Publiées régulièrement, ces analyses inédites d’ouvrages sont en accès libre, tout comme les recensions publiées dans l’édition mensuelle.
En partant du constat initial qu’en dépit des nombreuses affirmations politiques selon lesquelles « Nous sommes en guerre », surtout depuis les attentats de 2015, la plupart des responsables occidentaux « n’ont pas compris ou ne veulent pas comprendre » la nature du conflit auquel nous sommes confrontés. Le général Jean-Bernard Pinatel recherche dans le temps long les formes et les manifestations de ce radicalisme islamique qui « mène depuis trois siècles une guerre révolutionnaire à finalité religieuse » contre ce qu’il désigne comme les apostats, les croisés ou les ennemis de l’islam.
Dans les années 1850-1860 émerge en Russie un nouveau groupe social, l’intelligentsia, ouvert à la pensée politique occidentale tout en conservant les réserves exprimées par les slavophiles envers la culture libérale-bourgeoise européenne. Publié en 1863, Que faire ?, le roman initiatique de Tchernychevski influencera des générations entières de révolutionnaires russes, et sera déterminant sur le parcours politique du jeune Lénine, qui le lit pour la première fois à quatorze ans. Le révolutionnaire bolchévik considérait d’ailleurs son auteur comme « le plus grand et le plus doué des représentants du socialisme avant Marx », au point de donner à l’un de ses textes politiques emblématiques ce même titre de Que faire ?
La (re)lecture de cet ouvrage, paru en 2008, à la suite du conflit russo-géorgien est particulièrement enrichissante au vu des incertitudes qui caractérisent les relations actuelles entre l’Occident et la Russie. Laure Mandeville, grand reporter et correspondante du journal Le Figaro en Russie de 1997 à 2000, a couvert, à ce titre, les nombreuses crises qui ont secoué le monde post-communiste. Forte de cette expérience, elle livre avec clarté, dans La Reconquête russe, une analyse rétrospective de l’évolution politique de la Russie post-soviétique.
C’est en Arménie que l’on trouve les plus anciennes traces d’activité viticole, elles remonteraient à 6 000 ans. On trouve ensuite la vigne au Moyen-Orient et en Égypte, puis en Grèce (Alexandre le Grand serait d’ailleurs mort d’un excès de boisson) et en Italie. C’est dire si l’histoire du vin que nous relate Didier Nourisson est intimement liée à l’histoire de l’Europe et de la France en particulier. La tradition européenne du « porter de santé » proviendrait ainsi des libations faites aux dieux par les Grecs.
Ancien grand reporter à La Croix et à L’Express, Bernard Lecomte a couvert en direct les quinze dernières années de la fin du communisme. Il s’est passionné pour les deux lieux de pouvoir les plus mystérieux de notre temps : le Vatican et le Kremlin. On lui doit notamment une magistrale biographie de Mikhaïl Gorbatchev parue chez Perrin en 2014.
Le Centre d’étude et de prospective stratégique (CEPS) a saisi l’opportunité des échéances électorales de ce printemps pour refaire un point de situation sur l’état de notre défense après une première publication en 2012 intitulée La défense sans fard.
Le milieu marin a toujours été considéré comme difficile, voire hostile pour l’homme, et chaque avancée significative dans la conquête des océans a nécessité à la fois une forte volonté et une maîtrise des techniques les plus avancées.
Auteur en 2009 d’un premier ouvrage [1] sur le leadership, le contrôleur général des armées Daniel Hervouët nous livre ici sous forme épistolaire une réflexion philosophique et pratique à destination de la vaste communauté des formateurs de futurs chefs. « Encore l’autorité ! » pourrait-on dire ? Il est vrai que le thème ne manque pas d’être abordé par les hommes politiques – le plus souvent sans réelle consistance – et que les ouvrages récents sur le sujet ne manquent pas [2].
Alexandre Jevakhoff, dont une biographie de Mustafa Kémal (1989) et un ouvrage sur l’histoire des Russes blancs (2007) ont déjà été remarqués par la critique, reconnaît d’emblée que la guerre civile russe « est l’un de ces événements historiques qui paraissent susciter la subjectivité ».
En plus de 500 pages et 13 chapitres disposés en ordre chronologique depuis l’affrontement naval entre les navires de Jean-Sans-Terre et ceux de Philippe-Auguste, au début du XIIIe siècle, jusqu’à l’époque contemporaine, ce travail est destiné à un large public souvent peu ou mal informé de l’histoire maritime.
