Débat - La crise russe

La crise russe est le sujet de notre journée d’étude de mars 1999. Quand le rouble perd environ deux tiers de sa valeur en moins d’un an, je pense qu’on peut parler d’une crise financière en Russie ; quand les fonctionnaires russes ne sont pas payés depuis six mois, voire plus, je crois qu’on peut parler d’une crise sociale en Russie ; quand le président Eltsine change quatre fois de Premier ministre en moins de deux ans, sans oublier les difficultés qu’il a avec la Douma, je pense qu’on peut parler de crise politique en Russie ; quand les officiers russes vendent leur équipement, voire leur armement, à différentes maffias, je crois qu’on peut parler d’une crise militaire en Russie ; quand enfin les exportations russes chutent dramatiquement, je crois qu’on peut parler d’une crise économique en Russie. Lire la suite

  p. 5-5

Depuis la tenue du colloque dont les communications figurent ici, le paysage politique russe a connu un nouveau bouleversement qui modifie certaines des remarques présentées lors de notre journée de réflexion. Deux faits constituant le changement méritent mention : l’un était attendu, l’autre fut une surprise. Ce qui était au programme de la vie politique russe en mai 1999 était la procédure de destitution (impeachment, mot fort en vogue désormais en Russie) engagée à la Douma à l’initiative du Parti communiste. Cinq chefs d’accusation pesaient sur le président russe, dont l’un au moins, la guerre de Tchétchénie, pouvait, pensait-on, recueillir la majorité des deux tiers nécessaire à sa destitution par la Douma, étant entendu que cette condamnation devait ensuite être confirmée par d’autres organismes dont la Cour constitutionnelle et la Chambre haute, ce qui mettait le président à l’abri en dernier ressort ; mais l’effet moral d’un vote positif de la Douma eût pu, néanmoins, être désastreux pour Boris Eltsine, assombrissant sans conteste la fin de son mandat. Lire la suite

  p. 6-7

Il est incontestable que la Russie est en crise. Elle connaît des turbulences considérables, mais c’est un pays qui existe et joue un rôle international, non seulement en raison du crédit que lui accordent les autres États, mais aussi parce que les Russes estiment que leur pays doit être traité avec considération. Cependant, à Washington on pense que la puissance russe appartient au passé, donc qu’on peut la traiter avec légèreté. L’affaire du Kosovo en est une illustration remarquable. Lire les premières lignes

  p. 8-12

Je partage l’analyse de Mme Carrère d’Encausse et je vais prendre les choses où elle les a laissées. Je crois effectivement que les dix dernières années ont été décisives pour la naissance d’un phénomène essentiel, et sans doute l’un des plus positifs de cette fin de siècle : c’est l’affirmation d’une démocratie russe ; non seulement la mise en place d’institutions démocratiques dont vous avez décrit la fragilité, les changements indus de sorte qu’on est loin de la boîte de vitesses automatique. C’est ainsi qu’on est passé depuis le début de cette année d’une présidence ferme avec un Premier ministre technicien à un Premier ministre fort avec un président symbolique ; mais cela finalement n’a pas une importance notable : il est incontestable que nous sommes maintenant en pleine mer, avec une génération qui n’a connu qu’une situation de liberté politique croissante. Lire les premières lignes

  p. 13-20
  p. 21-27
  p. 28-35

Ces débats ont suivi les interventions de la matinée. Lire la suite

  p. 36-40

Repères - Opinions - Débats

L'auteur, ambassadeur de France, nous fait part de ses réflexions sur l'affaire du Kosovo et ses conséquences possibles.

  p. 41-44

L'auteur, spécialiste des questions nucléaires, traite de la menace plus générale que fait peser la prolifération des armes de destruction massive, nucléaires en particulier, sur l'Europe.

