Publiées régulièrement, ces analyses inédites d’ouvrages sont en accès libre, tout comme les recensions publiées dans l’édition mensuelle.
Les cartes sont présentes quotidiennement dans les journaux, les médias, pour décrire la genèse et le déroulement des conflits, l’impact des changements climatiques, les flux migratoires, les espaces économiques, comme le résultat des élections. Au point que l’on puisse dire qu’il n’y a pratiquement plus de géopolitique, de géoéconomie ou de géostratégie sans cartes. Si la Grande-Bretagne a ravi le Canada à la France au XVIIIe siècle, cela est dû en partie grâce à l’excellence des cartes de James Cook, le plus prestigieux des navigateurs de l’histoire.
Professeur d’histoire contemporaine spécialiste du fait religieux, Guillaume Cuchet s’empare avec ce sixième ouvrage du « dossier » de la spectaculaire chute du catholicisme en France au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Car s’il est connu et incontestable, ce récent phénomène de notre histoire sociale reste paradoxalement mal expliqué et objet de nombreuses idées simplistes. Aussi, dans cet essai aux allures de thèse, l’auteur délivre une analyse sociologique et historique à la fois rigoureuse et passionnante pour montrer comment et surtout pourquoi notre pays est passé en l’espace de quelques décennies d’une génération à 94 % de baptisés et 25 % de pratiquants dominicaux au début des années 1960 à des taux respectivement de 30 % et 2 % aujourd’hui.
Le Second Empire n’a pas bonne presse. Commencé par un coup d’État, et terminé par un désastre militaire sans précédent, il est resté marqué par son caractère autoritaire, ses combinaisons personnelles et financières. À Bordeaux, Napoléon avait dit « l’Empire c’est la paix, mais outre Sedan, ce furent les expéditions militaires en Italie, et au Mexique. Mais fut-il sinistre, comme l’a jugé en 1985, l’écrivain communiste André Stil dans sa préface à L’Insurgé de Jules Vallès ? Si on ne veut pas, mettre en avant, écrit Gérard Unger, la musique d’Offenbach, les tableaux de Manet, ou les sculptures de Carpeaux, on peut rappeler le droit de grève, la transformation et l’embellissement de Paris, le développement du chemin de fer. On peut y ajouter la politique arabe de l’empereur, le percement du canal de Suez et tous les efforts déployés, pour sortir la France de son repli sur soi, de ses archaïsmes, notamment en concluant un traité de libre-échange avec la Grande-Bretagne. C’est surtout la politique extérieure du Second Empire à laquelle l’auteur consacre un tiers de son livre, qui nous retiendra. On peut schématiquement la découper en trois périodes.
L’expression de « grand argentier » désigne traditionnellement le « ministre des Finances » sous l’Ancien Régime. L’image de Nicolas Fouquet vient immédiatement à l’esprit, puis celle d’Enguerrand de Marigny (en particulier pour ceux qui ont lu Les rois maudits de Maurice Druon), mais aussi celles de Jacques Cœur, de John Law et de Necker. L’ouvrage de Françoise Kermina nous relate évidemment la vie et le destin tragique de ces financiers célèbres, mais nous fait aussi découvrir d’autres figures moins connues, mais non moins pittoresques. Ainsi la figure de Sébastien Zamet (1547-1614), banquier italien d’Henri IV, et dont, selon la rumeur publique, il partageait les maîtresses ; celle de Laborde (1724-1794), exécuté pendant la Terreur, en tant qu’ancien fermier général ; celle du munitionnaire Ouvrard (1770-1846) qui bâtit une scandaleuse fortune sur les fournitures des armées françaises de la Révolution et de l’Empire.
Paru en septembre 2011, cet ouvrage s’attache à expliquer comment la désignation d’un ennemi officiel par une entité étatique permet de légitimer le recours aux armes. Pierre Conesa dresse une étude sociologique appuyée de nombreux exemples afin de mettre en évidence le processus politique de qualification puis de diabolisation de cet adversaire permettant la légitimation morale voire la légalisation de la guerre. Anciennement haut fonctionnaire au ministère de la Défense, ce spécialiste des relations internationales et stratégiques s’attache dans cette étude à démontrer le processus utilisé par la classe politique pour convaincre une population civile, souvent première victime des dommages collatéraux de ces affrontements idéologiques, que la guerre est la seule issue.
Guderian. Heinz Guderian. Un nom qui claque et qui résonne dans les esprits comme celui du « pape » de la guerre mécanisée. Comme celui d’un officier visionnaire qui « reste dans l’histoire militaire comme l’une des incarnations les plus parfaites du génie opérationnel et organisationnel engendré par le militarisme germano-prussien », selon les mots du professeur Benoît Lemay en introduction de cette réédition de Mémoires écrites à la fin des années 1940.
