« Dans le monde où nous vivons, l’indépendance est un mot, car tous les pays sont à la fois indépendants et dépendants. Quand on est indépendant d’un pays, on est forcément dépendant d’un autre » Charles de Gaulle, 8 février 1961 (Jean Lacouture : De Gaulle ; 3. Le souverain ; 1986, p. 148).
Politique et diplomatie - Faut-il nous débarrasser du mot « indépendance » ?
Peu de peuples éprouvent autant que le nôtre le besoin de sacraliser ce qu’ils font et ce qu’ils sont par des mots. Celui d’indépendance, légué par les années gaulliennes, fait aujourd’hui partie de ces termes intouchables dont la signification n’est jamais très claire, mais qui ont le mérite d’asseoir un consensus ou au moins de faire croire qu’il existe.
Cet attachement à des mots confère une valeur absolue, intemporelle à ce qui n’a de sens que par rapport à une situation donnée. Ainsi, dans les années 30, l’Entente cordiale, le lien vital avec la Grande-Bretagne, s’est-elle pervertie : rien ne pouvait être entrepris à Paris sans l’accord de Londres. De même, au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la mystique de l’Empire, de l’Union française oubliait-elle simplement que l’Europe était le grand vaincu du conflit, que la planète avait changé… Derrière cette rigidité, il y a, semble-t-il, autant de crispation sur un pouvoir vidé de substance que l’intuition confuse d’une trahison, d’une injustice : le monde indifférent, en se transformant, se moquerait de la France, de sa nature inaltérable ! D’où l’opposition souvent mentionnée et quelque peu contestable entre le sentimentalisme français et le réalisme britannique : d’un côté, le Royaume-Uni se résignant à être le second, le préféré des États-Unis ; de l’autre, la France s’obstinant à demeurer la première, sinon en puissance, au moins en indépendance.
L’indépendance de la France
Cette notion d’indépendance de la France s’organise en cercles concentriques.
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