  p. 45-59

L'auteur, lieutenant-colonel au sein de l'état-major du Commandement des opérations spéciales (Cos) nous présente l'organisation et les missions des forces spéciales, dont les actions correspondent parfaitement aux divers schémas des engagements modernes. Lire les premières lignes

  p. 60-71

L'auteur nous fait part de ses réflexions sur ce domaine en pleine évolution qu'est la stratégie : le cinquantenaire de l'Otan et les évènements dans les Balkans lui donnent l'occasion de faire le point sur cette Organisation.

  p. 72-79

L'auteur aborde l'arc latin, bloc régional dont il démontre qu'il peut être au cœur d'une politique européenne tournée vers le Maghreb. Il faudra pour cela beaucoup de volonté, d'efforts et de persévérance.

  p. 80-95
  p. 96-101

L'auteur, spécialiste de l'Amérique latine, brosse un tableau sur la situation en Colombie, pays qui connaît des difficultés : catastrophes naturelles, conflits entre gouvernement et guérillas, trafic de drogue, grande misère de la moitié de la population.

  p. 102-116

Après le décès du roi Hussein de Jordanie et l'arrivée sur le trône du prince Abdallah, il paraissait judicieux de dresser un bilan politique, stratégique, économique, social même, de cet État qui joue un rôle essentiel dans l'équilibre au Proche-Orient.

  p. 117-126

L'auteur fait parfaitement le point sur la question du passage à l'an 2000 de tous les systèmes informatiques, particulièrement ceux qui intéressent les armées.

  p. 127-140

Chroniques

  p. 141-144
  p. 145-157

« Et pourtant elle tourne », avait, paraît-il, marmonné Galilée face à ses juges après avoir démenti que la Terre tournait sur elle-même. Les esprits n’étaient pas prêts à remettre en cause le dogme qui faisait de notre planète le centre immobile de la création. Lire la suite

  p. 158-160
  p. 161-165
  p. 166-169
  p. 170-175

La gendarmerie a exercé au fil des époques, en temps de guerre comme en temps de paix, une importante fonction militaire. Comme le précise l’article premier du décret du 20 mai 1903 qui définit aujourd’hui encore son organisation et son service, cette fonction militaire résulte toutefois de l’exercice aux armées, comme sur l’ensemble du territoire, de la mission dévolue à l’institution de « veiller à la sûreté publique et d’assurer le maintien de l’ordre et l’exécution des lois ». Extension dans le domaine militaire de sa finalité spécifique, cette fonction militaire se traduit par l’exercice de missions de police militaire (effectuées, en cas de conflit et d’opérations menées à l’extérieur du territoire, dans le cadre de la prévôté) et de défense (administration des réserves et préparation de la mobilisation, protection des points sensibles et recherche du renseignement), la gendarmerie s’étant vu confier, par ailleurs, un rôle prépondérant dans le dispositif de la défense opérationnelle du territoire (DOT). Pour ce qui est de la police militaire, elle recouvre diverses missions de police militaire générale et de police judiciaire militaire. Par référence à la distinction classique établie par la doctrine et la pratique juridiques entre police administrative et police judiciaire, alors que la première a pour objet d’assurer de façon préventive des missions de protection de surveillance au sein des forces armées, la seconde revêt, quant à elle, une finalité répressive. Lire les premières lignes

  p. 176-179

Après 22 ans de pouvoir sans partage, le président Hassan Gouled Aptidon, père de l’indépendance de Djibouti proclamée à l’issue du référendum du 8 mai 1977, et surnommé le « vieux sage » de la corne de l’Afrique, s’est retiré à l’âge de 83 ans, à l’occasion de la dernière élection présidentielle d’avril 1999. À la tête de son pays, après une carrière politique en France sous la IVe République, il s’est efforcé tant bien que mal de créer un parti politique multiethnique pour consolider l’unité interne et s’est battu, dans un environnement régional difficile, pour éviter d’être écrasé ou absorbé par l’un de ses deux grands voisins, l’Éthiopie ou la Somalie. Candidat du parti unique, il a été réélu président en 1981 et 1987. Lire la suite

  p. 180-182
  p. 183-187

Bibliographie

David Yost / Bruno Tertrais : The US and Nuclear Deterrence in Europe / Nuclear Policies in Europe  ; Adelphi Papers n° 326 et n° 327, IISS, Londres, 1999 ; 85 et 96 pages respectivement - Marcel Duval

