L'enjeu principal du projet de défense européenne est de définir et de concrétiser la capacité d'autonomie que l'on veut donner à l'Union en matière de prévention et de gestion des crises. Après un rappel des aspects essentiels, quelques éléments de réflexion relatifs à une stratégie européenne de gestion des crises sont proposés. Les premiers contours de la force européenne de réaction rapide sont tracés : elle regroupe les moyens militaires mis à la disposition de l'Union européenne pour contribuer à la gestion des crises. Il s'agit des forces militaires terrestres aériennes et navales, mais aussi des capacités stratégiques essentielles. Enfin, un bilan de notre action en matière de défense européenne est tiré. Lire les premières lignes
Après un rapide rappel de la laborieuse montée en puissance de l'Europe de la défense, puis de l'accélération donnée à Saint-Malo, entretenue à Helsinki, Cologne et Feira, le bilan de Nice, particulièrement positif pour la défense, est dressé. Les suites à donner à ce sommet sont développées : mettre en place un dispositif de gestion de crise et se doter d'une capacité autonome d'appréciation, de décision et d'action. Au-delà, il faudra bien s'intéresser aussi à la défense collective, ce qui implique de clarifier les relations de l'Europe avec l'Otan, et donc avec les États-Unis. Déjà la cohérence des actions à mener dans tous les domaines exige des États membres une vision commune de l'Europe qu'ils veulent construire, et une volonté sans faille d'y aboutir.
Les déclarations du président de la République française à la veille du sommet de Nice, évoquant une Europe de la défense « coordonnée avec l'Alliance », mais « indépendante par rapport au Shape » pour ce qui concerne « son élaboration et sa mise en oeuvre », ont fait l'effet d'un pavé dans la mare euro-atlantique alors qu'elles lèvent certaines ambiguïtés : l'Europe doit avoir l'ambition d'être une puissance forte politiquement et militairement. L'attitude des États-Unis est guidée par la volonté de ne pas voir leur leadership remis en cause : il n'est donc pas question de toucher à son expression en Europe, l'Otan. Ils sont sans doute prêts à tolérer, peut-être même à accepter, voire pour certains à souhaiter, une Europe militaire relativement forte, mais ils excluent, pour l'instant, une Europe politique forte. Les relations futures entre l'UE et l'Otan, s'en ressentiront, mais il est temps de comprendre qu'il y aura, dans l'avenir, deux types d'opérations militaires : celles avec les États-Unis, au sein de l'Otan ; celles sans les États-Unis, conçues et conduites par les Européens.
Le sénateur Xavier de Villepin a rappelé en quoi consiste le système de défense antimissiles du territoire des États-Unis (NMD), avant d'évoquer les réactions internationales de la Russie, de la Chine et des Alliés, ainsi que les risques de relance de la course aux armements que la réalisation de ce projet est susceptible de provoquer. Une révision des concepts de défense, une relance de la réflexion doctrinale, en France en particulier, s'imposent. Lire la suite
Malgré les récents échecs du projet NMD, il semble bien que les États-Unis finiront par réaliser ce bouclier antimissiles, même si son importance et sa composition sont encore en discussion. Ce projet suscite de nombreuses réactions, la prolifération et la course aux armements risquent d'être relancées, et l'équilibre stratégique rompu par la remise en cause du traité ABM. La réalité de la menace, son échéance, la priorité accordée sont contestées. En revanche, le système de défense de théâtre (TMD) progresse, ce système pouvant même être proposé comme « NMD locale ». Dans ces conditions, afin que l'Europe dispose d'une autonomie « juste suffisante », la France devrait : Lire la suite
Le commandement de la doctrine et de l'enseignement militaire supérieur de l'armée de terre (CDES), a organisé un forum à l'École militaire, le 8 juin 2000. Destinée à ouvrir un large débat sur la place et le rôle des forces terrestres dans la résolution des crises, cette rencontre avait pris comme fil directeur le livret de libre réflexion, récemment diffusé, présentant la nouvelle approche doctrinale d'emploi de ses forces . L'action de celles-ci n'a pas pour but de gérer une situation de crise, mais d'y apporter des solutions viables et durables. Cette « nouvelle logique » doit, en permanence, conjuguer deux modes opératoires : la maîtrise de la violence, visant la résolution et la stabilisation de la crise (et qui a constitué la toile de fond de ces débats) ; et l'action coercitive qui recherche la décision par un combat aéroterrestre.
