Publiées régulièrement, ces analyses inédites d’ouvrages sont en accès libre, tout comme les recensions publiées dans l’édition mensuelle.
Alors que l’on reparle d’une nouvelle guerre froide avec la crise du multilatéralisme et le retour du rapport de force – accentué par la pandémie de la Covid-19 – il est nécessaire de revenir vers ce qu’a été la guerre froide succédant à la Seconde Guerre mondiale. D’où l’intérêt majeur de cette étude exceptionnelle par son intérêt et portant sur la France durant ce demi-siècle de confrontation. De plus, son auteur, outre ses très grandes qualités d’historien, a bénéficié de deux atouts majeurs : l’accès aux sources via les archives du Quai d’Orsay et le fait que son père, Jean-Marie Soutou (1912-2003) a été un des acteurs de la diplomatie française comme ambassadeur puis comme secrétaire général du Quai, d’où une connaissance intime du sujet, produisant un ouvrage magistral et indispensable pour comprendre le rôle de la France au cours d’un conflit qui faillit dégénérer à plusieurs reprises.
De 1941 à 1945, l’océan Arctique fut le théâtre d’une bataille navale parmi les plus dures et les plus longues de la Seconde Guerre mondiale. Convois et avions alliés, U-Boote, Luftwaffe et bâtiments de surface de la Kriegsmarine et de la Royal Navy, se livrent un combat sans pitié pour le fameux Murmansk Run ou passage de Mourmansk, route maritime reliant les États-Unis/Canada à l’Islande/Grande-Bretagne et dont les points de chute sont les ports de Mourmansk et d’Arkhangelsk, en URSS.
Auteur prolixe, Jean-Pierre Rioux ne prétend pas refaire une histoire du « colonialisme », dont le livre noir a si souvent été rouvert – et tout récemment encore grâce à Marc Ferro – ni une histoire de la « colonisation », ou du « système colonial », mot si douteux. L’ancien ministre des Colonies Gabriel Hanotaux le confirmera en 1933 : « En occupant Alger, la France remplissait la mission que la providence et l’histoire lui avaient confiée : l’attirance de l’inconnu, la joie du sacrifice, le désintéressement dans le dévouement. » Pas davantage, non plus, d’enregistrer passivement une histoire officielle et scolaire des anciennes colonies françaises ou des « œuvres françaises » outre-mer appréhendées une à une, dans leurs antécédents historiques et anthropologiques puis dans leur destinée émancipée. Le but de Jean-Pierre Rioux est, plus modestement, d’affirmer qu’une France coloniale, singulière mais pleine d’indécision hexagonale, a existé et surtout qu’il reste une part postcoloniale dans le destin de ce pays au XXIe siècle.
Emprunté à l’artiste Félix Vallotton, qui intitula « C’est la guerre ! » la série de gravures créée début 1915, le titre de ce livre vise à donner au fait guerrier contemporain une sorte d’évidence qui trop souvent lui fait défaut, précisément du fait de l’intensité de l’événement guerrier, des affects puissants qu’il mobilise, de la dimension dans laquelle il fait entrer ceux qui le traversent.
L’Iran est l’un des plus vieux pays du monde. Il s’est constitué au fil de quarante siècles bien remplis, comme le relatent Yves Bomati et Houchang Navahandi dans un livre récent. À partir d’un noyau modeste, la Médée et la Perse développèrent peu à peu une civilisation originale. Des idées aussi novatrices que le zoroastrisme, le rêve d’un empire universel régi par des lois de tolérance, y prirent naissance en même temps que de grands courants philosophiques, religieux et artistiques.
Alors que bien des esprits éclairés avaient prédit la disparition des frontières et l’avènement d’une mondialisation heureuse, voilà que les frontières, entendues dans leur sens premier comme périmètre de l’exercice de la souveraineté d’un État, sont revenues sur l’avant-scène. Michel Foucher, géographe et géopolitologue, qui a consacré une grande partie de sa riche carrière de chercheur à ce phénomène dont il est l’expert incontesté, a remis à jour son petit livre en y intégrant des observations pertinentes consacrées à la pandémie qui s’est abattue soudainement sur la planète.
