Été 2023 - n° 862

Vers un ordre international alternatif ?

208 pages

1989 et la chute du Mur mettant à bas le monde soviétique, 11 septembre 2001 et l’émergence de la menace du terrorisme islamiste de masse, 2008 et la crise des subprimes remettant en cause un modèle économique ultralibéral, Printemps arabes de 2011, été 2021 avec le repli occidental en désordre de Kaboul et puis le 24 février 2022 avec l’invasion d’un État souverain, l’Ukraine, par une Russie revancharde et nostalgique de son empire écroulé… Lire la suite

  p. 3-3

L’ordre international est aujourd’hui remis en cause par des puissances émergentes récusant les normes issues d’un Occident critiqué, voire rejeté. Il convient donc de réfléchir à ces transformations pour mieux en appréhender les difficultés et réduire les risques de confrontation, voire d’affrontements. Lire la suite

  p. 9-14

Perspective stratégique

Des normes contestées

Les normes internationales font désormais l’objet d’une contestation par certaines puissances, elles-mêmes ayant bénéficié de ce corpus normatif pour s’intégrer dans le jeu international. La difficulté est que cette remise en cause provient souvent de régimes autoritaires peu enclins à accepter les opinions publiques. Lire les premières lignes

  p. 17-22

La compétition dans l’espace extra-atmosphérique est une réalité depuis le 4 octobre 1957 et Spoutnik. Depuis, de nombreuses normes en ont organisé l’usage mais avec le développement de New Space, celles-ci pourraient être questionnées. La nouvelle course vers la Lune pourrait voir une réinterprétation du principe de non-appropriation. Lire les premières lignes

  p. 23-28

Les instruments normatifs permettent de maîtriser le développement des armes nucléaires semblant être critiqués après des années de construction d’un ordre ayant permis de limiter la prolifération. La crise actuelle, accentuée par la guerre en Ukraine, n’est pas satisfaisante et des contraintes juridiques appuyées par des outils de vérification sont nécessaires. Lire les premières lignes

  p. 29-34

L’ordre international s’est construit progressivement avec des traités, des conventions et des organisations confortant la notion d’États souverains. Certes, ces normes souvent complexes ont permis des arbitrages mais elles semblent remises en cause par certaines puissances imposant le rapport de force. Lire les premières lignes

  p. 35-40

Le droit des conflits armés est plus que jamais indispensable au regard des guerres actuelles comme en Ukraine. Le statut des combattants doit être préservé malgré les tentations de contestation, tandis que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) issu de la Convention de Genève (1949) doit voir son rôle confirmé et renforcé. Lire les premières lignes

  p. 41-45

Les drones ont acquis une maturité technologique suffisamment importante pour être largement employés sur tous les théâtres d’opérations et les conflits actuels. Bénéficiant d’une porosité civilo-militaire sur les usages, les technologies non habitées accroissent l’hybridité de ces systèmes au risque de participer en permanence à la compétition des puissances. Lire les premières lignes

  p. 46-50

Acteurs, outils et espaces virtuels

Le numérique a permis à des puissances émergentes de trouver une place dans un ordre international en pleine mutation. Des petits pays ont su capitaliser sur les outils numériques pour préserver leur autonomie, voire renforcer leur souveraineté. L’influence numérique est essentielle dans le monde actuel. Lire les premières lignes

  p. 51-57

Le commerce international a subi une profonde mutation après 2008 et est devenu un nouveau théâtre des conflits stratégiques et des rivalités entre puissances. Les principes de libre-échange sont remis en cause avec une guerre technologico-économique, en particulier entre les États-Unis et la Chine. La mondialisation économique est mise à mal. Lire les premières lignes

  p. 58-64

Les grands fonds marins – encore largement inexplorés – possèdent des ressources immenses susceptibles d’attirer la convoitise d’États ou d’opérateurs économiques. Ils pourraient donc devenir de nouveaux espaces de conflictualité malgré l’essor du droit de la mer piloté par l’ONU. Lire les premières lignes