Voici deux ouvrages de petit volume, mais d’un très grand intérêt. La raison en est que, d’une part, ils traitent d’un sujet auquel nous pensons tous (même si nous n’en parlons presque plus), à savoir les perspectives d’avenir de ce que nous appellerons une « identité nucléaire européenne », et que, d’autre part, ce sujet est abordé simultanément par deux experts particulièrement avertis, et sous deux éclairages en principe opposés : l’« anglo-saxon » (comme aurait dit le Général), et le français. En effet, leurs auteurs sont, respectivement, David Yost, membre du Department of National Security de la Naval Postgraduate School et ancien professeur associé à notre Centre des hautes études de l’armement, et Bruno Tertrais, chargé de mission à notre délégation aux affaires stratégiques et ancien membre associé de la Rand, le célèbre think tank américain, très proche du Pentagone. Lire la suite

  p. 188-191

François Géré : La société sans la guerre  ; Desclée de Brouwer, 1998 ; 329 pages - Pierre Morisot

Si on a bien compris, la thèse exposée par François Géré est, au moins dans l’esprit, originale et séduisante. Selon lui, on a pris la mauvaise habitude de traiter de la paix négativement, comme un état provisoire de non-guerre « par défaut », et de ne se résigner à ne pas se battre que dans deux cas : soit la présence d’un Père Fouettard capable de faire tenir les gens tranquilles, soit l’état d’épuisement des protagonistes « fourbus, devenus post-belliques ». Si nous ne vivons actuellement « une nouvelle forme de paix » que pour déboucher dès demain sur « une autre forme de guerre », ce n’était pas la peine assurément… comme aurait dit Madame Angot. Lire la suite

  p. 191-192

Jean-Jacques Roche : Le système international contemporain  ; Montchrestien, 1998 ; 156 pages - Pierre Morisot

Après avoir chaussé de bonnes lunettes (car les caractères sont minuscules), le lecteur découvrira ici un panorama historique et géopolitique à la fois complet et synthétique de la seconde moitié du XXe siècle. Un recul suffisant, au moins vis-à-vis du fait originel, permet à l’auteur de situer en 1945 la grande rupture qui en « unifiant le devenir de la planète », portait en germe toute la suite. Les deux configurations, bipolaire puis unipolaire, qui dominent la période se situent selon lui « dans le prolongement l’une de l’autre » et les bouleversements produits par la chute du mur de Berlin ne sauraient être interprétés que comme « une simple transition infra-systémique du système hérité de la Seconde Guerre mondiale ». Lire la suite

  p. 192-194

George Bush (avec Brent Scowcroft) : À la Maison-Blanche : quatre ans pour changer le monde  ; Éditions Odile Jacob, 1999 ; 619 pages - Michel Klen

Les événements les plus décisifs de la fin du XXe siècle se sont produits pendant les quatre années (1988-1992) que George Bush a passées à la Maison-Blanche. Le livre que l’ancien président des États-Unis vient d’écrire avec l’aide de Brent Scowcroft, son conseiller à la sécurité nationale, traduit sa vision personnelle de certains faits historiques qui sont plus ou moins liés à la cessation du dernier grand affrontement de ce millénaire : la guerre froide. Pour des raisons de clarté, les auteurs ont choisi de se concentrer sur quelques épisodes marquants qui ont bouleversé les données géopolitiques de la planète : l’effondrement de l’Union soviétique et des régimes communistes dans l’Europe de l’Est, la révolte en Chine, l’indépendance des pays Baltes, la réunification de l’Allemagne, l’opération Tempête du désert et l’avènement des États-Unis en tant que puissance dominante. Les changements survenus en Amérique latine, l’intervention au Panama et la reprise du processus de paix au Proche-orient ont ainsi été laissés de côté. Lire la suite

  p. 194-196

Alain Griotteray et Jean de Larsan : Voyage au bout de l’Allemagne. L’Allemagne est inquiétante  ; Éditions du Rocher, 1999 ; 218 pages - Michel Klen