« Le 11, c’est la puissance du canon et la force de l’homme », dira le général Labuze, commandant la 9e brigade d’infanterie de Marine (2015-2017). L’origine du 11e régiment d’artillerie de Marine (11e RAMa) se confond avec la création des Compagnies ordinaires de mer, futurs Régiments de la Marine, par le Cardinal Richelieu en 1622. Toutefois, la création officielle du 11e remonte à 1929, s’imposant en héritier du 1er régiment d’artillerie coloniale (1622-1929). Forts de leur histoire, les « Bigors du grand 11 » ont gardé l’état d’esprit des matelots du grand large, comme le rappelle le général d’armée Burkhard qui préface l’ouvrage.
À intervalle régulier, la presse fait état d’actions, plus ou moins spectaculaires, attribuées aux services secrets israéliens à l’encontre de cibles iraniennes, ou de ses alliés, comme le Hezbollah. En 2010, un virus informatique surnommé Stuxnet avait saboté des centaines de centrifugeuses à Natanz, à 250 km au sud de Téhéran, dans un site ultrasensible. Début juillet, un incendie vient de s’y produire, pour donner suite à une attaque qui a provoqué une déflagration. Comme à l’accoutumée, le Premier ministre, Benyamin Netanyahou, a rétorqué par le mutisme habituel mais la presse israélienne a été plus prolixe, en faisant état d’un laboratoire où est testé une nouvelle génération de centrifugeuses permettant d’accélérer le processus de production de l’uranium enrichi. Ce matériel devait être activé dans ses installations souterraines au cours des prochains mois. D’ordinaire, ces actions sont attribuées à la fameuse unité 8 200 du Mossad, parfois en étroite coopération avec la National Security Agency (NSA). C’est dire l’intérêt de ce nouveau livre portant sur les aspects totalement inédits des services israéliens : leurs moyens d’écoute, leurs capacités offensives et défensives de cyberguerre, les assassinats ciblés du Mossad, les unités d’action clandestine et d’opérations spéciales.
Trois ministres français – Louis Joxe, Robert Buron et Jean de Broglie – entourés de neuf collègues, quatre « ministres » du GPRA – Krim Belkacem, Lakhdar Bentobbal, Saâd Dahlab et M’hamed Yazid – accompagnés de quatre autres membres du Front de libération nationale (FLN) dont deux de l’Armée de libération nationale (ALN), sont réunis depuis le 7 mars pour mettre un point final aux négociations ouvertes un an plus tôt. À Évian, ville d’eaux proche de la frontière suisse, les deux délégations s’étaient rencontrées pour la première fois le 20 mai 1961, et s’y sont retrouvées avant de se séparer le 19 mars 1962. Rebelles, maquisards, face à des hommes habitués aux tapis verts, chacun a observé l’autre, argumenté pas à pas, dû lutter parfois contre ses autorités respectives qui mesuraient mal l’atmosphère sur place et qui avaient leur propre logique. Pour la première fois, ces hommes se serrent la main. La guerre est finie.
De la Syrie à la Libye, le projet « néo-ottoman » d’Erdogan titrait récemment Le Monde ; c’est dire l’intérêt qui s’attache à une étude renouvelée de ce que représenta l’Empire ottoman et des traces laissées par sa chute en 1918.
C’est une fresque très documentée, s’appuyant sur une connaissance approfondie de son pays natal et comprenant de nombreux noms vietnamiens écrits dans leur graphie, que livre Nguyen Ngoc Châu. Ingénieur diplômé de l’École centrale, ancien enseignant et ancien cadre de banque, il est revenu travailler au Vietnam en pleine guerre jusqu’à la chute de Saigon.
Fils de militaire, génie littéraire précoce, membre du Comité de Salut Public et théoricien de la Terreur, guillotiné à l'âge de 26 ans en même temps que Robespierre le 28 juillet 1794, Louis-Antoine de Saint-Just fascine encore. Sa dernière biographie en langue française datait pourtant de plus de trente ans. C'est dire si cette nouvelle publication était attendue.