  p. 65-70

Les récits alternatifs des complotistes en particulier américains veulent mettre à bas l’ordre international. Les réseaux sociaux permettent d’exploiter toutes les opportunités en bénéficiant d’un appui de nombreuses mouvances minoritaires, mais très actives. La Russie a clairement cherché à instrumentaliser ces récits à son profit. Lire les premières lignes

  p. 71-76

La Russie de Vladimir Poutine veut se présenter comme la « forteresse assiégée » par un « Occident collectif » hostile et voulant éliminer la civilisation russe. Cette vision du monde sert de justification idéologique à la guerre déclenchée contre l’Ukraine le 24 février 2022, au mépris complet du droit international. Lire les premières lignes

  p. 77-83

Cartographies mentales et recomposition des alliances

Les ambitions de Pékin sur Taiwan posent de vraies difficultés pour les États d’Asie du Sud-Est. Soucieux de préserver leur souveraineté et leur indépendance, souvent avec l’appui des États-Unis pour le volet militaire, ils veulent simultanément conserver de bonnes relations, notamment économiques avec la Chine. Lire les premières lignes

  p. 84-90

La Chine montre un souci particulier à l’égard de sa diaspora outre-mer, en cherchant à assimiler des ressortissants d’origine chinoise. Pour Pékin, ils doivent être les relais d’influence, au risque de froisser certains États d’Asie reprochant cette instrumentalisation à des fins géopolitiques. Lire les premières lignes

  p. 91-96

La victoire d’Erdoğan aux élections présidentielles de mai va lui permettre de poursuivre sa politique étrangère visant à accroître son autonomie à l’international, notamment vis-à-vis de l’Otan et des États-Unis. Cette approche met en particulier la question de la Syrie au cœur des projets conduits par Ankara. Lire les premières lignes

  p. 97-103

L’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont fait évoluer leur politique étrangère en cherchant une autonomie accrue répondant aux priorités de leurs intérêts nationaux. La recherche de multi-partenariats plus équilibrés est en cours tant avec la Russie et la Chine, obligeant les États-Unis et l’UE à mieux prendre en compte les besoins des pays du Golfe. Lire les premières lignes

  p. 104-110

Des États africains comme le Mali ont cherché des alternatives à leur politique étrangère. La France a d’ailleurs servi de bouc émissaire au profit de la Russie par l’intermédiaire de la société militaire privée Wagner. Toutefois, ces pays ont récemment évolué en cherchant à se rapprocher de leurs voisins régionaux pour sortir de leur isolement. Lire les premières lignes

  p. 111-118

La Républiques islamique d’Iran mène une politique étrangère complexe mêlant contestation permanente de l’ordre international, mais aussi volonté d’une intégration dans celui-ci, afin de préserver la survie du régime. L’accélération de la relation avec la Russie constitue une nouvelle tendance à observer avec attention. Lire les premières lignes

  p. 119-124

Il y a 50 ans

Mémoire stratégique

La Chine communiste de Mao a très vite eu des ambitions régionales affirmées en Asie. La question alors était autour de la relation ambiguë avec l’URSS, alors la référence mondiale du communisme, entre coopération et rivalité. Le tout sur fond de guerre froide, les États-Unis étant présents dans la région. Lire les premières lignes

  p. 129-143

La question d’un ordre mondial stable est récurrente depuis des décennies. La création de l’ONU à l’issue de la Seconde Guerre mondiale obéissait à ce besoin que la diplomatie l’emporte sur l’usage de la force brute. Or, la guerre froide avait remis en cause cette volonté de pacification. Le besoin demeure encore aujourd’hui. Lire les premières lignes

  p. 144-148

Si aujourd’hui, le concept de Tiers-Monde n’a plus lieu d’être, il n’en demeure pas moins intéressant de s’y replonger dans le cadre d’une approche historique quant aux problématiques de développement. Dans la décennie 1970, le constat était une ignorance des réalités des terrains car l’idée d’homogénéité nationale était un leurre au regard des inégalités entre citoyens. Lire les premières lignes

  p. 149-156

À l’été 1981, le dialogue Nord-Sud était présenté comme la principale orientation de la politique étrangère française suite à l’élection de François Mitterrand. Le contexte de l’époque voyait des États-Unis marqués par le libéralisme et l’URSS réduisant ses aides au développement des Pays les moins avancés (PMA). Lire les premières lignes

