fixer des objectifs disposera sur micro-ordinateur de tableaux de bord regroupant des indicateurs adaptés qui lui permettront, mensuellement ou trimestriellement selon le cas, de voir où il se situe par rapport à l’objectif et de déterminer s’il doit ou non prendre des mesures correctrices ou remettre en cause l’objectif s’il se révèle irréaliste.
Ce bref survol du PMFP permet de constater l’ampleur du changement dans la façon de prendre en compte le domaine des « ressources humaines » au sein de l’Armée de terre. Donnant à chacun des acteurs la possibilité de disposer des moyens pour assurer pleinement son rôle, à l’EMAT celle d’anticiper les besoins et de définir une politique réaliste prenant davantage en compte l’ensemble des compétences des personnels et mettant à la disposition de tous une base de données commune, le PMFP constitue un formidable défi et un progrès majeur pour l’Armée de terre. C’est, dans son domaine, le plus gros projet européen de l’après-guerre. Il n’a pu être mené à bien que grâce à la volonté des plus hautes autorités militaires et l’implication totale des acteurs dans chacune des phases de son développement. ♦