Les Pirates contre Rome est un véritable ouvrage d’historien comportant de solides références aussi bien aux œuvres littéraires et historiques grecques et romaines qu’à toutes les ressources iconographiques qu’offrent les musées en ce domaine. L’auteur met ainsi en évidence l’importance que les pirates ont pu avoir dans le monde antique, évoquant les réactions que la piraterie suscitait à tous les niveaux de la société.
« Un ami bouquiniste à l’esprit vif-argent m’interpelle un jour d’hiver et m’apprend que sa fille souhaite savoir ce qu’est la diplomatie, car elle songe à devenir diplomate. Quel ne fut pas mon étonnement lorsqu’il ajouta qu’elle était en classe de seconde, donc fort jeune, encore assez loin des études supérieures. Deux heures de conversation avec cette jeune fille m’ont peu après suffi pour comprendre qu’elle n’avait pas perdu de temps et que son esprit s’était affûté au contact des meilleurs auteurs… ».
À un moment de conflits ouverts et de menaces fondées sur la stratégie islamique de la terreur, ce livre permet de comprendre les événements dont la Libye a été le théâtre depuis le Printemps arabe en 2011 et l’élimination du colonel Kadhafi qui la gouvernait dictatorialement depuis 1969. Il avance également quelques hypothèses prospectives qui prolongent une histoire du « temps présent », elle-même saisie dans la logique de l’insertion en 1835 de ce pays sur l’échiquier de la question d’Orient ; et sur ce point, l’auteur consacre (trop ?) de nombreuses pages explicatives.
L’auteur a fait ses preuves d’historien, sa bibliographie en atteste, elle est pour l’essentiel consacrée au Maghreb, plus particulièrement au Maroc. Mais l’ouvrage dont il est ici question n’est pas un livre d’histoire. L’auteur le reconnaît lui-même puisque dans son introduction il le baptise « essai », destiné à « interroger le moment de la « décolonisation », ses acteurs et sa réalité. ».
Dans cet ouvrage, qui lui a été inspiré par ses enfants, Dominique Moïsi poursuit sa réflexion sur le monde, qu’il avait entamée dans La Géopolitique de l’émotion (2008) : comment les cultures de la peur, de l’humiliation et de l’espoir façonnent le monde dont il s’était employé à cartographier les émotions. Plus d’espoir en Asie derrière la croissance économique de la Chine et de l’Inde, plus d’humiliation dans le monde arabo-musulman, plus de peur en Occident de l’Europe aux États-Unis. Ce nouvel essai sur la géopolitique des séries prolonge et actualise sa réflexion d’hier. À l’heure de la mondialisation, la série télévisée est devenue, une, sinon « la » référence culturelle universelle, inévitable même, pour qui s’attache à analyser l’émotion du monde.
Julian Lindley-French, vice-président de l’Association du Traité de l’Atlantique (ATA) et William Hopkinson, ancien directeur adjoint du Royal Institute of International Affairs (Chatham House) et ancien Secrétaire d’État adjoint au ministère de la Défense britannique, s’attellent dans cet ouvrage à proposer une vision cohérente des évolutions géostratégiques au Moyen-Orient et à présenter un plaidoyer pour une nouvelle stratégie audacieuse, qui permettrait de mettre fin aux multiples déchirures que connaît cette région.
Contrairement à ce que son titre semble suggérer, le livre du général Walter Warlimont n’est ni un livre de souvenirs, ni un livre d’histoire, mais un livre sur la prise de décision au niveau stratégique. Adjoint de Jodl, le chef des opérations à l’état-major général de la Wehrmacht (OKW), l’auteur nous permet de comprendre comment à partir de 1941, les échecs successifs des armées allemandes prennent leur source dans un processus décisionnel incohérent où toute décision émane d’Adolf Hitler, chef suprême des armées depuis 1938, lequel à la différence d’un Moltke, « au calme inébranlable » en 1866 et 1870, est guidé par ses émotions et non par une réflexion stratégique rationnelle.