  p. 157-167

1990 marque une bascule avec l’effondrement en cours du système politico-économique de l’URSS et de ses satellites. Le modèle économico-libéral semblait devenu la norme internationale avec le rejet du protectionnisme : c’est le début d’une mondialisation censée apporter un progrès général pour tous les peuples. Lire les premières lignes

  p. 168-172

Chroniques

Le Pacte de Varsovie a été conçu autour d’un modèle imposé par l’URSS à ses pays satellites avec une doctrine et des équipements identiques. À l’inverse, l’Otan a travaillé sur les normes pour permettre à des armées de culture différente de savoir combattre ensemble, sans obliger à un cadre unique et rigide. Lire les premières lignes

  p. 173-175

Le retour du président Lula à la tête du Brésil se traduit par un nouvel activisme sur la scène internationale. Ce troisième mandat pourrait être une opportunité pour que Brasilia retrouve une place sur l’échiquier mondial et assume une forme de leadership au sein des BRICS et sur le continent sud-américain. Lire les premières lignes

  p. 176-180

Recensions

Pan Chengxin et Kavalski Emilian (dir.) : China’s Rise and Rethinking International Relations Theory  ; Bristol University Press, 2022, 253 pages - Romane Reynaud

La rivalité sino-américaine est-elle inévitable ? La Chine cherche-t-elle une domination régionale ? Mondiale ? À supplanter, voire expulser les États-Unis en Asie-Pacifique ? À refondre l’ordre libéral fondé sur des règles ? La montée en puissance de la Chine a été l’un des thèmes les plus étudiés des Relations internationales (RI) ces dernières années, synonyme d’une anxiété occidentale quant à l’essor chinois. Défi majeur pour l’imaginaire épistémique eurocentré, China’s Rise and Rethinking International Relations Theory propose une synthèse de la théorisation de la montée en puissance chinoise au sein des RI anglophones, et plus largement occidentales. L’ouvrage, dirigé par Chengxin Pan (enseignant à l’Australian National University) et Emilian Kavalski (professeur à la Jagiellonian University, Cracovie), se présente comme une analyse critique des RI contemporaines. Sur fond de remise en question de la « mono-disciplinarité » du courant dominant des RI d’un ordre dit « westphalien », il fournit un réexamen indispensable et précieux de ses concepts clés par la présentation des apports de la connaissance de la politique chinoise. Lire la suite

  p. 181-183

À une époque de dynamiques de plus en plus concurrentielles entre grandes puissances, le monde serait entré dans une potentielle transition des pouvoirs entre les États-Unis et la Chine. Il devient ainsi essentiel de comprendre le comportement de la Chine sur la scène internationale et les spécificités de sa politique étrangère. Lire la suite

  p. 183-184

Santoni Pierre : Guerres infinies. Aspects militaires des guerres irrégulières  ; Éditions Pierre de Taillac, 2022, 421 pages - Stéphan Samaran

C’est un panorama très complet des guerres non interétatiques du XXe siècle à nos jours que nous présente Pierre Santoni. Ce colonel d’infanterie, fort d’une riche expérience opérationnelle, réputé pour ses études tactiques et doctrinales, fait ici œuvre d’historien. Il passe en revue toutes les formes dites « irrégulières » que revêt la conflictualité : guerres civiles, révolutionnaires, de partisans, de libération, guérilla urbaine et cyberguerre. Au-delà des aspects purement militaires de recrutement, de formation et d’équipement des parties en présence, il analyse le rôle des facteurs sociologiques, notamment ethniques et religieux dans la genèse de ces conflits, comme dans leur déroulement et leur issue s’ils prennent fin. Lire la suite

  p. 185-186

Favarel-Garrigues Gilles : La verticale de la peur. Ordre et allégeance en Russie poutinienne  ; La Découverte, 2023, 234 pages - Clémentine Miconi

Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, se posent les questions de la résistance et de la protestation parmi les élites russes. Par cet ouvrage, Gilles Favarel-Garrigues met en évidence la façon dont celles-ci sont assujetties et muselées par un système administratif, qui tout entier repose sur des manigances et réseaux corrompus où chacun s’enrichit sur le dos de plus faible que soi. Lire la suite

  p. 186-188

Minic Dimitri : Pensée et culture stratégiques russes. Du contournement de la lutte armée à la guerre en Ukraine  ; Fondation de la Maison des sciences de l’homme, 2023, 632 pages - Gabriel Porc

« C’est probablement ainsi, à savoir comme la conclusion malheureuse de l’échec de la stratégie indirecte russe en Ukraine, qu’il faut analyser la décision de lancer l’“opération militaire spéciale” davantage que comme un épilogue armé prévu dans un plan de guerre indirecte » (p. 365-366). C’est par ces mots que Dimitri Minic conclue le dernier chapitre de son livre issu de sa thèse de doctorat en histoire des relations internationales. Pour comprendre cet échec, l’auteur s’attelle à l’étude de la littérature militaire, et notamment à la théorisation du concept de contournement de la lutte armée depuis la chute de l’URSS. D’une acception initiale purement clausewitzienne de la guerre (elle est une violence armée), la sacro-sainte définition russe a finalement été modifiée pour inclure une dimension plus démilitarisée, en particulier au travers du recours massif aux moyens non militaires et militaires indirects. Comment ce passage s’est-il effectué ? Lire la suite

  p. 188-190

Cet ouvrage est le troisième d’une série de l’auteur, après la publication de L’Afrique, nouvelle frontière du djihad en 2018 et Une guerre perdue en 2020. Marc-Antoine Pérouse de Montclos, politiste et directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD), inscrit cet ouvrage dans le contexte du retrait de l’armée française du Mali et américain en Afghanistan, deux interventions perçues comme des échecs dans leur objectif de stabilisation de ces zones. Fondamentalement, l’auteur essaie de tirer les leçons de la « guerre contre le terrorisme » menée au Sahel depuis dix ans. Lire la suite

  p. 190-192

Allès Delphine, Le Gouriellec Sonia et Levaillant Mélissa (dir.) : Paix et Sécurité. Une anthologie décentrée  ; CNRS Éditions, 2023, 316 pages - Romane Reynaud

Depuis une vingtaine d’années, le décentrement s’est imposé à l’agenda des relations internationales. Les représentations contemporaines de l’ordre international s’ancrent dans l’histoire intellectuelle transatlantique et reposent sur des conceptualisations westphaliennes. Cette lecture strato-centrée est devenue insuffisante pour analyser un contexte mondial où les logiques de puissance se diluent. Le décentrement apparaît comme nécessaire pour élargir les concepts et cadres théoriques au travers desquels nous analysons les interactions sociales et politiques à l’échelle mondiale. Lire la suite

  p. 192-194

Dans cet ouvrage, Toni Alaranta, chercheur finlandais spécialiste de la politique étrangère turque, se concentre sur les récits de la politique étrangère en Turquie dans une période témoignant des « changements de pouvoir au niveau mondial » (« Global Power Shifts » en anglais). Il a pour objectif de proposer une étude du « paysage de la politique étrangère ». L’auteur analyse la façon dont ce changement s’inscrit dans le narratif turc de la politique étrangère, en s’appuyant sur ce qu’il nomme le « paradigme post-kémaliste » des dernières décennies. Cela s’illustre par l’arrivée au pouvoir du Parti de la justice et du développement (AKP) en 2002 et du président Recep Tayyip Erdoğan, dont sa marge de manœuvre présidentielle a été renforcée suite au référendum constitutionnel de 2017, période représentant l’érosion des relations avec l’Occident. La politique étrangère turque, réputée pour être « alignée sur l’Occident » au XXe siècle, s’est radicalement muée, et ce, en raison des Global Power Shifts, qui concordent avec un contexte de conflit croissant à l’international, dans lequel les vieilles alliances sont « bousculées » et un nouveau monde s’installe avec l’émergence économique de la Chine. La Turquie considère que ces changements peuvent lui apporter de multiples opportunités. Lire la suite

  p. 194-196

Morel Camille : Les câbles sous-marins  ; CNRS Éditions, 2023, 192 pages - Romane Reynaud