On ne peut comprendre les guerres qui ont marqué l’espace de l’ancienne Yougoslavie, entre 1991 et 1995, qu’en ayant une perception du passé des peuples, nations, groupes linguistiques et religieux, étroitement imbriqués sur ces territoires des Balkans et de l’Europe du Sud-Est. En effet, durant la Seconde Guerre mondiale, on y a vu une multiplication des « guerres dans la guerre », pour reprendre l’expression de Milovan Djilas, que l’on retrouve dans certains confins polonais et ukrainiens. Mais cette forme de guerre n’a été déterminante qu’en Europe du Sud-Est. De fait, cette région a constitué un « troisième front » de la Seconde Guerre mondiale en Europe, bien distinct des fronts occidental et russe. Sur ce « troisième front », les armées régulières ont cédé le pas aux unités de partisans et aux milices de villages, les grandes offensives et les exploits logistiques se sont effacés devant les embuscades et les divers trafics. Par certains aspects, la Seconde Guerre mondiale en Europe du Sud-Est rappelle donc les « nouvelles guerres » que Mary Kaldor a cru voir apparaître dans les années 1990 en Afrique, en Asie ou en ex-Yougoslavie.
Alors que la dissuasion nucléaire était au centre du premier Livre blanc de 1972, dix ans après la crise des missiles à Cuba, c’est bien le renseignement qui est devenu, aujourd’hui, la pierre angulaire de notre politique de sécurité nationale. Il est notre « première ligne de défense ». Comme le déclarent les rédacteurs du dernier Livre blanc de 2013 – deux années après les attentats du 11 septembre – le renseignement s’avère indispensable, parce qu’il « sert autant à la prise de décision politique et stratégique qu’à la planification et à la conduite des opérations au niveau tactique ». On sait bien, chaque jour davantage, que pour faire face aux dangers qui nous menacent ainsi qu’aux grands enjeux du XXIe siècle, nous avons plus que jamais besoin de développer des connaissances et des capacités d’anticipation. « Connaître et anticiper », cet impératif de notre stratégie de défense et de sécurité nationale a été affirmé pour la première fois dans le Livre blanc de 2008, puis rappelé et conforté dans sa dernière version de 2013. Sans l’action des services de renseignements, il n’est guère possible de connaître de l’intérieur les multiples mouvances islamistes ni de lutter efficacement contre le terrorisme.
En publiant ce guide de stratégie maritime, le professeur James R. Holmes annonce vouloir faire œuvre pédagogique pour tous ceux qui versent dans les affaires du monde maritime, du jeune étudiant au praticien chevronné, civil ou militaire. Mais le titulaire de la chaire de stratégie maritime au Naval War College vise en réalité avant tout les officiers de l’US Navy, et en priorité les jeunes officiers, afin de leur donner dès le berceau les bases théoriques qui leur permettront de lutter contre la « tyrannie du temps », cette pression de l’urgence qui les empêche de penser le cadre conceptuel de leur métier au cours de leur carrière.
« On n’attaque une ville qu’en désespoir de cause », Sun Tzu (L’Art de la guerre, chapitre III)
L’incendie le 16 avril 2019, par une belle fin d’après-midi de printemps, de la cathédrale Notre-Dame a constitué un événement majeur dont les échos ont traversé l’opinion publique mondiale tant le symbole était fort. Mais face à ce drame dantesque qui a failli emporter un des édifices les plus emblématiques et visités au monde, l’engagement massif de la BSPP a été vécu comme une bataille historique contre le feu et qui a permis de sauver la plus célèbre cathédrale du monde.
Contrairement à ce que son titre laisse penser, ce livre n’est pas à strictement parler un livre d’histoire. L’ambition de son auteur, Thomas Flichy de La Neuville, spécialiste de l’Iran et géopoliticien, est plutôt de déterminer ce qui constitue le moteur de la puissance iranienne sur la longue durée, de « modéliser » cette puissance iranienne. Si l’on prend comme point de départ la géographie, les contraintes naturelles du plateau iranien ont fait naître des îlots de culture originaux, favorisés par l’isolement relatif. L’Iran s’est ainsi doté d’une puissance imaginative, spirituelle et militaire.