Ébranlé par des guerres tragiques, puis ruiné par une politique désastreuse, le Viêt-nam est enfin sorti d'un abîme qui a profondément marqué la mémoire collective de tout un peuple. Pour se redresser, ce pays controversé de la péninsule Indochinoise a essentiellement puisé ses forces dans son potentiel humain. Ces énergies sont notamment alimentées par une dynamique spirituelle intense qui trouve ses repères dans le bouddhisme et d'autres valeurs asiatiques ; mais ces courants philosophiques et religieux restent perturbés par les dogmes d'un communisme pesant qui entrave le processus de réformes de cette nation en quête de sa véritable identité.
Sixième puissance spatiale après les États-Unis, la Russie, l'Europe, le Japon et la Chine, l'Inde mène une politique spatiale déterminée depuis les années 60. Sous l'impulsion de Vikram Sarabhai, le programme spatial indien fut lancé avec comme principaux objectifs le développement socio-économique de l'Inde et une volonté d'indépendance dans ce domaine stratégique. Des besoins importants en télécommunication et télédiffusion ainsi que la nécessité d'une bonne gestion des ressources naturelles ont donné naissance à deux familles de satellites, les INSAT pour les télécommunications et les IRS pour la télédétection. L'indépendance en matière de lanceurs, au moins pour les satellites IRS , fut atteinte avec la fusée PSLV . Le programme spatial, d'abord purement national au service du développement du pays, vise maintenant les marchés internationaux, où l'on constate quelques succès notamment dans le domaine de la télédétection et dans celui des lancements. L'importance stratégique du programme s'est aussi considérablement accrue avec la mise en place de la doctrine de dissuasion nucléaire en 1998 puis les incidents de Kargil en 1999. La prochaine décennie devrait voir l'espace devenir, encore plus qu'avant, un moyen d'exprimer la volonté de puissance indienne à la fois au niveau régional qu'à l'échelle mondiale.
Le XXe siècle a vu naître des moyens rendant accessibles à l'homme de nouveaux espaces : l'espace aérien et l'espace extra-atmosphérique. Leur utilisation a conduit à établir des règles juridiques propres à chacun d'eux sur la base de fondements diamétralement opposés. Pourtant, ces régimes juridiques ont été inspirés par la même source, le droit des espaces maritimes, que des siècles de coutume ont façonné et qui a lui-même obtenu sa consécration conventionnelle au cours de ce siècle. C'est à l'épreuve des deux guerres mondiales que les régimes de l'air et de l'espace ont été élaborés. Dès le lendemain de la Première Guerre mondiale, le droit aérien est définitivement dominé par le principe de la souveraineté entière et exclusive des États sur leur espace aérien, en réaction à la menace mortelle que représentent les bombardiers. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, le spectre d'un conflit nucléaire pousse les deux superpuissances à se doter de vecteurs permettant d'atteindre l'espace extra-atmosphérique et de moyens d'observation placés en orbite. Un compromis visant à réaliser ces objectifs en écartant l'entrave juridique que pourrait constituer la protection de la souveraineté des États sous-jacents permet au droit de l'espace de se développer sur la base d'un principe de liberté. Aujourd'hui semble se poser la question de savoir comment répondre au besoin d'adapter les règles au formidable essor de l'exploitation commerciale de ces espaces, sans pour autant remettre en cause les principes fondateurs.
Le développement du droit et la multiplication des normes internationales caractérisent le système mondial. Dissipant les illusions qui se forment autour du droit − le droit est un ensemble cohérent et harmonieux ; le droit est au-dessus des rapports de forces ; le droit fait régner la paix et la justice − l'auteur met l'accent sur les trois types de conflits de droit auxquels on peut assister dans les relations internationales : conflits entre principes, par exemple résultant des contradictions entre souveraineté des États et ingérence ; conflits entre organisations, le plus flagrant étant celui entre l'Onu et l'Alliance atlantique ; conflits entre juridictions, ultimes gardiennes des ordres juridiques. Tous ces conflits entre droits, entre institutions sont appelés à se développer, ce qui nous met à l'abri d'un ordre unique et harmonieux, probablement tyrannique.