À l’ère de la « société de l’information » où le flux de données qui transite de par le monde est toujours plus important, le numérique occupe une place prépondérante au sein des relations internationales. Les câbles sous-marins sont des éléments vitaux du fonctionnement de notre système planétaire. Composante éminemment stratégique du système international par laquelle sont transportés plus de 98 % des flux d’information, ils forment un réseau maritime devenu la pierre angulaire de la mondialisation contemporaine. Représentant près de 450 câbles sous-marins de fibre optique étirés sur plus de 1,3 million de kilomètres et reliant plus de 4 milliards d’internautes, ce réseau d’information invisible est pourtant assez méconnu du fait de la complexité de son fonctionnement et de son écosystème. Cet ouvrage a donc pour ambition de fournir un guide à la fois clair et d’une grande utilité pour la compréhension de cette technologie de pointe à l’heure où notre consommation de données ne cesse d’augmenter. Chercheuse en relations internationales, Camille Morel soumet ainsi un tour d’horizon exhaustif des câbles sous-marins et de ses grands enjeux et propose au lecteur une porte d’entrée et les clés de compréhension nécessaires à l’analyse de la portée géopolitique de ces infrastructures. Lire la suite

  p. 196-198

Hardt Judith Nora, Harrington Cameron, Lucke (von) Franziskus, Esteve Adrien et Simpson Nicholas P. (dir.) : Climate Security in the Anthropocene. Exploration des approches des États membres du Conseil de sécurité des Nations unies  ; Springer, 2023, 400 pages - Charlotte Desmasures

De nombreux travaux académiques ont été réalisés sur la question de la « sécurisation » et de la « risquification » du changement climatique par le Conseil de sécurité des Nations unies, organe exécutif de l’ONU chargé principalement du maintien de la paix et de la sécurité internationale. L’ouvrage dirigé par Judith Nora Hardt, Cameron Harrington, Franziskus von Lucke, Adrien Estève et Nicholas P. Simpson (1) renouvelle la littérature existante en proposant la première évaluation systématique des différentes perceptions et conceptions de la sécurité climatique des quinze États-membres permanents et non permanents du Conseil en 2020. Lire la suite

  p. 198-200

Hlatky (von) Stéfanie : Deploying Feminism: The Role of Gender in NATO Military Operations  ; Oxford University Press, 2022, 240 pages - Marie Fautrad

Détentrice de la Chaire de recherche du Canada sur le genre, la sécurité et les forces armées, et professeure agrégée au département d’études politiques de l’Université Queen’s, Stéfanie von Hlatky propose dans son livre une analyse détaillée sur l’agenda « Femmes, Paix et Sécurité » dans l’Otan, et présente la mise en œuvre de ces normes à travers le prisme de 3 de ses missions, la mission KFOR (Kosovo), la défense renforcée de l’avant (eFP) et la Mission de l’Otan en Iraq (NMI). L’agenda « Femmes, Paix et Sécurité », promu par plusieurs organisations internationales et initié notamment par l’ONU, vise à accroître la participation des femmes à la prévention et au règlement des conflits, la stabilisation et la construction de la paix, à inclure l’analyse de genre dans les programmes et les missions internationales, à rendre plus explicite le lien entre égalité des sexes et les conflits, ainsi qu’à protéger les femmes contre les violences sexuelles et sexistes. L’ouvrage de Stéfanie von Hltaky décrit la manière dont les normes de l’agenda « Femmes, Paix et Sécurité » au sein de l’Otan ont été interprétées par les militaires pour répondre à des objectifs d’efficacité opérationnelle, entraînant ainsi une « distorsion des normes ». Sous cette expression, l’auteure entend le mécanisme par lequel le sens initial d’une norme est transformé au cours de sa mise en œuvre. Selon l’auteure, cette distorsion se produit lorsque la diversité est instrumentalisée pour justifier l’intégration du genre, plutôt que de se concentrer sur l’élimination des pratiques discriminatoires. Lire la suite

  p. 200-202

Haglund David G. : Sister Republics: Security Relations between America and France  ; Baton Rouge, Louisiana State University Press, 2023, 294 pages - Maud Quessard