La chute de l’Empire romain est à la mode, peut-être parce que beaucoup y voient un rappel d’un certain nombre de maux qui accablent aujourd’hui la civilisation occidentale… Mais justement, cette « chute », quels facteurs l’ont provoquée ? Et finalement, a-t-elle réellement eu lieu ?
Augusto Pinochet (1915-2006) appartient à la longue lignée des dictateurs sud-américains qui ont longtemps sévi en arrivant et en se maintenant au pouvoir par la violence. Et hélas, ce ne sont ni les généraux Alcazar et Tapioca, chez Tintin, qui peuvent révéler la réalité de ces régimes construits sur l’anticommunisme et le pouvoir personnel. D’où l’intérêt de cette biographie sur Pinochet et qui permet de mieux comprendre à la fois le parcours de cet officier et l’histoire du Chili au cours de la deuxième moitié du XXe siècle.
Ce troisième volume qui fait partie d’une série qui en comprendra quatre, est tout aussi dense et captivant que les deux précédents qui couvraient la guerre de ses origines dans la lointaine Antiquité jusqu’à ses formes industrielles, objet de celui-ci.
À la fois penseur et homme d’action, l’amiral James Stavridis livre avec Sea Power (publié en 2018) son opus magnum. Pétri de culture maritime et militaire, celui qui fut le seul amiral à occuper le poste de commandant suprême des forces de l’Otan nous emmène dans un voyage où les océans du monde sont mis en perspective non seulement sur le plan historique, mais surtout sur le plan stratégique. Par la plume de l’auteur, sept portions de la planète bleue (le Pacifique, l’Atlantique, l’océan Indien, la Méditerranée, la mer de Chine méridionale, la mer des Caraïbes et l’Arctique) prennent vie sous nos yeux, au gré d’un balancier permanent entre la hauteur de vue d’un amiral blanchi sous le harnais et les souvenirs du jeune midship qu’il fut au tournant des années 1970.
La maison d’éditions Weyrich nous propose un nouveau Mook très bien documenté sur la bataille des Ardennes en mettant l’accent sur l’emploi des blindés au cours de cette offensive majeure de l’hiver 1944-1945, mais trop souvent négligée dans l’historiographie française. En effet, après la bataille de Normandie et la libération de Paris, la mémoire nationale a plutôt conservé les combats dans les Vosges et en Alsace, car les troupes françaises y sont en première ligne alors que la bataille des Ardennes concerne essentiellement les forces américaines avec l’appoint de quelques bataillons belges sur les lignes arrière et se situe du côté des Ardennes belges. D’où l’intérêt de cet ouvrage richement illustré avec des articles apportant des éclairages très opportuns, voire novateurs sur cet épisode décisif qui vit le Reich nazi emporter ses derniers succès tactiques mais échouer sur le plan stratégique.
L’AML Panhard figure en bonne place parmi les objets emblématiques des armées françaises, tant sa silhouette est associée à nos Opex. De l’opération Tacaud en Mauritanie en 1978 à la chevauchée de Serval en 2013, les petits blindés à roues de Panhard sont intimement liés à l’action militaire de la France. Ayant inscrit à son livret militaire plus d’un demi-siècle au combat, l’AML Panhard méritait qu’un bel ouvrage lui soit consacré, enfin. L’initiative en revient à Charles Maisonneuve, l’un de nos meilleurs experts en France de la cavalerie et de l’arme blindée. Avec cette réalisation, le président d’honneur de l’association « Saumur » signe son cinquième ouvrage.
Pendant cinq ans de guerre, la France a reçu un véritable déluge d’explosifs. Après les bombes allemandes et italiennes du printemps 1940, vinrent les bombes alliées pendant l’Occupation. Dans les quatre années qui suivirent la défaite, les Alliés déversèrent sur notre pays 588 000 tonnes de bombes, soit six fois le tonnage lancé par l’Allemagne sur l’Angleterre pendant toute la guerre. Gilles Ragache nous relate ici dans le détail la plupart de ces drames oubliés.
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