Depuis plus d’un siècle, l’ignorance des réalités allemandes a précipité la France dans de grandes tragédies. Ce terrible constat a amené Alain Griotteray à rédiger, en collaboration avec Jean de Larsan, spécialiste reconnu des questions germaniques, une étude détaillée sur notre voisin d’outre-Rhin. Les acteurs mettent notamment l’accent sur le choc psychologique créé par l’unification allemande. Deux populations dissemblables se retrouvent brusquement « mariées de force, obligées de vivre ensemble, et ce en moins d’un an » : des fiançailles (9 novembre 1989) au mariage de raison (3 octobre 1990), « le temps de la connaissance aura été bien court ». La partie orientale de l’Allemagne sort de quarante années d’absolutisme communiste ; la partie occidentale, de trente années de prospérité économique. Chacune a vécu auparavant douze années de dictature hitlérienne. Lire la suite

  p. 196-198

Serge Bésanger : Le défi chinois  ; (préface d’Alain Peyrefitte) Éditions Alban, 1997 ; 510 pages - Michel Klen

La Chine est un monde complexe, mystérieux, passionnant et tourné vers le futur. Le réveil du pays le plus peuplé de la planète constitue l’un des grands défis en cette fin de XXe siècle. Cet événement majeur ne doit cependant pas être considéré comme une menace. C’est ce que nous démontre Serge Bésanger dans ce remarquable ouvrage consacré aux grandes mutations de l’ex-empire du Milieu. En libéralisant les échanges avec l’extérieur et en se ralliant à l’économie de marché, le pouvoir communiste de Pékin a introduit dans la société chinoise « une dose énorme et indéterminée de liberté ». Lire la suite

  p. 198-200

Revue Défense Nationale - Juillet 1999 - n° 611

Revue Défense Nationale - Juillet 1999 - n° 611

La crise russe est le sujet de notre journée d’étude de mars 1999. Quand le rouble perd environ deux tiers de sa valeur en moins d’un an, je pense qu’on peut parler d’une crise financière en Russie ; quand les fonctionnaires russes ne sont pas payés depuis six mois, voire plus, je crois qu’on peut parler d’une crise sociale en Russie ; quand le président Eltsine change quatre fois de Premier ministre en moins de deux ans, sans oublier les difficultés qu’il a avec la Douma, je pense qu’on peut parler de crise politique en Russie ; quand les officiers russes vendent leur équipement, voire leur armement, à différentes maffias, je crois qu’on peut parler d’une crise militaire en Russie ; quand enfin les exportations russes chutent dramatiquement, je crois qu’on peut parler d’une crise économique en Russie.

Pourtant, aux yeux de ses partenaires européens et asiatiques, la Russie reste une puissance, un interlocuteur : alors que se passe-til ? Y a-t-il réellement une crise en Russie ?

Pour évoquer toutes ces questions, interviendront : Mme Hélène Carrère d’Encausse, de l’Académie française ; M. Alexandre Adler, professeur, directeur du Courrier international ; M. Gérard Wild, chercheur au CEPII, chargé de conférences à l’IEP Paris ; le général Henri Paris, président de « Démocraties » ; l’ingénieur général de l’armement Paul-Ivan de Saint Germain, directeur de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS) ; Mme Isabelle Facon, chargée de recherche à la FRS ; M. Yves Zlotowski, chercheur associé au Ceri ; Mme Anne de Tinguy, chargée de recherche au Ceri (CNRS) ; Mme Laure Mandeville, correspondant au Figaro.

Les actes de ce colloque seront publiés, comme chaque année, dans nos numéros de juillet et d’août-septembre. ♦

Philippe Vougny

Revue Défense Nationale - Juillet 1999 - n° 611

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