Sister Republics de David Haglund est un livre ambitieux qui examine en profondeur les relations franco-américaines à travers les époques. Érudit renommé, Haglund explore les interactions politiques, culturelles et historiques entre les États-Unis et la France depuis la Révolution américaine jusqu’à nos jours. Son approche équilibrée et sa recherche minutieuse font de cet ouvrage une contribution significative à l’étude des relations internationales. Le livre de Haglund s’articule autour de moments clés de l’histoire franco-américaine, et notamment du rôle fondamental de la France dans la guerre d’indépendance américaine. L’auteur explore ensuite l’impact de la Révolution française sur les idéaux et les aspirations politiques américaines, en mettant en lumière les interactions entre les penseurs et les dirigeants des deux pays à cette époque. Cette approche comparative permet de saisir les parallèles et les divergences entre les processus révolutionnaires respectifs et leur influence sur la construction des États-nation. Lire la suite

  p. 202-203

Revue Défense Nationale - Été 2023 - n° 862

Vers un ordre international alternatif ?

The international order is today being challenged by emerging powers which object to, or even reject, the standards set by a much-criticised West. We need to analyse this changing situation to gain better understanding of the difficulties presented, and to reduce the risks of confrontation in its various forms. Read more

Strategic Perspective

Contested Standards

International norms and standards are being challenged by a number of countries which have themselves benefited from those very standards in order to become recognised within the international system. The difficulty is that such questioning often originates comes from authoritative regimes which are unlikely to take account of public opinion.

Competition in outer space has existed since the launch of Sputnik on 4 October 1957. Many standards brought into effect since then have managed the use of space, but with the development of New Space they risk being called into question. Could the new race for the moon lead to reinterpretation of the principle of non-appropriation?

After many years spent constructing an order which has limited the proliferation of nuclear weapons, the normative instruments which permit control over their development are now being criticised. The current crisis, accentuated by the war in Ukraine, is unsettling, and legal constraints supported by verification mechanisms are necessary.

The international order has been progressively constructed through treaties, conventions and organisations which support the principle of the sovereign nation. Though often somewhat complex, these standards have permitted discussion and rendered solutions possible, but they are being called into question by a number of powers which seek to impose their will upon others.

When considering current wars, such as that in Ukraine, the law that covers armed conflict is clearly more essential than ever. The status of the combatant must be maintained despite attempts to challenge it, and the role of the International Committee of the Red Cross (ICRC), which resulted from the 1949 Geneva Convention, must be reconfirmed and strengthened.

Drones have acquired sufficient technological maturity to be deployed widely in all current operational theatres and conflicts. Unmanned technologies benefit from dual civil and military use and are leading to the development of systems of an increasingly hybrid nature which, in turn, risk being permanently employed in power struggles between states.

Actors, Equipment and Virtual Space

Digital information technology (IT) has afforded emerging powers the opportunity to establish a place in a rapidly-changing international order. Small countries have been able to capitalise on digital technology to preserve their independence and even to strengthen their sovereignty. Having digital influence is essential in today’s world.

International trade has undergone considerable change since 2008 and has become a new theatre of strategic conflict and rivalry between powers. The principles of free trade are being tested in a war of technology and economics, waged in particular between the United States and China. Globalisation of the economy is suffering.

The greatest ocean depths are still largely unexplored and contain immense resources likely to attract the interest of state and commercial operations. They could well become new areas of conflict despite the broadening of the Convention on the law of the sea piloted by the UN.

The alternative ‘truths’ of conspiracy theorists (especially American ones) are attempts to upset the international order. Social networks enable every opportunity to be exploited, aided by many highly active, if minority, trends and movements. Russia has clearly been seeking to manipulate these alternative visions to its advantage.

Vladimir Putin’s Russia is seeking to present itself as a fortress besieged by a hostile Collective West that wishes to wipe out Russian civilisation. This vision of the world is being used as ideological justification for the war being waged against Ukraine since 24 February 2022 in complete contravention of international law.