Nos représentations du Moyen Âge sont pétries de lieux communs : violence omniprésente, cruauté des puissants et des juges, hygiène approximative, religion fanatique, médecine balbutiante… Comme le relève l’un des auteurs de ce qui est certainement l’étude la plus stimulante parue sur le Moyen Âge depuis des années, il n’y a aucune période que l’on juge aussi mal. Le XVIe siècle est « protégé par la Renaissance », malgré l’extrême violence des guerres de religion, le « Grand siècle » est traversé pourtant de guerres sans fin pour des enjeux territoriaux limités, du XVIIIe, on ne voit que les Lumières, etc. « En somme, pour trouver une figure aussi négative que celle du Moyen Âge, il faut remonter à Cro-Magnon ! » (Boris Bove).
En quittant le pouvoir, en avril, à la veille de ses quatre-vingt-sept ans Raoul Castro a peut-être mis fin (momentanément) au rôle central joué par le clan, des Castro dans l’histoire contemporaine de l’île à la canne à sucre et aux cigares. Pour la première fois de son histoire, Cuba sera dirigé par une personne née après la chute du dictateur Fulgencio Batista en 1959, en l’occurrence Miguel Diaz-Canel, né le 20 avril 1960 à Placeta dans la province de Villa Clara. Cet ingénieur électronicien, ancien dirigeant des jeunesses communistes, seul Cubain qui a osé s’asseoir au bureau politique avec une tablette entre les mains ouvrira-t-il une nouvelle ère politique, économique, culturelle ? C’est à ces questions, parmi tant d’autres, que répond Michel Faure, journaliste, ancien correspondant de l’AFP et de Libération qui a couvert durant de longues années l’Amérique latine.
Le romancier russe Mark Aldanov (1886-1957) est bien oublié aujourd’hui dans notre pays. Dans l’entre-deux-guerres, il fut pourtant l’un des écrivains préférés de l’émigration russe, alors qu’à l’époque ses livres étaient interdits de publication en Russie.
L’United States Navy est-elle en phase de déclin avancé ? À en juger par la puissance, la masse et l’avance technologique de cette marine « second to none », on pourrait en douter. Et pourtant, Seth Cropsey nous montre avec Seablindness que le Sea Service (1) est engagé depuis la fin de la guerre froide dans un processus d’érosion dont il juge les symptômes alarmants et les conséquences potentiellement dramatiques pour la sécurité américaine et plus généralement pour la stabilité de l’ordre libéral.
Anne Nivat, grand reporter indépendante spécialiste de la Russie (1) livre, dans son nouvel ouvrage Un continent derrière Poutine ?, un panorama captivant de la société russe à la veille de la réélection de Vladimir Poutine, le 18 mars 2018, pour un nouveau mandat de six ans (2018-2024).
À l’heure où les meilleurs esprits écrivent que « les guerres se multiplient et ne connaissent pas de fin » (1), il est intéressant de se référer aux dures leçons de l’histoire militaire, comme de l’histoire tour court. Que n’a-t-on écrit sur cette fameuse bataille de Koursk, la plus sanglante du second conflit mondial, peut-être de tous les temps, en tout cas le plus important affrontement de blindés de l’histoire militaire qui a eu lieu le 13 juillet 1943 dans la plaine de Prokhorovka.
Tous les observateurs attentifs de la société russe ont été frappés par une sorte de paradoxe : sous une apparence formellement féminine, les femmes russes montrent ouvertement de fortes tendances directives, voire dominatrices à l’égard des hommes, lesquels se retrouvent souvent de ce fait infantilisés au niveau familial alors qu’ils dominent officiellement la vie politique et la direction des entreprises, domaines où toute idée de parité est exclue. Déjà au XIXe siècle, Anatole Leroy-Beaulieu, remarquait entre les deux sexes « une sorte d’inversion de qualités ou de facultés… Si l’on pouvait reprocher parfois aux hommes quelque chose de féminin, les femmes, en compensation, avaient dans le caractère et dans l’esprit quelque chose d’énergique et de viril. »
« Et c’est ainsi qu’un peuple pacifique a conquis le monde, en partie grâce à l’excellence de sa stratégie et de sa tactique. Et qu’il l’a perdu. » Dans son dernier livre, Yann Le Bohec, professeur émérite à l’université Paris IV Sorbonne, nous explique le pourquoi et le comment de la conquête romaine en faisant la synthèse de quarante années de recherches sur l’armée de Rome.