Au milieu du siècle dernier, L. H. Parias avait rassemblé de multiples spécialistes pour une « Histoire universelle des explorations » qui donnait la somme des découvertes d’un monde désormais fini. Avec cette nouvelle « Histoire universelle de la navigation », l’amiral Bellec rassemble à lui seul la somme de ses retours d’expérience, assise sur l’érudition encyclopédique que lui apportent les résultats d’une école française d’histoire maritime, animée en son temps par Michel Mollat du Jourdin, aussi bien que la masse documentaire que fournissent les auteurs Portugais et Anglo-Saxons, entre autres, du dernier demi-siècle ; ainsi peut être rénovée l’ancienne approche du commandant Marguet, dans sa propre « Histoire générale de la navigation ».
Si le passage du tsarisme au communisme marque bien une rupture dans la perception de la question russe par les militaires français, cette césure est moins brutale et complète qu’il n’y paraît et ses causes sont trop complexes ou diverses pour être réduites au seul jeu des facteurs idéologiques et politiques. Il serait donc erroné de croire qu’avant octobre 1917 l’armée française est russophile, et qu’avec la révolution bolchevik elle devient immédiatement et irrémédiablement soviétophobe.
Les deux auteurs de l’ouvrage ont été co-commissaires de l’exposition Pompidou, 1911-2011, aux Archives nationales. Jean-Pierre Bat, archiviste paléographe, agrégé et docteur en histoire, est détaché aux Archives nationales comme responsable du fonds Foccart. Pascal Geneste, archiviste paléographe et conservateur en chef du patrimoine, est directeur adjoint des Archives de la Gironde. Il a été responsable du fonds Pompidou et des fonds de ses collaborateurs.
Il n’est plus besoin de présenter Bruno Tertrais, maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) et spécialiste reconnu du nucléaire. Cela fait quelque temps que l’on observe son désir de s’échapper de cette étiquette et cet ouvrage en est le signe le plus visible : rédiger un atlas, s’intéresser aux frontières, voici un bon moyen de s’évader et de sortir de ses propres frontières intellectuelles.
Lorsqu’éclate la révolution ukrainienne, en février 2014, Ioulia Shukan, chercheuse en sociologie politique, maître de conférences à l’université Paris-Ouest, est sur le terrain. À Kiev, sur le Maïdan Nezalezhnosti en ukrainien, devenue depuis synonyme du combat pour la liberté, la démocratie, ou la dignité humaine ou dans l’Est de l’Ukraine touchée par l’insurrection, elle multiplie les enquêtes, les contacts avec les protagonistes du drame.
En Palestine, juifs et musulmans ont pendant des siècles vécu ensemble avec harmonie. Lors du partage décidé par l’ONU dans sa résolution du 29 novembre 1947, votée entre autres par l’URSS en deux territoires distincts, l’un arabe, l’autre juif, Jérusalem devant constituer un corpus separatum, cette cohabitation s’arrêta brutalement. Il s’ensuivit une série de guerres israélo-arabes, 1948-1949, 1956, Six Jours en 1967, du Kippour en octobre 1973, sans parler des incursions israéliennes au Liban (1978, 1982, 2006) ou les différentes intifada, dont la première éclata en 1987. Si l’on fait remonter l’antagonisme judéo-arabe/palestinien aux révoltes de 1930 contre les conclusions de la Commission Peel, qui préconisait une ébauche de partage, on peut bien parler d’une guerre de Cent ans ! Juifs et arabes sont-ils condamnés à une guerre sans fin ?
L’émergence des États au sortir du Moyen Âge a progressivement conduit à une réduction des violences privées. Le tournant civilisationnel qui s’est traduit jusque-là par un refoulement de la pulsion de mort qui a pris la forme d’un monopole de l’État sur les guerres et d’une pacification diplomatique, semble de nos jours enrayé. Cela tient à l’affaiblissement des acteurs étatiques, discrédités et contestés parce qu’ils ne sont plus en mesure d’intervenir comme instances légitimes de régulation et de protection.
Il y a en effet fort longtemps que l’on attendait en langue française une véritable biographie du théoricien militaire le plus important de l’époque moderne. On ne disposait jusqu’à présent que de la monographie de Paul Roques (Le général de Clausewitz), publiée pour la première fois en 1912 et rééditée en 2014 (Astrée, 160 pages). Quant à l’ouvrage souvent cité de Raymond Aron (Penser la guerre, Clausewitz, 1976), il permettait surtout à son auteur de développer ses thèses sur la dissuasion nucléaire et ne consacrait en réalité qu’une place assez réduite à la vie du général prussien. Bruno Colson, professeur à l’université de Namur et spécialiste de la stratégie de la période napoléonienne, répare cette carence avec brio.
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