Chroniques
Que la mer Méditerranée soit une composante essentielle de la sécurité européenne est une banalité que rien ne vient objectivement démentir. Cette mer constitue, en effet, le flanc Sud du continent au profit duquel elle joue plusieurs rôles : espace de manœuvre, aire de flux logistiques ou zone de contact avec l’Afrique et l’Asie. Elle est, en tout cas, suffisamment vaste pour que plusieurs nations la considèrent comme un enjeu national majeur. C’est donc par le biais des institutions internationales que l’étude la plus cohérente peut en être effectuée. Lire la suite
Contrairement au champ de la sécurité publique dans lequel policiers et gendarmes se répartissent les zones de compétence en fonction de critères essentiellement géographiques, en termes de seuil démographique et de nature (urbaine ou rurale) de la délinquance (1), des principes différents organisent leur intervention respective dans ces autres volets de l’activité policière que sont la police judiciaire et le maintien de l’ordre (2). Lire la suite
Jean-Bertrand Aristide retrouve, après avoir pris ses fonctions le 7 février, son fauteuil de chef de l’État haïtien. Ce retour était annoncé après les résultats des élections législatives du 21 mai et du 9 juillet 2000, caractérisées par la forte poussée du mouvement politique de Jean-Bertrand Aristide, « Lafanmi Lavalas » (la famille Lavalas) qui emporta la majorité absolue des sièges au Parlement. L’investiture de Jean-Bertrand Aristide apparaît à beaucoup comme une revanche sur les années mouvementées de son premier mandat, largement vidé de sa substance, au début des années 90. Lire la suite
Incitée par le sommet de Marrakech et la naissance de l’Union du Maghreb arabe (UMA) en 1989, l’Europe avait en 1992 émis l’idée d’un « partenariat euromaghrébin » à l’appui de cette coopération régionale naissante. Les avatars de l’UMA ont rendu caduque cette tentative d’individualisation du Maghreb, au grand regret de Bruxelles qui aurait préféré traiter avec un interlocuteur unique. C’est donc en ordre dispersé que les Maghrébins continuent à gérer une relation d’intensité fort variable et pour certains, non encore aboutie, avec l’Union européenne (UE). Lire la suite
Bibliographie
René Rémond, membre de l’Académie française, président de la Fondation nationale des sciences politiques, nous propose de jeter un regard sur ce XXe siècle qui s’achève et d’en dresser non pas une histoire exhaustive mais un bilan aussi honnête que le permet le recul du temps. Tout d’abord, il faut noter que cet an 2000, fêté dans le monde entier, n’est que la conséquence du rôle historique des Européens avec cette suprématie reconnue du calendrier chrétien. Ce siècle, en fait, n’est pas stricto sensu centenaire. Pour l’auteur, le XXe siècle a plutôt 75 ans. Il débute à l’été 1914 avec le déclenchement de la Première Guerre mondiale, qui est une coupure décisive dans l’ordre européen issu pratiquement du Congrès de Vienne de 1815, et s’achèverait en 1989 avec en quelque sorte la fermeture de la parenthèse communiste provoquée par l’effondrement du bloc soviétique. Lire la suite
Avec L’état du monde 2001, les éditions La Découverte fêtent le vingtième anniversaire de leur annuaire, né sous le patronage d’Yves Lacoste. Le livre est en deux parties. La première est un tableau général des relations internationales et de l’économie mondiale. La seconde présente successivement 225 États et territoires non indépendants, regroupés en 38 « ensembles géopolitiques », choix discutable que justifie Yves Lacoste lui-même. Suivent, en annexe, des tables statistiques. 51 cartes éclairent le texte. La bibliographie est importante. Cent spécialistes ont contribué à l’entreprise. Lire la suite
Qualifié par une partie de la critique anglo-saxonne de « plus important historien moderne spécialiste de la guerre et de ses conséquences politiques » Gabriel Kolko, auteur de dix livres offrant des explications de la Seconde Guerre mondiale et de la politique internationale, ainsi que de la guerre du Vietnam s’efforce ici de présenter une synthèse globale de ce siècle de guerres. L’ouvrage est écrit d’une plume alerte et concise, ni trop chargé de citations ou de chiffres au point de virer souvent à une certaine abstraction voire à un excès de généralisation. Il décrit la préparation des guerres, c’est-à-dire le point de vue des dirigeants pour en tirer la conclusion générale que ceux-ci se sont toujours trompés sur l’ampleur, la durée ou le coût des hostilités. Lire la suite
On parle beaucoup de la mondialisation, perçue principalement dans le domaine économique ou sous l’angle géopolitique. Plus rares sont les réflexions et encore plus les écrits consacrés aux aspects de la culture de la civilisation de ce phénomène dominant l’ère nouvelle. Certes, il y eut, en son temps, l’analyse d’un Samuel Huntington qui mettait l’accent sur la guerre des cultures, mais au-delà de sa richesse et de son côté stimulant cette vision paraissait tout de même réductrice. Lire la suite
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