À l’heure où l’Europe est à un tournant de son histoire millénaire, il paraît utile de mieux savoir ce qu’elle est réellement. Ravissante nymphe enlevée par Zeus, déguisée pour l’occasion en taureau qui la conduit de l’Orient à la Crète, l’Europe a revêtu aux cours des siècles bien des aspects. Ceux des Empires, romain, carolingien, napoléonien, ou l’« ordre nouveau » d’Hitler. Celui d’une communauté économique devenue depuis 1993 l’Union européenne à 28 membres, en passe avec le Brexit d’être réduite à 27 membres, avant peut-être de s’élargir aux pays balkaniques.
S.P.Q.R. – Senatus Populusque Romanus (« le Sénat et le peuple romain ») – est l’abréviation qu’utilisaient les Romains pour désigner leur État. Plus de quinze siècles après son effondrement, l’ancienne Rome continue de soutenir l’édifice de la culture occidentale, de façonner notre vision du monde. Comment et pourquoi ce qui n’était apparemment qu’un village insignifiant de l’Italie centrale a-t-il pu devenir une puissance à ce point dominante, exerçant son autorité sur un vaste territoire déployé à travers trois continents et façonnant nombre de nos concepts fondamentaux sur le pouvoir, la citoyenneté, la guerre, l’empire, etc. ?
Le 2 mars 1917, Nicolas II abdique en faveur de son frère, le grand-duc Michel. Le lendemain celui-ci renonce au trône en attendant qu’une éventuelle assemblée constituante se prononce sur la forme de l’État. Si c’est donc bien le 3 mars 1917 que le régime monarchique prit juridiquement fin en Russie, François Antoniazzi considère que c’est le dimanche 26 février que le tsar perdit définitivement la partie contre le peuple insurgé de Petrograd.
La littérature francophone sur les industries de défense dans le monde est assez rare et réservée à quelques cercles restreints d’experts. D’où l’intérêt de cet ouvrage – au format court avec 120 pages – écrit par Fanny Coulomb, maître de conférences à Sciences Po Grenoble et membre du Conseil scientifique de l’Irsem.
« The United States must decide if it wants to remain a liberal superpower ». Tel est le constat formulé par Thomas J. Wright en achevant cet essai en décembre 2016, à la rotule entre les présidences Obama et Trump. Directeur du projet « Ordre international et stratégie » à la Brookings Institution, l’auteur dresse avec All Measures Short of War un bilan réaliste du retour des rivalités géopolitiques et s’attache à proposer en conséquence une stratégie pour son pays. Une stratégie pour la compétition du XXIe qui s’ouvre. Une stratégie pour préserver la « paix froide » dans un monde interdépendant où s’expriment sans complexe les rivalités.
L’ouvrage constitue la première synthèse sur le commerce maritime qui s’appuie sur l’étude des épaves antiques. Il se fonde sur un imposant catalogue comprenant les notices détaillées de 102 épaves et constitue à ce jour l’un des dictionnaires d’épaves les plus complets.
Au moment où Les heures sombres, film historique britannique captant un moment épique de la vie du vieux lion dressé seul face à l’Allemagne nazie, sortait sur les écrans, était publié ce monumental dictionnaire Churchill, œuvre d’Antoine Capet, professeur émérite de civilisation britannique à l’Université de Rouen.
Il est aujourd’hui de bon ton de faire référence aux penseurs asiatiques dans la mesure où la zone Asie-Pacifique est devenue le nouveau centre de gravité du Monde. Citer Sun Tzu est aujourd’hui « tendance », alors même que les connaisseurs du personnage étaient très rares il y a encore cinquante ans.
Saint Cyrien de 1966, Michel Klen analyse en détail les événements de la guerre d’Algérie et souligne avec neutralité tous les traumatismes qui ont entraîné la fin de l’Algérie française. Remontant dans le passé, il rappelle l’enlèvement des Chrétiens par les pirates barbaresques, la vente frauduleuse de blé au Directoire, l’opposition des Arabes à l’agriculture (selon Tocqueville), les hésitations de Bugeaud, l’approbation de la colonisation par Victor Hugo et Ferhat Abbas.
Ce très beau livre superbement illustré et bien documenté a l’ambition de nous convier à un voyage dans le temps, au sein de cet espace maritime plus ou moins mystérieux qui deviendra progressivement vers la fin du XVIe siècle ce que nous appelons aujourd’hui l’océan Indien.
Dans ce troisième et dernier volume de sa monumentale histoire du communisme, après les Bourreaux et les Victimes, Thierry Wolton traite des Complices, ces divers « compagnons de route » que Lénine avait dénommés en son temps d’« idiots utiles ». En décrivant avec force de détails la reconversion des anciens membres des nomenklaturas, dont certains ont commencé » leur « passage « dans les affaires dès les années 1986-1988, Thierry Wolton montre que seuls 10 à 20 % des anciennes élites communistes ont quitté la scène. Les autres sont devenus sociaux-démocrates, nationalistes, hommes d’affaires ou ont préservé leurs positions dans les divers organes du pouvoir.
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