Mind Mapping and Reforming Alliances

Beijing’s ambitions regarding Taiwan are posing great difficulties for the countries of South-East Asia. Though anxious about preserving their sovereignty and independence, often with military support from the United States, they at the same time want to maintain good relations—especially economic relations—with China.

China shows particular concern for its dispersed overseas communities, and seeks to assimilate populations of Chinese origin. For Beijing, the latter should act as relays of Chinese influence, albeit at the risk of upsetting some Asian countries which deplore such manipulation to geopolitical ends.

Erdoğan’s victory in the May presidential elections will allow him to pursue his foreign policy aimed at building Turkish independence on an international level, with regard to NATO and the United States in particular. His approach puts the Syrian question at the heart of Ankara’s projects.

Saudi Arabia and the United Arab Emirates (UAE) have developed their foreign policies in the desire for increased autonomy in line with the priorities of their national interests. The search for better-balanced multiple partnerships is underway, including those with both Russia and China; this will compel the United States and the EU to take better note of the needs of Gulf countries.

African countries such as Mali have been looking for alternative foreign policies. France has been used as a scapegoat to Russia’s advantage through the intermediary of the para-military Wagner Group. That aside, these countries have recently evolved through their search for closer ties with their regional neighbours in order to escape from their isolation.

The Islamic Republic of Iran conducts a complex foreign policy which combines permanent challenge to the international order with the desire to be accepted within it in order to ensure the survival of its regime. Increased effort on its relations with Russia is a new trend to be kept under close observation.

Fifty years ago

Strategic History

Mao’s communist China lost no time in manifesting its regional ambitions in Asia. Quite another question was its ambiguous relationship with the USSR, at the time the world reference for communism, which fluctuated between cooperation and rivalry. All of which was against the background of the Cold War and the presence of the United States in the region.

The question of a stable world order has been raised again and again for decades. The creation of the UN after the Second World War resulted from the need for diplomacy to triumph over the use of brute force. For all that, the Cold War called into question this desire for peace. There is still a need for this stability.

Whilst today the concept of a Third World no longer truly exists, it is no less interesting to take a historical approach and look at the problems of development. In the 1970s there was much ignorance of the realities on the ground since the idea of national unity was an illusion once the inequalities between citizens were taken into account.

In the summer of 1981, after the election of François Mitterand, the North-South dialogue was presented as the major French foreign policy direction. The context at the time was of a United States notable for its liberalism, and a USSR reducing its development aid to the least-developed countries.

The year 1990 was a tipping point, marked by the collapsing of the politico-economic system of the USSR and its satellites. The liberal economic model seemed then to have become the international norm, along with a rejection of protectionism. It was the start of globalisation supposed to bring widespread progress for all peoples.

Chronicles

The Warsaw Pact was designed around a model imposed by the USSR on its satellite countries, which espoused identical doctrines and equipment. NATO, on the other hand, worked on developing standards that allowed forces from different cultures to fight together without imposing a single, rigid framework.

The return of president Lula at the head of Brazil is seeing new activity on the international scene. His third term could be an opportunity for Brasilia to recover its place in the world and assume a form of leadership among the BRICS countries and on the South American continent.

Book Reviews

Pan Chengxin et Kavalski Emilian (dir.) : China’s Rise and Rethinking International Relations Theory  ; Bristol University Press, 2022, 253 pages - Romane Reynaud

Santoni Pierre : Guerres infinies. Aspects militaires des guerres irrégulières  ; Éditions Pierre de Taillac, 2022, 421 pages - Stéphan Samaran

Favarel-Garrigues Gilles : La verticale de la peur. Ordre et allégeance en Russie poutinienne  ; La Découverte, 2023, 234 pages - Clémentine Miconi

Minic Dimitri : Pensée et culture stratégiques russes. Du contournement de la lutte armée à la guerre en Ukraine  ; Fondation de la Maison des sciences de l’homme, 2023, 632 pages - Gabriel Porc

Allès Delphine, Le Gouriellec Sonia et Levaillant Mélissa (dir.) : Paix et Sécurité. Une anthologie décentrée  ; CNRS Éditions, 2023, 316 pages - Romane Reynaud

Morel Camille : Les câbles sous-marins  ; CNRS Éditions, 2023, 192 pages - Romane Reynaud

Hardt Judith Nora, Harrington Cameron, Lucke (von) Franziskus, Esteve Adrien et Simpson Nicholas P. (dir.) : Climate Security in the Anthropocene. Exploration des approches des États membres du Conseil de sécurité des Nations unies  ; Springer, 2023, 400 pages - Charlotte Desmasures

Hlatky (von) Stéfanie : Deploying Feminism: The Role of Gender in NATO Military Operations  ; Oxford University Press, 2022, 240 pages - Marie Fautrad

Haglund David G. : Sister Republics: Security Relations between America and France  ; Baton Rouge, Louisiana State University Press, 2023, 294 pages - Maud Quessard

Revue Défense Nationale - Été 2023 - n° 862

Vers un ordre international alternatif ?

1989 et la chute du Mur mettant à bas le monde soviétique, 11 septembre 2001 et l’émergence de la menace du terrorisme islamiste de masse, 2008 et la crise des subprimes remettant en cause un modèle économique ultralibéral, Printemps arabes de 2011, été 2021 avec le repli occidental en désordre de Kaboul et puis le 24 février 2022 avec l’invasion d’un État souverain, l’Ukraine, par une Russie revancharde et nostalgique de son empire écroulé…

Autant de ruptures remettant en cause l’ordre international dont on s’aperçoit qu’il est en mutation profonde et accélérée. De nouvelles puissances émergent et veulent bousculer les classiques relations entre États, d’autant plus que de nouveaux acteurs non étatiques sont désormais parties prenantes, sans parler des opinions publiques bénéficiant désormais d’un accès quasiment illimité à l’information, qu’elle soit avérée ou manipulée via l’instantanéité des réseaux sociaux.

Ce qui nous amène au dossier « Vers un ordre international alternatif ? » proposé pour ce numéro d’été 2023 et piloté par l’Institut de recherche stratégique de l’École militaire. Encore une fois, l’Irsem s’est entouré des meilleurs experts, y compris de jeunes doctorants, qui apportent ici des visions croisées riches de leurs réflexions et de leur expérience sur le terrain. La RDN remercie toute l’équipe de l’Irsem tant pour la qualité des travaux réunis dans ce numéro triple, que pour la confiance mutuelle lors de l’élaboration de ce projet.

Comprendre et expliquer ces transformations de cet ordre international doit aussi s’appuyer sur un regard vers l’histoire afin de s’inscrire dans le temps long, c’est tout l’intérêt de la présentation de plusieurs textes issus de nos anciens numéros. Les articles sélectionnés démontrent que la question a toujours existé même si les approches ont bien sûr évolué, comme la notion de « Tiers-Monde ».

En cet été 2023, la barre des 18 mois de guerre en Ukraine sera franchie, sans que l’on voie réellement une sortie de crise. La contre-offensive de Kiev a commencé début juin et sera déterminante, même si on ne sait pas encore si elle permettra d’obtenir des succès militaires suffisamment importants pour alors enclencher un éventuel début de discussions. Le temps reste donc à la guerre.

Certes, l’été n’est pas le meilleur moment pour s’intéresser aux affaires du monde. La pause estivale, largement attendue après une année difficile tant en France qu’ailleurs, ne doit pas faire oublier que l’échiquier géopolitique continue à bouger et à se tendre. À l’Est du continent européen, la guerre ; en Indo-Pacifique, la pression chinoise sur Taïwan ; en Afrique subsaharienne, les déstabilisations de certains États dont les juntes ont fait le choix de Moscou… via Wagner… Autant de foyers de crises et d’escalades potentielles.

Pour autant, bonnes vacances bien méritées à nos lecteurs.

Jérôme Pellistrandi

Revue Défense Nationale - Été 2023 - n° 862

Vers un ordre international alternatif ?

La RDN vous invite dans cet espace à contribuer au « débat stratégique », vocation de la Revue. Cette contribution doit être constructive et doit viser à enrichir le débat abordé dans le dossier. C’est l’occasion d’apporter votre vision, complémentaire ou contradictoire. Vos réponses argumentées seront publiées sous votre nom après validation par la rédaction.

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